« Pour la tribu de Yossef formant celle de Menaché, Gadi, fils de Soussi.» (Bamidbar 13,11).
On raconte qu’un homme riche se fit un jour interviewer par un grand journal, et ils commencèrent par une question importante : « Comment vous êtes-vous enrichi ? »
L’homme aisé répondit : « Je vais vous révéler le déroulement des événements qui m’a mené à une telle richesse : dès mon jeune âge, j’ai fait du commerce avec de petits articles, puis je me suis occupé du commerce d’aiguilles, puis je suis passé à la vente de fruits au marché, et j’ai peu à peu augmenté mes sources de revenus, jusqu’à ce qu’au final, je décroche le premier prix de loterie de l’État. »
Cela nous semble ridicule, car rien ne rattache la vente de fruits au prix de la loterie, mais en vérité, la majorité des gens réfléchissent de cette manière, ils attribuent leur subsistance à diverses sources, alors que toute la parnassa provient du Ciel.
Un jour, le ‘Hafets ‘Haïm aperçut un cocher juif qui pleurait. Il l’interrogea sur la raison de ses pleurs. Le cocher répondit : « Le cheval qui me donnait ma parnassa est mort. » Le ‘Hafets ‘Haïm reprit : « Comme tu penses que c’est le cheval qui te fournit ta parnassa, alors il vaut la peine de pleurer. Mais lorsque tu intégreras l’idée que c’est Hachem qui te donne la parnassa, alors tu cesseras de pleurer.»
Les nations païennes admiraient les chevaux robustes, car ils jouaient à l’époque un rôle déterminant dans le commerce et la guerre. Ils avaient l’usage de décorer luxueusement des chevaux de guerre, au point que Knesset Israël est comparée, par sa beauté, à une armée de chevaux dans les chars de Pharaon (Chir Hachirim 1,9).
Les chevaux représentaient la part essentielle de la fierté des Égyptiens et de Pharaon, leur roi. Lorsque les enfants d’Israël résidaient en Égypte, ils furent influencés par cette Avoda zara (culte des idoles) et admiraient la force des chevaux. Mais Hachem fit sortir les Bené Israël d’Égypte, leur montra les traces des chevaux au moment de l’ouverture de la Mer des Joncs, et c’est à ce sujet que les Bené Israël entonnèrent le Cantique de la mer (Chémot 15,1) : « Chantons l’Éternel, Il est souverainement grand ; coursier et cavalier, Il les a lancés dans la mer.»
Ensuite, Hachem indiqua aux Bené Israël que s’ils veulent se nommer un roi, celui-ci devra être vigilant à ce sujet : « Il doit se garder d’entretenir beaucoup de chevaux, et ne pas ramener le peuple en Égypte pour en augmenter le nombre » (Devarim 17,16). Les commentateurs (Kli Yakar notamment) expliquent que la raison essentielle de cet interdit de se rendre en Égypte pour acheter des chevaux de guerre vendus sur place, tient au fait que l’abondance de chevaux élimine la confiance en Hachem ; le fait d’en posséder beaucoup est en effet une indication que nous plaçons toute notre confiance dans les chevaux, et il nous incombe de veiller à ne pas revenir à la culture égyptienne.
Nous avons vu à plusieurs reprises dans le Tanakh que les rois d’Israël nous enseignent à ne pas nous fier à la force des chevaux de guerre qui étaient alors comparables à des armes de guerre avancés à notre époque. Le roi David affirme dans Tehilim (33,16-17) : « Le coursier est d’un vain secours pour triompher, et sa grande vigueur n’assure pas le salut. » Il écrit également sur place (20,8) : « Que les uns se fient aux chars, les autres aux chevaux, nous nous réclamons, nous, du nom de l’Éternel, notre D’. » Le roi Chelomo écrit également dans le Livre de Michlé (21,31) : « On équipe le cheval pour le jour du combat, mais c’est l’Éternel qui est maître de la victoire. »
On relate à ce sujet qu’un jour, des Maskilim organisèrent à Brisk un spectacle humiliant où était dépeinte une guerre selon la Tora. La représentation s’appuyait sur un épisode de la paracha de Choftim, sur les hommes exemptés de participer à la guerre du Klal Israël.
Plusieurs centaines d’hommes déguisés en soldats montèrent sur scène. Le présentateur se leva et fit une annonce : « Quel est l’homme qui a bâti une nouvelle maison et ne l’a pas inaugurée se lèvera et rentrera chez lui. » Aussitôt, une grande partie des soldats quitta la scène. Le présentateur revint sur scène et annonça : « Qui a planté une vigne et n’en a pas encore acquis la jouissance qu’il parte et s’en retourne chez lui. » Une partie des soldats partirent. Le présentateur poursuivit son annonce : « Et si quelqu’un a promis mariage à une femme et ne l’a pas encore épousée, qu’il parte et s’en retourne chez lui. » Un nouveau groupe de soldats quitta la scène.
Et la dernière annonce du présentateur retentit : « S’il est un homme qui ait peur et dont le cœur soit lâche, qu’il se retire et retourne chez lui. » Le dernier groupe des soldats se leva et quitta la scène, et il ne resta que deux hommes, l’un avec la physionomie de l’auteur du Cha’agat Arié, et le second, qui incarnait le Gaon de Vilna, tous deux penchés sur leur canne et une Guemara en main.
Lorsqu’on en fit part à rabbi ‘Haïm de Brisk, il répondit : « C’est exactement ce à quoi ressemble la guerre selon la Tora, mais les acteurs ont oublié de jouer la fin, la partie essentielle : ces Gueonim ont gagné la guerre. »
Ainsi, dans le Da’at Zékénim, les Tossefoth (sur Béréchit 14,14) expliquent que lorsqu’Avraham Avinou partit en guerre contre les quatre rois, il dit à ses serviteurs : « S’il est un homme qui ait peur des fautes, qu’il se retire et retourne chez lui » ; en entendant cette annonce, ils repartirent chez eux, et il ne resta qu’Eliézer, le serviteur d’Avraham ; Hachem les aida à vaincre la guerre.
Les ouvrages sacrés expliquent que lorsque Moché Rabbénou s’adressa aux Bené Israël au moment où ils voulurent envoyer des espions pour observer les avantages d’Erets Israël et les manières de la conquérir, il agrémenta ses propos, d’Émouna, indispensable à cette période où ils s’apprêtaient à entrer en Erets Israël.
Ainsi, à l’approche de la guerre et du début du commerce en Erets Israël, il voulut faire allusion à la nécessité impérieuse d’oublier la perspective égyptienne de la vie, et c’est dans cet esprit qu’il s’exprima : « Pour la tribu de Joseph formant celle de Menaché » : vous devez vous forcer à oublier le mode de vie égyptien, que chaque Égyptien se répétait : « Gadi, fils de Soussi (cheval) » : mon Mazal est dépendant de mon cheval. Or il faut retenir que tout émane du Ciel !
Chabbath Chalom !