Illustration : Panneau sur la rive européenne d’Istanbul à la sortie du pont du Bosphore.
Surtout, ne pas changer une équipe qui perd
La patience d’un grand nombre de pays du Moyen-Orient a dépassé le point de non-retour vis-à-vis de l’exigence des Palestiniens du « droit au retour » dans un foyer où leur passé peut se résumer à un ancêtre ayant vécu deux ans dans une ville israélienne.
Au moment où les Émirats arabes Unis s’apprêtent à signer un accord de paix avec l’État juif et où le Soudan semble prendre la même voie, les réfugiés les plus riches du monde pourraient au moins faire semblant de souhaiter un État vivant en paix avec son voisin, plutôt que l’annihilation de celui-ci.
Las ! Un diplomate émirati, qui s’est fait envoyer sur les roses de Ramallah pour l’avoir suggéré, a mis les points sur les i et tapé des poings sur la table : « La position de refus des Palestiniens est très regrettable. On leur a tendu une échelle pour redescendre de l’arbre en les invitant à cette conférence. Ils l’ont catégoriquement rejetée sans donner aucune explication. Les Palestiniens doivent réaliser que les roues de la paix dans la région se sont mises en mouvement et la normalisation se fera avec eux ou sans eux s’ils persistent dans leur refus ».
La façon la plus efficace pour les Israéliens de se débarrasser du problème serait peut-être d’accéder à la demande de ceux qui réclament leur État pour le rendre Judenrein, mais qui veulent peupler celui de leurs voisins juifs : ils étaient 500.000 en 1948, dont il reste à peu près 30.000 individus. Mais ils sont aujourd’hui 5,6 millions à réclamer ce « droit au retour » dans LEUR maison et pas une autre.
Si on leur en offrait l’opportunité, les descendants du locataire d’une pièce à Jaffa ne manqueraient pas de revendiquer tous les hôtels 5 étoiles qui ont été construits, depuis, sur le littoral. Ainsi, les multiples candidats au pactole, chacun muni de la clef symbolique d’un mètre de long fournie par son gouvernement pour les « manifs spontanées », entameraient une Intrafada probablement plus meurtrière encore que celle qui oppose déjà les Gazaouis aux Cisjordaniens.
Prendre ses désirs pour des réalités
La seule certitude que l’on peut avoir concernant la situation moyen-orientale est que la paix ne viendra pas de l’Union européenne. Nonobstant ses déclarations pour la promouvoir entre Israël et les Palestiniens, l’UE ne vise en aucun cas la résolution du conflit, mais sa propre place comme acteur de premier plan au Moyen-Orient.
Un traité de paix est à la signature entre deux pays qui étaient en guerre depuis 70 ans : on attendrait des déclarés pacifistes européens qu’ils célèbrent l’événement. Nenni : du bout des lèvres, ils se sont félicités de ce que cela prive Israël d’exercer sa souveraineté sur une partie de son territoire historique.
« Et c’est un vieux pays, la France, d’un vieux continent comme le mien, l’Europe, qui vous le dit aujourd’hui…(INA) », avait déclaré Dominique de Villepin, ministre des Affaires étrangères du temps où il se prenait pour la France et se croyait donc fondé à donner des leçons de politique aux États-Unis.
(NDLR : la France de Macron s’y croit toujours !)
Il est paradoxal que notre pays soit devenu renégat à lui-même, qu’il cherche chaque jour les verges pour se faire battre par tout un chacun, mais que sa diplomatie moyen-orientale, elle, n’évolue en rien par rapport à la doxa fixée en 1967 : le conflit israélo-palestinien est la base et la pierre angulaire de tous les conflits mondiaux. Seule une reddition pure et simple de l’État juif vis-à-vis des exigences du camp d’en face permettra de le solutionner, ce qui entraînera inéluctablement la paix universelle : délivréééés, libéréééés, les peuples qui s’entre-tuent aujourd’hui se donneront la main.
Alors, les Gazaouis déclareront leur flamme aux Cisjordaniens sans utiliser pour cela des cerfs-volants enflammés, les chiites verront dans les sunnites des frères et non des hérétiques à abattre, les indigènes de la république découvriront le sens des mots « égalité » et « tolérance », les islamistes s’inscriront dans des mouvements féministes, les véganes ne rêveront plus de saigner les carnivores à blanc et George Soros verra enfin se réaliser son rêve du remplacement du drapeau étoilé par une faucille et un marteau dorés sur fond rouge, pendant que lui-même endossera l’uniforme de Staline.
Les amis de nos ennemis sont quand même nos amis
La France officielle a beaucoup plus honte des milliers de kilomètres de routes, des hôpitaux et des universités qu’elle a construits en Algérie, que des dizaines de milliers de Juifs qu’elle a déportés de bon cœur.
Cela explique son tropisme arabo-musulman, qui la fait chouchouter l’Iran (musulman et, encore mieux qu’arabe, puisqu’aryen) et tenter de court-circuiter les tentatives américaines pour empêcher les ayatollahs de construire la bombe atomique avec laquelle ils vont exterminer les Juifs et les croisés, pour hâter la venue du Mahdi. Est-ce parce que l’accord de paix entre Israël et les EAU contrarie cet objectif, que l’Europe en général et la France en particulier n’ont trouvé que quelques mots tièdes pour accueillir ce succès auquel ils prétendent aspirer ?
Favoriser le recentrage islamiste d’Erdogan et fermer les yeux sur les turpitudes de la Turquie relève du même masochisme. À moins que notre monarchie républicaine rêve d’un retour de l’Empire ottoman ?
À tropisme, tropisme et demi
Un chargé d’affaires israélien à Ankara, Roey Gilad, a déclaré à Reuters, le 26 août 2020, qu’Erdogan avait gracieusement remis à une douzaine de membres du Hamas des passeports et des cartes d’identité turcs. De quoi leur permettre de voyager en toute quiétude comme citoyens anatoliens.
« Nous avons déjà un document dont nous présenterons une copie au gouvernement turc. À en juger par la dernière expérience que nous avons eue en lui présentant déjà un dossier bien documenté… et en n’obtenant aucune réponse, je n’espère pas grand-chose cette fois-ci. »
Notre président, qui a toujours essayé de protéger Ankara, a quand même été obligé de surseoir à son intégration dans l’Union européenne, quand l’impérialisme turc l’a conduit à annexer une moitié d’un État déjà adhérent : Chypre. Malgré les clins d’œil appuyés de son supporter hexagonal, Erdogan a montré que ce n’était qu’un début, il continue le combat !
Pauvre Macron en a été réduit à saupoudrer son miel amical d’une pincée de sel : « Ces dernières années, la stratégie qui a été celle de la Turquie n’est pas la stratégie d’un allié de l’Otan. Il est clair qu’il y a une série de préalables pour réengager un dialogue de confiance (RFI) ».
Il n’a, cependant pas mentionné les passeports alloués à des membres d’une organisation reconnue comme terroriste par l’UE. Peut-être pense-t-il que les accords conclus par ses prédécesseurs avec une autre faction terroriste[1] le protégeront des retombées négatives d’attentats pendant son mandat, si lesdits passeports sont utilisés pour l’entrée dans la patrie des droits de l’homme…
Ce serait faire preuve d’une incroyable naïveté vis-à-vis de fanatiques qui revendiquent leurs objectifs meurtriers et trouvent bon d’employer tous les moyens pour arriver à leur fin du monde. En effet, Roey Gilad a précisé que « les membres du Hamas qui avaient reçu des documents turcs finançaient et organisaient des actions terroristes depuis Istanbul. Beaucoup d’entre eux sont venus en Turquie en 2011, quand plus de 1000 prisonniers palestiniens ont été libérés en échange d’un jeune appelé franco-israélien. »
L’amour rend aveugle. L’idéologie aussi
Notre président croit que le modèle macronien fait envie à la terre entière, aussi n’imagine-t-il même pas que d’autres puissent rêver d’un paradis agrémenté de 72 vierges et ne trouver aucune séduction à un ici et maintenant démocratique et capitaliste.
Ce filtre rose le rend aveugle au danger vert-brun. Liberté-Égalité-Fraternité ne sont pas l’idéal de tout le monde, surtout pas de ceux qui croient en la seule loi édictée par leur D’. Pour ceux-là, l’expression « droits de l’homme » relève de la provocation.
La preuve, en mai 2019, après une série d’agressions physiques contre des journalistes et l’incarcération de 146 d’entre eux, l’Institut international de la presse turque et 20 autres organisations de défense de la liberté de la presse avaient envoyé une lettre à Erdogan, dans laquelle ils disaient espérer que, « dans les semaines à venir… les journalistes de tout le pays pourront diffuser des nouvelles et des informations sans crainte de représailles… Des attaques comme celles contre Demirağ et Özyol, si elles ne sont pas punies, auront effet dissuasif sur les journalistes du pays et renforcent un climat de peur, qui entrave gravement la crédibilité de la Turquie en tant que démocratie (Gatestone Institute). »
Et les droits de la femme ? L’avocate turque Ebru Timtik, condamnée à une peine de 13 ans et demi pour « appartenance à une organisation terroriste », est morte le 27 août 2020 en prison, après 238 jours de grève de la faim pour réclamer un procès équitable.
Intolérance uniquement contre les tolérants
C’est dans le même esprit d’ouverture et de tolérance qu’Erdogan a confisqué la Basilique Ste Sophie. Devenu mosquée lors de la conquête ottomane, le bâtiment avait été transformé en musée quelques années après la défaite de l’Empire : en 1934, Hagya Sophia était le symbole de la laïcité de la république instaurée par Mustafa Kemal, grand admirateur de la France.
En juillet 2020, Erdogan a renouvelé la tradition islamique qui veut qu’en territoire musulman, nulle autre religion que l’islam n’ait droit de cité : la basilique, classée patrimoine mondial de l’humanité par l’Unesco, est redevenue une mosquée, subissant le sort de toutes les églises d’Espagne sous les Maures et des synagogues de l’ensemble du monde arabo-musulman.
La démarche d’Erdogan ne vise pas seulement à affirmer la prééminence de l’islam sur toutes les autres religions ou formes de pensées, elle veut aussi le présenter, lui, comme le nouveau calife, à la tête de la Oumma, la communauté des musulmans.
Elle s’inscrit dans la même stratégie que l’occupation du nord de Chypre, les invasions de parties de la Syrie et la lutte pour exterminer les Kurdes, le soutien à Daesh, l’envoi de combattants en Libye, l’accueil de légions de Frères musulmans égyptiens, la conquête impérialiste de territoires régionaux jusqu’au Soudan et la concurrence faite à l’Arabie saoudite pour le contrôle des sanctuaires de La Mecque et de Médine.
S’il n’en reste qu’un, Macron sera celui-là
Mais notre président ne s’attache pas à des détails aussi sordides que les stratégies de conquêtes. Il agit avec ses tripes et ses tripes font des choix que la raison de la nation France ne peut accepter. Il ne porte pas le peuple dans son cœur et ce, d’autant moins qu’il aime les bad boys, surtout quand ils sont basanés.
Emmanuel Macron avait 8 ans quand est sortie la chanson de Marcel Amont (YouTube) : « Un mexicain basané-éééé, est allongé sur le so-ol, le sombrero sur le nez-éééé, en guise en guise en guise en guise en guise en guise de parasol. »
Aujourd’hui, il doit avoir aux lèvres : « Des islamistes basané-éééés vont arriver sur not’so-ol, Kalachnikov sous l’keffieh-éééé, en guise en guise en guise en guise en guise en guise de pacifique obole ».
Une suggestion pour élire la chanson de l’été covid ? LM♦
Liliane Messika, MABATIM.INFO
[1] Le groupe Abou Nidal, responsable de l’attentat contre la rue des Rosiers en 1982 : « On a passé une sorte de deal verbal en leur disant : Je ne veux plus d’attentat sur le sol français et en contrepartie, je vous laisse venir en France, je vous garantis qu’il ne vous arrivera rien. » (le Parisien)