« Recueillez chacun selon ses besoins (…), autant chacun a de personnes dans sa tente, autant vous en prendrez » (Chemoth 16,16)
On raconte qu’un jour, le Ibn Ezra était accueilli au domicile d’un homme avare, et la veille du Chabbath, cet homme rentra chez lui avec un poisson qu’il avait acheté au marché en l’honneur du Chabbath. Le Ibn Ezra sentit une odeur bizarre qui sortait du poisson et il comprit que son hôte avant choisi un poisson de qualité inférieure dans le but de réduire les dépenses. Le Ibn Ezra s’approcha du poisson et murmura quelque chose. L’hôte, étonné, l’interrogea sur le sens de son geste, et se demanda s’il ne jetait pas un sort en murmurant au poisson.
Le Ibn Ezra lui répondit : « J’écris un commentaire sur la Tora, et je voulais savoir comment s’était déroulée précisément l’ouverture de la Mer des Joncs. De ce fait, en voyant ce poisson très ancien, je lui ai demandé s’il datait de cette période et s’il pouvait me faire le récit de l’ouverture de la Mer des Joncs… » L’hôte saisit l’humour et rit, et l’Ibn Ezra saisit l’occasion pour donner une leçon essentielle : on n’économise pas un centime en réduisant les dépenses du Chabbath. En effet, l’homme est remboursé jusqu’au dernier centime toutes ses dépenses en l’honneur du Chabbath, comme l’indiquent nos Maîtres (Bétsa 16a) : « Toutes les dépenses de l’homme sont fixées à Roch Hachana, à l’exception des frais du Chabbath et du Yom Tov.
Si l’homme dépense avec avarice, son revenu est diminué, mais en revanche, s’il dépense avec largesse, ses revenus sont augmentés. On raconte également à ce sujet que rabbi Mordekhaï de Rakov zatsal rapporta un jour à son maître, le ‘Hozé de Lublin, des propos qu’il avait entendus dans un rêve la nuit précédente, émanant du tribunal céleste. Voici ce qu’il dit : « Je comparus devant le tribunal céleste et je leur exposai ceci : « L’argent des dépenses en l’honneur du Chabbath est conféré du Ciel à l’homme. » Dans ce cas, pourquoi attend-on dans le Ciel et met-on à ma disposition l’argent qui m’est destiné pour les dépenses du Chabbath uniquement la veille du Chabbath, lorsque tous les produits sont très chers ? Je suis alors tenu de réduire les quantités. Or, si on me procurait l’argent dès le jeudi, lorsque les produits sont plus abordables au marché, je pourrais acheter plus généreusement, sans devoir réduire les quantités ? » Voici la réponse du tribunal céleste : « Du Ciel, on désire que tu transpires et que tu te donnes de la peine en l’honneur du Chabbath, et de ce fait, on ne t’envoie l’argent que la veille du Chabbath. Tu es alors tenu de courir au marché et de te frayer un chemin parmi les stands à un moment de tension. Lorsque tu argumentes que tu dois réduire les dépenses du Chabbath en raison de leur prix élevé, il est pourtant écrit : « À Moi l’argent et à Moi, l’or, dit Hachem des armées », il n’y a aucune raison de faire des économies sur les dépenses du Chabbath qui sont prises en charge par D’, qui dispose de suffisamment de ressources pour te rembourser, que tu dépenses peu ou beaucoup. » La promesse divine : « Si l’homme dépense généreusement, son revenu est augmenté » s’applique également aux dépenses d’un Juif en faveur du Chabbath des autres, lorsqu’il convie des invités à sa table ou envoie des plats de Chabbath à des démunis, comme l’indique le Prophète (Né’hamia 8,10) :« Allez, mangez des mets succulents, buvez des breuvages doux et envoyez-en des portions à ceux qui n’ont rien d’apprêté, car ce jour est consacré à notre D’. Ne vous attristez donc pas, car la joie en l’Éternel est votre force. »
Nos Sages (Bétsa 15b) expliquent que les Chabbatoth et les jours de fête sont des périodes de joie pour Hachem, il est même permis d’emprunter de l’argent pour rehausser ses repas ou pour envoyer des mets à des pauvres.
En effet, D’ promet au peuple juif : « Mes enfants, empruntez sur Mon compte et faites-Moi confiance, Je rembourserai. » On raconte que rabbi Chelomo de Zvill avait trois filles en âge de se marier. Il avait économisé des fonds pour leur donner une dot. Mais il fit ensuite un calcul relatif aux dépenses du Chabbath. Il est dit : « Si l’homme dépense généreusement, son revenu est augmenté », alors pourquoi ne pas faire de larges dépenses en l’honneur du Chabbath et inviter plusieurs pauvres à sa table ? C’est ce qu’il fit. Il bénéficia alors d’une aide divine exceptionnelle, et du Ciel, on lui envoya suffisamment d’argent pour marier toutes ses filles. Hachem illustra aux Bené Israël ce concept à travers la manne qui descendait dans le désert chaque veille de Chabbath.
Chaque matin, chaque Juif recevait un ‘ômer de manne, correspondant à deux repas normaux, l’un le matin et le second, le soir. Le vendredi matin, il recevait deux ‘ômer. Même si le Chabbath, l’homme a l’usage de manger plus qu’en semaine, comme les plats sont délicieux et qu’il est doté d’une Nechama Yetéra (supplément d’âme) ce jour-là, et qu’il mange aussi le repas de Melavé Malka, malgré tout, la quantité de 2 ‘ômer était suffisante pour 5 repas.
Un miracle avait lieu le Chabbath : plus l’homme mangeait de manne, plus la quantité augmentait afin que cela lui suffise, comme l’indiquent les Richonim (Ramban et ‘Hizkouni). C’est à ce sujet que le passouk dit : « Recueillez chacun selon ses besoins » : vous recevrez du Ciel ce dont vous avez besoin en fonction de ce que vous mangez, « autant chacun a de personnes dans sa tente, autant vous en prendrez » : chacun recevra sa part en fonction de ceux qui mangent chez lui, y compris les invités.
Cette leçon s’applique à toutes les époques : même en période de difficultés économiques où l’usage est de réduire les dépenses, inutile de réduire les dépenses du Chabbath, ni pour soi, ni pour les autres, car on est intégralement remboursé du Ciel.
Chavoua tov !