Puis, Abraham courut au troupeau, choisit un veau tendre et gras et le donna au serviteur (Beréchit 18,7)
Depuis la naissance dans les pays européens de la culture démocratique et diplomatique, prégnante de nos jours dans la majorité du monde, le mauvais penchant s’évertue à pousser les Juifs à s’émerveiller de la bonté des gouvernements non-juifs, à se rapprocher d’eux, et à s’inspirer de leur modèle d’éducation, s’éloignant ainsi des Tsadikim de la génération, les authentiques dirigeants spirituels du peuple juif qui inculquent les véritables traits de caractère positifs.
Mais en les observant de plus près, on remarque que les présidents et les ministres des nations sont épris de vengeance et d’autres mauvais traits de caractère. Certains le découvrent et d’autres tentent de cacher cette réalité.
Ce n’est pas le cas des dirigeants spirituels du peuple d’Israël, qui pardonnent les offenses subies et acquièrent tous les bons traits de caractère. De ce fait, nos Sages ont dit (Berakhoth 9b) qu’il est profitable pour l’homme d’observer les dirigeants des nations : il pourra ainsi faire la distinction entre les dirigeants juifs et ceux des nations.
À ce sujet, nos Sages (Baba Bathra 10b) ont commenté ainsi ce verset (Michlé/Proverbes 14,34) : « La justice grandit une nation » : le peuple d’Israël surpasse les autres nations dans son accomplissement de la Mitsva de Tsedaka véritable, sans aucun intérêt personnel.
En effet, si l’on observe attentivement les actions de bonté générales réalisées dans le monde, le but du bienfaiteur n’est généralement pas de prodiguer du bien aux autres, mais plutôt à lui-même, il désire essentiellement se placer au-dessus des autres et jouir du prestige de sa position. Tout comme on est prêt à débourser beaucoup d’argent pour le plaisir de la nourriture, ou à acquérir de beaux vêtements pour le plaisir d’être honoré, ainsi, on est prêt à investir pour être couvert de l’honneur qui revient aux auteurs de telles actions.
En effet, l’une des différences que l’on relève entre la bonté des nations et le peuple fidèle à la Tora est le don anonyme. Celui qui distribue des dons uniquement pour être honoré fera le maximum pour médiatiser sa générosité, afin d’accroître son prestige, et ne fera aucun don en discrétion. Mais celui qui fait des dons pour la Mitsva, et non dans le but d’être récompensé, donne également dans le plus grand secret.
Outre le plaisir des honneurs, certains font souvent des actes de ‘Hessed afin de pouvoir bénéficier de faveurs en échange. Des donateurs peuvent parfois offrir d’immenses sommes à la société, à un parti ou à leur pays, mais refuser de donner à ceux qui ne font pas partie de leur cercle et causent souvent des ennuis à leurs détracteurs.
Dans la paracha de Chemini, nous voyons que l’une des volailles impures et interdite à la consommation est la ‘Hassida (cigogne). Nos Sages affirment (‘Houlin 63a) qu’elle se nomme ‘hassida (pieuse), du fait qu’elle fait preuve de ‘Hassidout (piété) avec ses compagnes. Mais certains ont objecté : si elle est dotée d’un si bon trait de caractère, pourquoi est-elle une volaille impure et non pure ? Le rabbi de Rouzine explique que la nature de cette volaille est de faire uniquement du bien avec ses pairs, mais elle piétine et tue les volailles d’une autre famille, d’où son impureté.
Ce n’est pas le cas des Juifs qui s’élèvent par l’étude de la Tora, qualifiée de Torath ‘Hessed, une Tora de bonté : ils aident également les invités étrangers issus de pays éloignés ou les hôtes de passage ; c’est un véritable ‘Hessed qui n’attend rien en retour.
Nous avons observé cette conduite chez les grands Tsadikim de toutes les générations, qui envoyaient de fabuleuses sommes d’argent à la Tsedaka, même à de parfaits inconnus, dans la plus grande discrétion.
J’entendis un jour le rav Aharon Rothman relater l’enterrement du rabbi Ya’akov de Kamarna. Son gendre, auteur du Min’hath Eliézer de Munkatch, évoqua la réputation de richesse de son beau-père. C’est la vérité, confirma-t-il, mais uniquement dans le Monde à venir. En effet, on connaissait ses revenus, mais pas ses dépenses. Lorsqu’ils ouvrirent la boîte contenant l’argent, en pensant y découvrir de grandes sommes, ils y trouvèrent uniquement un petit papier où il était écrit : « Je dois quatre cents dollars à untel, merci de le payer. »
De surcroît, les Tsadikim se souciaient même du bien-être de leurs détracteurs, comme l’affirment nos Sages (Baba Metsia 32b) : il existe une Mitsva particulière d’aider nos ennemis, afin de faire fléchir notre mauvais penchant qui nous incite à éviter de leur porter assistance.
Nous voyons ici l’accueil des invités pratiqué par Avraham avinou : « Puis, Abraham courut au troupeau, choisit un veau tendre et gras et le donna au serviteur. » Rachi explique qu’il donna la viande à son fils Yichma’ël afin qu’il la prépare pour les invités « afin de l’initier aux Mitsvoth. » Or, c’était difficile pour lui, il était alors au troisième jour après sa circoncision. Dans ce cas, pourquoi choisit-il de lui imposer cette tâche à ce moment précis et de l’initier à la Mitsva d’accueil des invités ? Il aurait pu l’initier à cette Mitsva un autre jour, lorsqu’un grand nombre d’invités affluait.
En vérité, Avraham désira exploiter cette occasion pour éduquer son fils à manifester de la bienveillance dans une situation où il prodiguait sa générosité en secret. En effet, du fait de la grande chaleur qui régnait ce jour-là, personne ne serait témoin de la bonté dont bénéficierait ces invités, des étrangers qui se présentaient comme des arabes, venus de loin et passant là au hasard, dont il n’espérait recevoir aucune faveur à l’avenir. Ces deux points font la différence d’approche face au don entre le peuple d’Israël et les nations.
Il vaut la peine d’éduquer nos enfants dans cette voie, en évitant de s’émerveiller des bontés des nations, mais il convient de se renforcer dans l’étude et l’accomplissement des Mitsvot de la Tora qui sont des voies de délices, et de multiplier les initiatives de ‘Hessed authentique.
Chabbath Chalom !