Paracha ‘Hayé Sara – La nécessité de s’attacher à un rav«Mais bien d’aller dans mon pays et dans mon lieu natal chercher une épouse à mon fils, à Yits’hak » (Beréchit 24,4). Illustration : représentation du rav Abrabanel Rabbi Elazar Meizelich, président du tribunal rabbinique d’Ujhely (en Hongrie) m’a fait part d’une belle histoire, qu’il tenait de son père, rav d’Uhjely et auteur du Binyan David, qui l’avait entendue du protagoniste du récit. Dans la localité d’Uhjely vivait un ‘Hassid attaché au rav de la localité de Kamarna, rabbi Yaakov de Kamarna, et qui avait l’usage de se rendre chez lui pour s’y imprégner de Torah et de ‘Hassidout. Après la mort de son maître, il n’éprouva plus le besoin de se rendre à Kamarna auprès de son fils et remplaçant, rabbi Chalom qui était encore un jeune Avrekh, et notre homme n’avait plus de rabbi ni de guide spirituel. Quelque temps plus tard, son rav, rabbi Yaakov de Kamarna lui apparut en rêve et le réprimanda : « J’ai placé un fils à ma place et tu ne vas pas le voir ! » Mais l’homme estima qu’il s’agissait d’un rêve sans importance, et ne se rendit pas à Kamarna. Même lorsque son rabbi lui apparut une seconde fois en rêve, cela ne lui fit pas d’effet. Mais à sa troisième apparition, le rabbi s’adressa avec lui sur un ton sévère : « Pourquoi ne rends-tu pas visite au fils unique que j’ai laissé à ma place ? » C’est alors que le ‘Hassid se décida à entreprendre le voyage. Il se rendit à Kamarna, pour passer les Jours Redoutables auprès du nouveau rabbi, rabbi Chalom de Kamarna. Lorsqu’il entra dans la chambre privée du rabbi, celui-ci lui dit aussitôt : « Jusqu’à ce que mon père t’apparaisse trois fois en rêve et te prescrive de venir, tu ne pouvais pas venir ?!» On trouve d’autres récits de Tsadikim dans cette même veine : après leur mort, ils firent en sorte d’apparaître en rêve à leurs disciples, pour les inciter à se rendre auprès de leur fils et remplaçant. En effet, lorsqu’un Tsadik quitte ce monde, certains hommes d’envergure qui avaient l’habitude de le fréquenter, ont le sentiment qu’il n’est pas nécessaire de se rendre auprès de leur fils, et estiment savoir comment se conduire, ayant fréquenté de longues années leur défunt rabbi. Mais en vérité, le fils et remplaçant du rabbi a été initié par son père et connaît l’avis de la sainte Torah en tout lieu et en tout temps, il est doté d’aide divine, et sait guider les fidèles pour éviter qu’ils dévient du droit chemin. Certains soutiennent que les rabbanim et dirigeants spirituels de la génération ne sont pas aussi éminents que leurs prédécesseurs, et qu’ils n’ont pas de maître auprès de qui étudier et obtenir des conseils. Mais sachons que d’après nos Sages (‘Avoda Zara 5a), le Saint béni soit-Il montra à Adam Harichon chaque génération et ses maîtres. Les dirigeants de chaque génération sont choisis dans le Ciel, en fonction des besoins de celle-ci. Lors des époques passées où les hommes étaient dotés d’une stature spirituelle solide, avoir d’éminents dirigeants était une nécessité, tandis que ces dernières générations, ce qu’offrent les dirigeants spirituels de la génération est adapté aux besoins de leurs communautés. La vertu d’humilité est nécessaire à cet effet, et c’est l’une des conditions essentielles pour approfondir ses connaissances. En effet, l’humilité conduit l’homme à se soumette afin d’apprendre de chacun. Ce n’est pas le cas d’un homme fier, dont l’orgueil l’empêche de se rendre auprès des autres pour s’instruire, et lorsqu’il entend un homme avancer un argument solide, la fierté le pousse à ne pas admettre qu’il a une meilleure compréhension que lui. Nos Sages ont déclaré dans le traité Avoth (4,1) : « Quel est l’homme sage, celui qui apprend de tout homme », car un véritable sage doit être un homme dénué de fierté, qui peut apprendre de tout homme. La faute de mépriser les maîtres est extrêmement grave, car la pérennité du judaïsme dans chaque communauté juive dépend du pouvoir du rav de la communauté, et si on porte atteinte à son honneur, on finit par ne plus lui obéir, et cela peut entraîner un rejet du judaïsme. Ce phénomène a été observé à toutes les époques : lorsque dans certaines communautés, le respect porté aux rabbanim a été mis à mal, le judaïsme s’est perdu, et des hérétiques y grandirent. Il y eut aussi des cas de Juifs distingués émanant de communautés juives importantes, qui affichèrent du mépris envers leurs maîtres, et dans ce sillage, abandonnèrent la voie de la Tora et des Mitsvoth. De ce fait, le Rambam écrit dans son commentaire sur la Michna dans Avoth : « Fais-toi un rav. » Même si, en réalité, il n’est pas réellement digne d’être ton rav, il vaut la peine de le choisir à ce titre, car il est profitable pour chacun de se soumettre à un rav et guide. Nous observons cette conduite chez Eliézer, le serviteur d’Avraham. Nos Sages (Pirké de-rabbi Eliézer) s’expriment sur Eliézer, qui dirigeait toute la maisonnée d’Avraham Avinou. Lorsqu’il fit une faveur à Yits’hak en trouvant son épouse Rivka, Avraham le libéra, et D’ le récompensa en le faisant devenir roi de Bachan (il s’agit d’Og, roi de Bachan). Or, Og ne se soumit pas au règne du Tsadik Yits’hak Avinou, comme il s’était soumis à Avraham Avinou, car, doté de fierté, il eut le sentiment que ce n’était pas digne de lui. Au final, sa Emouna s’affaiblit jusqu’à ce qu’il devienne un mécréant absolu, et il partit en guerre contre Moché Rabbénou, puis fut tué et perdit tout. Or, Avraham Avinou avait essayé d’éviter ce scénario au préalable, et mis en garde Eliézer en en lui prodiguant des conseils : « Mais bien d’aller dans mon pays et dans mon lieu natal » : pars dans mon pays pour fréquenter mon fils, et « chercher » : va chercher « une épouse à mon fils, à Yits’hak » en étant comme une femme, c’est-à-dire un réceptacle, auprès de mon fils Yits’hak, qui exercera son influence sur toi. C’est une leçon pour toutes les époques : rattachons-nous constamment à un rav, et de cette façon, nous aurons accès à tous les bienfaits possibles. Chabbath chalom ! |