Parachath Devarim/Ticha Béav
« Ce sont là les paroles que Moché adressa à tout Israël (…) et ‘Hatséroth » (Devarim 1,1)
Les polémiques dans le monde abondent à notre époque, comme l’explique la Guemara (Sanhédrin 87a) : avant la venue du Machia’h, le satan s’évertuera afin que des groupes d’hommes se conduisent comme des hordes d’animaux qui se querellent constamment ; les partisans de chaque groupe prétendront que leurs idées et leurs actions sont les seules valables, tandis que leurs opposants vivent forcément dans le mensonge et le mal.
Le facteur principal de ces querelles est l’orgueil, comme l’ont affirmé nos Sages (Sota 47b) : « Depuis que les hommes fiers abondent, les querelles se sont accrues au sein du peuple d’Israël. » L’homme arrogant estime que dans tous les domaines, il se trouve à un niveau plus élevé que les autres, et de ce fait, il tente d’invalider toutes les qualités présentes chez les autres et ne leur trouve que des défauts, attisant ainsi le feu de la querelle et induisant la haine gratuite.
Cette tendance se retrouve malheureusement également parmi des groupes de Juifs respectueux de la Tora et des Mitsvoth ; certains affirment en effet que la vérité ne se trouve que dans leur manière de pratiquer le judaïsme ou dans leur communauté, ainsi que dans leurs coutumes, tandis que tous les autres ont choisi une voie erronée. De tels hommes calomnient les autres communautés, les jugent de manière négative, voulant affirmer ainsi leur supériorité.
À ce sujet, le rav Ezra Grass m’a relaté qu’un jour, l’Admour et auteur du Beth Israël de Gour avait critiqué la médisance et les controverses, qui proviennent de l’orgueil et la jalousie, et certains faisaient l’erreur de dénigrer précisément les Juifs craignant D’. Il lui raconta un incident auquel il avait assisté. Il marchait un jour dans la rue derrière deux Avrékhim, qui appartenaient à une communauté dont le rav tenait particulièrement à juger favorablement tous les Juifs, même laïcs, mais ils ignoraient que le rabbi de Gour les suivait. Pendant toute la durée du trajet, il entendit qu’ils échangeaient des propos diffamatoires sur le rabbi de Gour et sur d’autres rabbanim et communautés, et chacun d’eux s’efforçait de leur trouver des défauts. Au final, un Juif laïc passa devant eux et l’un des Avrékhim formula à son compagnon une critique sur cet homme, et c’est alors seulement que son ami le réprimanda de suite : « N’es-tu pas au courant que le rav est pointilleux de ne pas dire de mal d’un Juif ?!»
Dans l’ouvrage Esser Krdouchoth, il est rapporté que mon saint ancêtre, rabbi Tsvi Hirsch de Ziditchov, affirma un jour pendant la se’ouda chlichit, que le fait de dire : « Il n’y a pas d’autre rabbi que le nôtre », constitue de l’Avoda Zara (culte des idoles). Il faudra dire : « Chaque rabbi est bon envers ses élèves – mais notre rabbi est plus adapté à nos affaires et à notre mission. »
Ce thème a été traité en profondeur par mon vénérable ancêtre, rabbi Tsvi Hirsch de Ziditchov dans son ouvrage, Sour méra’ ve’assé tov : le Klal Israël est comme un corps unique. Chaque corps humain est composé de 248 organes et 365 tendons, chacun d’entre eux a un rôle spécifique que les autres ne peuvent remplir, et aucun d’entre eux ne se sent supérieur aux autres. Il pourrait apparaître que certains organes sont plus importants que d’autres, mais en réalité, le corps a besoin de la totalité de ces organes. Et lorsqu’un organe est défaillant, le corps entier souffre, du fait que tous les organes sont reliés à une seule âme qui constitue l’essentiel de l’homme.
Le même principe est valable pour le Klal Israël : toutes les âmes du peuple juif sont reliées entre elles de manière spirituelle, comme si elles ne formaient qu’une seule entité. Nous remarquons que lorsqu’un Juif entend parler d’un autre Juif à l’autre bout du monde assassiné cruellement, que D’ préserve, il ressent une immense peine spirituelle, même sans le connaître. Chaque Juif doit mener à bien la mission particulière qui lui incombe dans ce monde, en fonction de sa situation, de son emplacement géographique, des talents qui lui ont été conférés du Ciel, et selon la tradition de ses ancêtres et de ses maîtres. Certains se consacrent davantage à l’étude de la Tora, d’autres se consacrent davantage à la prière, aux actes de bienfaisance, etc. D’ souhaite que chaque Juif œuvre selon sa nature et fasse sa part, et qu’ils fassent régner l’affection et la paix entre eux.
Nos Sages ont dit (Sota 5a) : lorsqu’un homme s’enorgueillit, profère de la médisance et crée des discordes, il chasse la sainte Présence divine de son lieu de résidence. D’après les ouvrages sacrés, les forces de l’impureté se logent alors à cet endroit, et apportent des épreuves et des maladies. Ainsi, mon illustre aïeul, rabbi Its’hak Eizik de Kamarna, a écrit au début de l’ouvrage Adam Yachar : les épidémies surviennent en conséquence de l’impureté de la médisance et de la haine gratuite qui proviennent de l’orgueil. De ce fait, en cas d’épidémie, il faut surtout se renforcer dans le domaine de l’humilité, de l’union et l’Ahavat Israël, l’amour de chaque Juif.
Ainsi, dans la Paracha de Kora’h : Kora’h et sa famille, ainsi qu’une partie de la tribu de Reouven, n’ont pu supporter, dans leur orgueil, que D’ accorde des rôles importants de direction à une famille et une seule tribu, et de ce fait, ils médirent et déclenchèrent une controverse. Les Tsadikim affirment que le lieu de la discorde de Kora’h se nomme ‘Hatséroth, du fait que Kora’h a entraîné la création de ‘Hatséroth (cours) différentes, l’inverse de la mitsva de ‘érouvé ‘hatséroth, qui unit les habitants de toutes les cours, comme s’ils habitaient tous dans une seule cour. En conséquence, une épidémie les frappa et ils quittèrent ce monde.
Nous voyons dans la Paracha du Metsora’ qu’un homme qui s’était vanté, avait tenu des propos calomnieux et entraîné une discorde, était atteint de plaies lépreuses et devenait impur. Il devait alors s’éloigner des hommes, évitant ainsi les discordes. Nos Sages l’expliquent (‘Erekhin 16b) : comme il a introduit la séparation entre l’homme et son prochain, la Tora lui impose de rester confiné. Une fois son orgueil brisé, grâce à cette période d’isolation et de maladie, et qu’il s’est repenti, la plaie lépreuse disparaît.
Rabbi Baroukh de Kassov évoque cette idée dans son ouvrage Amoud Ha’avoda : lorsque la haine gratuite s’était intensifiée à l’époque du Second Beth Hamikdach, D’ voulut réduire la haine et la discorde qui pouvaient entraîner une destruction totale du peuple juif, et de ce fait, Il nous dispersa entre les nations en exil, pour réduire ces dissensions qui régnaient lorsque tout le peuple d’Israël vivait ensemble en Erets Israël.
À la lumière de ces propos, nous pouvons expliquer le début de la Paracha de Devarim, lorsque Moché s’adressa à tout le peuple d’Israël avant leur entrée en Erets Israël, lorsqu’il leur mentionna la faute de la révolte de Kora’h et de sa faction qui se trouvait à ‘Hatséroth : cette faute n’avait pas été imputée à tout le peuple d’Israël et il ne devait pas les réprimander à ce sujet, mais il voulut mentionner ce que la conduite de Kora’h avait induit, afin qu’ils apprennent à s’éloigner de toute contestation, et puissent ainsi s’établir en paix en Erets Israël.
De ce fait, en cette période, alors que nous attendons et espérons la Gueoula, renforçons-nous afin d’intensifier la paix et ainsi, nous aurons droit à la Délivrance et à la Gueoula.
Chabbath Chalom !