Le grand capital contre les Juifs

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Qui finance le lobby propalestinien ? Enquête par Jeremy Stubbs

La complaisance qui entoure les manifestations antisémites sur les campus américains s’explique par un mot : l’argent ! Abreuvées de subventions venant de pays arabes, les universités ferment les yeux sur le militantisme de leurs étudiants. Et des philanthropes tels que Soros et les Rockefeller financent aussi bien le Parti démocrate que des lobbys « propalestiniens ».

Aux États-Unis, au cours des trois derniers mois, les campus universitaires et certaines institutions gouvernementales ont été le théâtre de nombreuses manifestations propalestiniennes accompagnées d’incitations à la haine, voire au génocide. Les actes d’agression et de vandalisme antisémites se sont multipliés dans les grandes villes. Et pour couronner le tout, le 5 décembre, les présidentes de trois des universités les plus prestigieuses, appelées à justifier devant le Congrès la tolérance apparente accordée à l’antisémitisme par leurs institutions, n’ont pu donner que des réponses évasives. Comment expliquer une telle dérive dans une démocratie occidentale ? La clé de l’énigme réside moins dans la puissance des idées que dans celle de l’argent. Car l’argent séduit les instances dirigeantes, comme il finance les activités des militants. Si les autorités ont souvent tardé à sanctionner leurs étudiants qui célébraient ouvertement les atrocités du Hamas, ce n’est pas sans lien avec les sommes faramineuses dont des pays arabes, le Qatar en tête, abreuvent les universités américaines depuis des années[1]. En revanche, toutes les actions prétendument antisionistes ont été organisées par des ONG qui, elles, sont arrosées par les dollars du grand capital philanthropique américain[2].

Un système financier complexe

L’argent qui finance ces ONG transite par un système complexe et opaque qui sert aussi à subventionner les ambitions électorales du Parti démocrate, ainsi que toutes les causes intersectionnelles à la mode. Le capital provient souvent des grands philanthropes de la gauche, comme le Rockefeller Brothers Fund ou les Open Society Foundations de George Soros. Mais les sommes circulent à travers d’autres organismes sans but lucratif qui jouent le rôle de « sponsor fiscal », apportant aux ONG bénéficiaires des avantages fiscaux et la possibilité de cacher l’identité de leurs donateurs.

Il existe deux grands spécialistes de ce qu’on appelle le « dark money » ou « argent anonyme ». Le groupe Tides, créé en 1976, gère deux fonds et une entreprise de lobbying. Il reçoit des sommes importantes des Rockfeller Brothers, mais surtout de Soros qui, entre 2020 et 2022, lui a donné presque 42 millions de dollars. Confirmant qu’on peut être capitaliste et très à gauche, Pierre Omidyar, le fondateur d’eBay, et Peter Buffett, fils de Warren, y ont également contribué. Arabella Advisors, créée en 2005 par Eric Kessler, un ancien de l’administration Clinton, gère cinq fonds différents. Entre 2020 et 2022, Soros lui a donné plus de 60 millions. En 2022, le groupe a levé 1,35 milliard de dollars.

Tout cet argent sert, entre autres choses, à irriguer un réseau dense d’organismes antisionistes dans les milieux universitaires et militants. Depuis 2005, un mouvement informel, « Boycott, Divestment and Sanctions » (BDS), dirigé par un Palestinian BDS National Committee composé de Palestiniens, inspire des actions pour appeler les universités américaines à boycotter Israël et à désinvestir dans les entreprises commerçant avec lui. Ces appels ont surtout pour objectif de maintenir la question palestinienne sur le devant de la scène. Sous l’égide du comité BDS – qui a été déclaré antisémite par le Parlement allemand en 2019 – des « Israeli Apartheid Weeks » sont organisées chaque année sur les campus pour dénoncer le sionisme. Le mouvement jouit du concours des plus de 200 branches de Students for Justice in Palestine (SJP) aux États-Unis et au Canada. Ce réseau s’est doté en 2010 d’un comité national dont le financement est facilité par un sponsor fiscal, la WESPAC Foundation. SJP a été interdit dans l’Etat de Floride en octobre 2023 et suspendu par l’université George Washington en novembre. L’organisme est aidé aussi par American Muslims for Palestine (AMP), fondé en 2006 par un des cofondateurs de SJP, Hatem Al-Bazian, professeur américano-palestinien à Berkeley. Une organisation sœur, Americans for Justice in Palestine, joue le rôle de sponsor fiscal et ses revenus en 2022 étaient de plus d’un million et demi de dollars. Les deux entités sont l’objet d’un procès concernant un adolescent tué par le Hamas qu’elles sont accusées d’avoir soutenu.

Une liste sans fin

Une autre ONG, Samidoun, créée en 2011 au Canada afin de mener campagne pour la libération des prisonniers palestiniens en Israël, est accusée d’être une couverture pour le Front populaire de libération de la Palestine (FPLP). Elle a été déclarée organisation terroriste en Israël en 2012 et interdite en Allemagne en octobre 2023. Son sponsor fiscal est Alliance for Global Justice (AGJ), un fonds alimenté par Tides et à qui Soros a donné 250 000 dollars en 2020. Ses revenus en 2020-2021 s’élevaient à plus de 56 millions de dollars. En plus de faire l’éloge des régimes de gauche autoritaires, AGJ est accusée de lever des fonds pour le collectif Palestine vaincra, l’organisme français à qui on reproche sa proximité avec le FPLP et que Gérald Darmanin a essayé en vain de dissoudre en 2022. En 2023, Arabella Advisors a judicieusement coupé ses liens avec AGJ. Deux groupes de Juifs antisionistes, Jewish Voice for Peace (JVP), fondée en 1996, et If Not Now, né en 2014, ont reçu des sommes importantes des Rockefeller et de Soros, et If Not Now de la part de Tideset d’Arabella Advisors. Cette liste pourrait se prolonger de manière fastidieuse. Pour boucler la boucle, terminons par l’exemple de l’US Campaign for Palestinian Rights, une coalition d’ONG placée sous la houlette d’un autre organisme, Education for a Just Peace in the Middle East. Ce dernier, qui a profité de la générosité des Rockefeller, est accusé de soutenir indirectement le Hamas. Elle est le sponsor fiscal du Palestinian BDS National Committee. Selon le fantasme traditionnel, les Juifs exploitent le capital pour manipuler le monde. Ici, les judéophobes l’exploitent à des fins antisémites.

On pourrait dire que les Juifs sont les victimes des protocoles des « sages antisionistes ».

[1]. Armin Rosen, « What Yale Has in Common with Hamas », Tablet Magazine, 29 nov. 2023 ; Bari Weiss, « Is Campus Rage Fueled by Middle Eastern Money? », The Free Press, 12 déc. 2023.

[2]. Sources : les sites du Rockefeller Brothers Fund et des Open Society Foundations, InfluenceWatch, ProPublica, The Washington Beacon, The Washington Examiner.

Article extrait du Magazine Causeur

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