par Giulio Meotti
- Malheureusement, la position du pape François sur l’islam semble sortir droit issue d’un monde imaginaire.
- « L’islam authentique et une lecture correcte du Coran s’opposent à toutes les formes de violence », a affirmé le pape sans rentrer dans les détails. Tous les efforts du pape semblent avoir pour but d’exonérer l’islam de ses responsabilités. Même des musulmans très pratiquants – comme le président égyptien Abdel Fattah el-Sisi, l’auteur et médecin américain Zuhdi Jasser, l’ancien ministre koweïtien de l’Information Sami Abdullatif Al-Nesf, l’auteur franco-algérien Razika Adnani, le philosophe tunisien basé à Paris Youssef Seddik, le journaliste jordanien Yosef Alawnah et l’écrivain marocain Rachid Aylal, et bien d’autres encore -…, ne vont pas aussi loin.
- « Le pape François ne peut en aucun cas ignorer les graves problèmes posés par l’expansion (de l’islam) … au cœur même du domaine chrétien … Notons-le à nouveau … la dernière religion arrivée en Europe a un empêchement intrinsèque à s’intégrer dans la trame européenne fondamentalement judéo-chrétienne … » – Boualem Sansal, écrivain algérien, dans son best-seller « 2084 ».
- Le pape François risque désormais l’engloutissement physique du monde chrétien dans le croissant musulman – comme le montre le logo choisi par le Vatican pour le prochain voyage du pape au Maroc. Le temps de l’apaisement est passé.
La persécution des chrétiens a pris l’ampleur d’une crise internationale. Malheureusement, la position du pape François sur l’islam semble sortir d’un monde imaginaire. (Photo de Giulio Origlia / Getty Images) |
En 2018, 4.305 chrétiens ont été assassinés pour la seule et bonne raison qu’ils étaient chrétiens. Ce chiffre dramatique a été compilé par le « World Watch List 2019 » de l’organisation non gouvernementale (ONG) Open Doors. L’année 2018 aura compté 1 000 victimes chrétiennes de plus, soit 25% de plus que l’année précédente (3 066).
De nos jours, 245 millions de chrétiens sont persécutés un peu partout dans le monde en raison de leur foi. En novembre dernier, le «Rapport 2018 sur la liberté religieuse » de l’association Aid to the Church in Need (Aide à l’Église en détresse) a abouti à la même conclusion : 300 millions de chrétiens sont victimes de violence. Le christianisme, malgré une vive concurrence, a été qualifié de « religion la plus persécutée au monde ».
En mars 2019, le pape François se rendra au Maroc, un pays également inscrit sur la liste de surveillance d’Open Doors. Malheureusement, la position du pape François sur l’islam semble sortir droit d’un monde imaginaire. La persécution des chrétiens est désormais une crise internationale. Au cours des deux derniers mois seulement, un policier a été tué alors qu’il tentait de désamorcer une bombe devant une église copte en Égypte. Avant cela, sept pèlerins chrétiens ont été assassinés par des extrémistes religieux. Peu après, une fosse commune a été découverte en Libye contenant les restes de 34 chrétiens éthiopiens tués par des djihadistes affiliés à l’État islamique. Le régime iranien, a lancé une vague de répression qui a amené l’incarcération de plus de 109 chrétiens. Il a fallu trois mois à la pakistanaise Asia Bibi, acquittée de l’accusation de « blasphème », pour réussir à fuir le Pakistan ou ses anciens compatriotes réclamaient sa pendaison. À Mossoul, autrefois capitale chrétienne d’Irak, « Noël a eu lieu sans chrétiens« , et dans l’ensemble du pays, 80% des chrétiens ont disparu.
Le cardinal Louis Raphael Sako, patriarche de Babylone des Chaldéens et chef de l’Église catholique chaldéenne, a récemment rendu publics des statistiques sur la persécution des chrétiens d’Irak : « 61 églises ont été bombardées, 1 224 chrétiens ont été tués, 23 000 maisons et biens immobiliers appartenant à des chrétiens ont été confisqués ». Le patriarche a rappelé au monde que l’État islamique donnait « trois options aux chrétiens » : la conversion à l’islam, le paiement d’un impôt spécial ou l’abandon immédiat et forcé de leurs terres. « Autrement, tous auraient été tués ». C’est ainsi que 120 000 chrétiens ont été expulsés.
« Le silence entêté des dirigeants européens sur la question des religions, l’islam en particulier, étonne et déçoit », a écrit récemment le romancier algérien Boualem Sansal.
« Leur attitude est tout simplement irresponsable, suicidaire, et même criminelle dans le contexte actuel, marqué par l’expansion vertigineuse d’un islam radical exclusiviste arrogant… C’est comme vivre au pied d’un volcan en colère et ne pas comprendre qu’il se prépare à entrer en éruption ».
Sansal, menacé de mort par les islamistes en France comme en Algérie, est l’auteur du best-seller « 2084« . Il affirme que la position du pape François sur le monde musulman est semblable à celle des dirigeants occidentaux:
« Le pape François ne pouvait d’aucune manière être dans l’ignorance des problématiques lourdes induites par l’expansion de l’islam radical dans le monde et aujourd’hui au cœur même du domaine chrétien. Relevons encore ceci : l’islam, dernière religion arrivée en Europe, a un empêchement intrinsèque à s’intégrer dans la trame européenne fondamentalement judéo-chrétienne, même si ce référent s’est étiolé au cours des derniers siècles. »
Le pape François a fini par reconnaître que « l’idée de conquête » est partie intégrante de la religion islamique, mais il a rapidement ajouté que le christianisme aussi pouvait être qualifié de conquérant. « L’islam authentique et la lecture correcte du Coran s’opposent à toutes les formes de violence », a affirmé le pape sans donner plus de détails. Il n’a pas non plus expliqué en quoi l’islam était « une religion de paix compatible avec le respect des droits de l’homme et la coexistence pacifique ». Les efforts du pape tendent en réalité à exonérer l’islam de ses responsabilités, un chemin ou il s’aventure bien plus loin que nombre des critiques musulmans comme le président égyptien Abdel Fattah el-Sisi, l’auteur américain et médecin Zuhdi Jasser, l’ancien ministre koweïtien de l’Information Sami Abdullatif Al-Nesf, l’auteur franco-algérien Razika Adnani, le philosophe tunisien basé à Paris, Youssef Seddik, le journaliste jordanien Yosef Alawnah et l’auteur marocain Rachid Aylal.
La dramatique persécution des chrétiens dans le monde islamique met en lumière un paradoxe occidental : « Depuis leur victoire dans la Seconde Guerre mondiale, les Occidentaux ont apporté de grands avantages à toute l’humanité », a écrit Renaud Girard dans Le Figaro .
« Scientifiquement, ils lui ont fait partager leurs grandes inventions, telles que la pénicilline ou Internet. Les droits de l’homme et la démocratie sont loin d’être appliqués partout dans le monde, mais ils sont la seule référence qui existe de gouvernance au niveau international. Il reste indéniable que, sous l’impulsion des Occidentaux, de vastes succès politiques, techniques, sanitaires et sociaux ont été accomplis en l’espace de deux générations. Mais il y a un domaine où la planète a indéniablement régressé depuis 1945, et où la responsabilité occidentale est patente. C’est celui de la liberté de conscience et de religion … En s’abstenant de défendre les Chrétiens d’Orient, l’Occident a commis une double erreur stratégique : il a donné un signal de faiblesse en abandonnant ses amis idéologiques ; il a renié son credo où, depuis deux siècles, figure en première place, la tolérance religieuse. »
Aid to the Church in Need, association auteur d’un autre rapport sur la persécution des chrétiens, note qu’ « aux yeux des gouvernements occidentaux et des médias, la liberté de religion passe progressivement en queue des priorités en matière de droits de l’homme, derrière les questions de genre, de sexualité et de race ».
« Le politiquement correct ne veut rien savoir de la persécution et de la répression qui pèsent actuellement sur le christianisme et cet aveuglement volontaire a quelque chose de sinistre », a récemment déclaré Mgr Manfred Scheuer, évêque de Linz, en Haute-Autriche.
Cette éclipse est d’autant plus dramatique, que chacun sait que le christianisme est en voie d’ « éradication » au Moyen-Orient, a déclaré l’archevêque de Cantorbéry, Justin Welby :
« Des centaines de milliers de personnes ont été contraintes de quitter leur domicile. Nombre d’entre elles ont été tuées, asservies et persécutées ou converties de force. Quant à ceux qui restent, ils se demandent « pourquoi rester ? » La population chrétienne d’Irak a été réduite de moitié depuis 2003. Leurs églises, leurs maisons et leurs commerces ont été endommagés ou détruits. La population chrétienne de Syrie a diminué de moitié depuis 2010. Les communautés chrétiennes qui étaient les fondements de l’Église universelle dans la région sont à risque d’extinction imminente ».
L’Occident a trahi ses amis chrétiens de l’Est (ici et ici). L’Occident pourrait aussi s’interroger sur l’action du Vatican et du pape contre cette nouvelle persécution religieuse.
La critique vient désormais du monde catholique lui-même. « François s’inquiète peu des fermetures d’église en série, et ne s’émeut guère de l’islamisation de l’Europe », a écrit le chroniqueur catholique américain William Kilpatrick.
« En effet, son encouragement à la migration de masse implique qu’il n’a rien à objecter à l’islamisation. Soit il adhère réellement au mensonge que l’islam est une religion de paix, soit il croit que sa prophétie d’un islam de paix a une puissance auto-réalisatrice et donnera naissance à un islam plus modéré. Dans les deux cas, François acquiesce à une propagation rapide de l’islam. Que François ait été mal informé sur l’islam ou qu’il ait adopté une stratégie de désinformation, il prend un énorme pari, pas seulement avec sa propre vie mais avec la vie de millions de personnes ».
Des pans entiers du territoire syrien sont aujourd’hui nettoyés de leurs chrétiens historiques. Le pape François a récemment reçu une lettre d’un prêtre franciscain de Syrie, le père Hanna Jallouf, patriarche de Knayeh, un village proche d’Idlib, fief des rebelles islamistes anti-Assad. « Les chrétiens de ce pays sont dans la même situation que les brebis parmi les loups » a écrit Jallouf .
« Les fondamentalistes ont dévasté nos cimetières, ils nous ont empêché de célébrer des messes en dehors de l’église, et nous ont dépouillé des signes extérieurs de notre foi : croix, cloches, statues sans parler des pratiques habituelles de notre religion. »
Si le pape ne veut plus recevoir de telles lettres, il doit faire preuve de courage et affronter l’une des plus urgentes persécutions de notre temps.
Le pape Benoît XVI, dans son discours de Ratisbonne, a dit ce qu’aucun autre pape n’avait osé dire avant lui : qu’il existe un lien spécifique entre violence et islam. Pour illustrer son propos, Benoît XVI a cité un dialogue du XIVe siècle entre un empereur chrétien byzantin, Manuel II Paléologue, et un érudit persan, sur le concept de violence dans l’islam : « Montre-moi donc ce que Mahomet a apporté de nouveau, et tu y trouveras seulement … son mandat de diffuser par l’épée la foi qu’il prêchait » a dit l’empereur.
Le pape Jean-Paul II avait également fait part de ses préoccupations. En 1992, Mgr Mauro Longhi, qui, encore étudiant, accompagnait souvent le pape lors de ses promenades, a cité Jean-Paul II préoccupé par une « invasion islamiste » de l’Europe.
« Le pape m’a dit : « Fais part de ce que je te dis à tous ceux que tu rencontreras dans l’Église du troisième millénaire. Je vois l’Église frappée d’une blessure mortelle. Plus profonde, plus douloureuse que celles de ce millénaire (il faisait référence au totalitarisme communiste et au nazisme). Cela s’appelle l’islamisme. Ils envahiront l’Europe. J’ai vu leurs hordes arriver d’ouest en est », et il m’a parlé ensuite de chaque pays un par un : du Maroc à la Libye en passant par l’Egypte, et ainsi de suite jusqu’à l’est.
« Le pape a ajouté : « Ils envahiront l’Europe, l’Europe ne sera plus qu’un sous-sol pétri d’anciennes reliques, d’ombres et de toiles d’araignées. Les biens de famille. Vous, l’Église du troisième millénaire, devez contenir cette invasion. Pas avec des armées, car les armées seront insuffisantes, mais avec votre foi, avec votre vie vécue avec intégrité. »
La vision de Jean-Paul II ressuscite la campagne historique de l’islam contre les terres chrétiennes: « En 637, l’armée islamique s’empare de Jérusalem deux fois sainte, puis dans la foulée de tout le Proche-Orient, foyer historique du christianisme », écrit le romancier algérien Boualem Sansal. Il a ensuite décrit « l’irrésistible progression de l’islam vers l’ouest, l’Afrique du Nord judéo-chrétienne qu’il convertira séance tenante, l’Espagne très catholique qu’il annexera au début du VIIIe siècle, vers Byzance, qu’il prendra en 1453, vers Vienne, qu’il assiégera en 1529, avec le projet de fondre sur Rome et de soumettre l’Europe entière… ».
Le pape François doit maintenant faire face au risque potentiel d’un monde chrétien englouti physiquement par le croissant musulman – comme le montre le logo choisi par le Vatican pour le prochain voyage du pape au Maroc. Il serait temps que l’apaisement finisse.
Giulio Meotti, éditeur culturel à Il Foglio, est un journaliste et auteur italien.