«Construisez donc des villes pour vos enfants et des enclos pour vos brebis, et soyez fidèles à votre parole » (Bamidbar 32,24).
Nous trouvons dans la Guemara (Soucca 46b) une mise en garde de nos Sages à propos des lois du langage. Par exemple, un homme ne dira pas à un jeune enfant : «Je vais te donner un cadeau», puis ne tient pas sa promesse, car l’enfant apprendra de là à mentir.
Tentons de comprendre pourquoi nos Sages nous ont lancé une mise en garde particulière d’éviter le mensonge avec les enfants. En effet, nombreux sont ceux qui, dans leur profession, ne mentent pas, mais lorsque leurs enfants leur posent une question, ils répondent instinctivement ce qui leur passe par l’esprit, même si c’est contraire à la vérité, et ne considèrent pas ces propos comme du mensonge. Ils font des promesses sans les tenir, car ils ne jugent pas à leur juste valeur les propos adressés à un enfant. Or l’enfant, lorsqu’il constate que c’est du mensonge, et que son père ne tient pas ses promesses, s’habitue à penser que le mensonge est autorisé, que D’ nous en préserve, et qu’il n’est pas nécessaire de tenir sa parole, et cette habitude devient ancrée en lui lorsqu’il grandit.
Cette attitude peut détruire toute l’éducation que l’on investit dans les enfants, et les entrainer à déchoir et à s’éloigner de Hachem, comme l’indique un élève du Ba’al Chem Tov (Menorath Zahav Michpatim) sur le verset (Chemot 23,7) : « Fuis la parole du mensonge» : par le mensonge – tu t’éloignes de Hachem, que D’ préserve.
Même si on inscrit ses enfants dans les meilleurs établissements scolaires et qu’on leur impose des règles pour éviter qu’ils ne fautent, dans la réalité, il est difficile de les surveiller constamment, et si l’enfant s’habitue à mentir, il peut commencer à commettre des actes indignes en secret. Lorsque le père l’interroge ensuite à ce sujet, il ment, à l’image d’Essav le mécréant, l’homme des champs qui fit usage constant du mensonge, et se fit passer devant son père, Yits’hak Avinou, pour un homme inoffensif, qui vit sous la tente (et étudie la Tora). Même par la suite, lorsque le père remarque les méfaits de son enfant, il est devenu très difficile de détourner l’enfant des convoitises dans lesquelles il est plongé, et la conduite du fils se dégrade de plus en plus dans la sphère spirituelle et matérielle, avec ces mensonges qui compliquent et détruisent sa vie.
Ce n’est pas le cas d’un enfant à qui l’on apprend à dire toujours la vérité, même lorsque c’est difficile. Lorsqu’un tel enfant est confronté à une épreuve, il s’abstient de commettre du mal, de peur qu’on l’interroge par la suite à ce sujet et qu’il soit contraint de dire la vérité. Ainsi, le Séfer ‘Hassidim fait le récit d’un mécréant qui dit un jour à un homme sage : si vous m’enseignez un élément de Techouva, je m’y plierai, même si c’est très difficile. L’homme sage lui recommanda de s’abstenir de mensonge et notre homme s’y engagea. Lorsqu’il voulut voler ou commettre un autre méfait, il se dit à chaque fois que si on l’interrogeait, il serait contraint de révéler la vérité, et de ce fait, il s’en abstint et de cette façon, opéra un repentir complet.
Aussi, l’homme doit s’habituer, et habituer ses enfants, à fuir le mensonge, même si pour les nations, le mensonge n’est pas condamnable et ne nuit pas aux autres. En effet, pour le peuple juif, il existe une Mitsva de la Tora de s’éloigner de toute parole mensongère ; aussi, il convient de s’en éloigner de la même manière que l’on évite de manger des aliments interdits.
Un jour, le Juif kadoch de Psichis’ha demanda à son élève, rabbi Bounam de Psichis’ha et à ses amis, de se mettre en route, sans leur préciser de destination. Les ‘Hassidim prirent la route et parvinrent à une auberge. Le propriétaire de l’auberge voulut leur préparer un repas, mais ils commencèrent à lui poser d’innombrables questions sur chaque aliment, sur l’identité de l’abatteur rituel de la viande, si elle avait été salée convenablement, etc. On entendit soudain la voix d’un homme vêtu de guenilles qui se trouvait derrière le four et cria à leur encontre : « ‘Hassidim, ‘Hassidim, pour ce qui a trait à ce que vous mettez dans la bouche, vous posez mille questions, mais pourquoi n’êtes-vous pas aussi vigilants pour les propos qui sortent de votre bouche ?! » Les ‘Hassidim comprirent que leur rabbi les avait envoyés ici afin qu’ils entendent ces propos de Moussar (éthique juive), et ils rentrèrent chez eux avec une meilleure perspective sur la vigilance à exercer dans le domaine de la vérité.
Nous pouvons appliquer cet enseignement à propos de notre paracha sur les tribus de Gad et Reouven. Ceux-ci demandèrent à rester au-delà du Jourdain oriental, un lieu vaste et favorable à leur troupeau, du fait qu’ils étaient très riches et propriétaires de nombreux troupeaux. Ils s’adressèrent à Moché Rabbénou pour s’excuser de leur désir de demeurer en-dehors d’Erets Israël. Ils y étaient obligés du fait de leur préoccupation pour leurs nombreux biens. Ils promettaient néanmoins de ne compromette nullement l’éducation de leurs enfants en-dehors de la terre d’Israël.
Voici les propos du verset : «Alors ils s’approchèrent de Moché et dirent : « Nous voulons construire ici des enclos pour notre bétail » : nous investirons dans la construction de grandes Yechivoth saintes pour notre «bétail», les jeunes gens, qui sont qualifiés de troupeau sacré, pour les éduquer tous dans la Tora et la sainteté, et ils seront protégés par des barrières qui leur éviteront de se rendre dans des endroits inconvenants, « et des villes pour nos enfants » : nous construirons dans chaque ville des écoles spéciales qui initient les enfants trop jeunes pour étudier ailleurs, à la Tora et aux Mitsvoth. » »
Moché Rabbénou y consentit : « Construisez donc des villes pour vos enfants et des enclos pour vos brebis » : il répéta leurs propos en y ajoutant une condition, sans laquelle l’éducation reçue par les enfants dans les Yechivoth et les écoles, ne sera pas efficace, « et soyez fidèles à votre parole » : soyez très vigilants sur la vérité et tenez vos promesses, car c’est le seul moyen de réussir dans l’éducation de vos enfants, et de vaincre vos ennemis et opposants, avec l’aide de D’. »
Chabbath Chalom !