« Toute la communauté s’approcha, et se tint debout devant l’Éternel. Moché dit : « Ceci est la chose qu’a ordonnée l’Éternel ; accomplissez-la, pour que vous apparaisse la gloire de Hachem » » (Vayikra 9,5-6). Au mois de Nissan de l’année 5716 (1956), la situation était tendue en Erets Israël. Le peuple craignait une guerre qui serait déclenchée par les pays arabes contre les Juifs résidant en Erets Israël. À cette époque, je reçus une lettre de mon ami, le rav Moché Sheinart zatsal, qui étudiait alors à la Yechiva de Belz en Israël, où il me fit part d’un débat qui divisait alors les grands hommes de la génération, pour déterminer s’il convenait de prier pour obtenir un accord de paix par le biais des nations. Le rabbi de Gour, auteur du Beth Israël, rendit visite à mon maître et rav, rabbi Aharon de Belz, et ce dernier lui demanda des nouvelles de la situation, s’il y avait des progrès dans les pourparlers de paix proposés par les États-Unis et l’Angleterre, afin d’éviter une guerre. L’Admour de Gour répondit en citant un texte des Écritures (Michlé 14,34) : « ‘Hessed leoumim ‘hatat », la bonté des peuples est une faute : il estimait qu’il est préférable d’éviter le soutien des nations pour parvenir à la paix. En effet, la bonté qu’elles prodiguent ne vise que leur propre intérêt. Mais le rabbi de Belz répondit alors au rabbi de Gour dans les termes suivants : « Malgré tout, mon père et maître affirmait que le Machia’h viendra dans une ère de paix. » Le rabbi estimait qu’il convenait de prier pour ces pourparlers de paix, même s’ils étaient réalisés par le biais des nations. Il suivait ainsi la tradition de son père, rabbi de Yissakhar Dov de Belz, stipulant que le Machia’h ne pourra venir que lorsque la paix règnera dans le monde. L’essentiel est de parvenir à la paix, pour hâter la venue du Machia’h. Cette idée est également endossée par d’autres Tsadikim, comme le Ba’al Chem Tov et rabbi Elimélekh de Lizensk : par le mérite de la prière des Tsadikim, on œuvre dans le Ciel pour éviter les effusions de sang à l’époque de la venue du Machia’h, qui viendra subitement, presque par inadvertance, à un moment de paix. Ces hommes pieux sont également d’avis que la grande guerre qui doit advenir avant la venue du Machia’h a déjà eu lieu et qu’il n’y en aura pas d’autre. Retenons qu’il est du pouvoir de chacun d’entre nous d’œuvrer pour instaurer la paix entre les peuples en consolidant la paix entre Juifs. La paix parmi ceux qui craignent D’ influe sur la paix dans le monde entier, comme l’affirment nos Sages (Avoth derabbi Nathan, chap. 48) : « Les Talmidé ‘Hakhamim renforcent la paix dans le monde. » Par le biais de la sainte Tora que nous étudions, nous pouvons bannir le défaut de la jalousie, de la convoitise et de la recherche des honneurs, qui sont le socle de toutes les controverses et guerres dans le monde. En adoptant une conduite de paix et d’union, nous purifions quelque peu l’air du monde, pollué par les défauts de corruption, et entraînons les nations à faire la paix entre elles. La Guemara (Berakhot 16b) nous enseigne que rav Safra priait chaque jour pour deux choses en même temps : pour la paix parmi ceux qui étudient la Tora, et pour éviter la guerre entre les peuples. En effet, l’un dépend de l’autre. La prédominance de la paix au sein du peuple juif est une grande segoula pour faire venir le Machia’h, comme l’indique le Midrach Rabba sur le verset (Beréchith 49,1) : « Ya’akov fit venir ses fils et il dit : ‘Rassemblez-vous, je veux vous révéler ce qui vous arrivera dans la suite des jours’. » Ya’akov Avinou prescrivit aux enfants d’Israël, à l’approche de la fin des temps, de s’évertuer à se rassembler dans l’unité et à s’éloigner des controverses, et par ce mérite, ils bénéficieront de la Gueoula. De grands Tsadikim se sont exprimés sur la raison de la longueur de l’exil, qu’ils attribuent aux controverses. Dans l’ouvrage Toldoth Ya’akov Yossef (parachath Tsav, 2), l’auteur explique un passage de la Hagada de Pessa’h : « Ma nichatana halaïla hazé mikol haléïloth » (en quoi cette soirée diffère-t-elle des autres ?). Cette question visait ceci : en quoi ce sombre exil qui dure plus que tous les autres exils est-il différent ? Et de répondre : « Halaïla hazé koulo matsa » (Cette soirée, on ne consomme que de la matsa), la matsa peut signifier également la Makhloket, la dospute, comme il est dit (Chemoth 21,22) : « Si, des hommes ayant une rixe », l’idée est que durant cet exil, les controverses sont présentes dans chaque ville, et c’est la raison du retard de la Gueoula. Un ‘Hassid vit un jour le rabbi et auteur du Ahavath Israël de Vijnitz prendre dans ses bras un homme très éloigné qu’il tentait de rapprocher de la Tora. Il demanda ensuite au rabbi pourquoi il déployait tant d’efforts pour rapprocher un homme tel que lui. Le rav lui répondit : « Le Temple fut détruit en raison de la faute de la haine gratuite, et pour rectifier cette faute, il faut faire appel à l’Ahavat ‘Hinam, l’amour gratuit. Par ce mérite, nous bénéficierons de la Gueoula et de la construction du Temple. » De même, rabbi Elimélekh de Lizensk explique que lorsque les hommes animés de crainte du Ciel sauront réunir les Juifs et feront la paix entre eux, la Gueoula adviendra dans ce sillage et le prophète Eliyahou annoncera de bonnes nouvelles. Nous y trouvons une allusion dans ce verset (Yechayahou 52,7) : « Qu’ils sont gracieux sur les montagnes les pieds du messager qui annonce la paix, du messager de bonnes nouvelles, qui annonce la délivrance » : au début, on entendra une voix de paix, puis on entendra la nouvelle de la délivrance globale. Nous y trouvons également une allusion dans notre verset à propos de la génération du savoir qui se trouvait dans le désert : « Toute la communauté s’approcha, et se tint debout devant l’Éternel » : rapprochez-vous et restez ensemble, dans la paix et l’union. Puis Moché leur transmit un conseil avisé pour les époques suivantes : « Ceci est la chose qu’a ordonnée l’Éternel » : la paix que vous avez instaurée entre vous, conformément à la volonté de notre Père céleste, « accomplissez-la» : accomplissez-la à la fin des temps, et par ce mérite : « pour que vous apparaisse la gloire de Hachem » : vous aurez le privilège d’assister au dévoilement de la gloire divine par la venue du Machia’h, bientôt et de nos jours, Amen. Chababth Chalom ! |