Le duel entre Netanyahou et le chef du Shin Bet

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Crise au sommet israélien

Un conflit d’une rare intensité secoue les plus hautes sphères du pouvoir israélien. Ronen Bar, directeur du Shin Bet – l’agence israélienne de sécurité intérieure – a dénoncé dans une lettre officielle le comportement du Premier ministre Benjamin Netanyahou, l’accusant de compromettre la sécurité nationale et de faire obstacle à une enquête sensible, surnommée le « Qatargate ».

Dans ce courrier, adressé au cabinet israélien alors qu’il s’apprêtait à voter sur sa révocation, Bar affirme que son limogeage soudain ne repose sur aucune base légitime, mais serait motivé par des intérêts politiques personnels. Il met en garde contre les conséquences d’une telle décision, affirmant qu’elle menace directement la sécurité de l’État en entravant des investigations cruciales.

« Entraver ces enquêtes vitales pour des motifs personnels ou institutionnels constitue une mise en danger claire de la sécurité nationale », écrit-il dans sa lettre, ajoutant que son éviction semble faire partie d’un processus biaisé et précipité.

Le Qatargate au cœur des tensions
L’affaire dite du Qatargate, encore peu détaillée publiquement, semble être un point de friction majeur entre les deux hommes. Ronen Bar insiste sur le fait que la poursuite de cette enquête est un devoir public fondamental, qu’il s’est engagé à mener à bien. Il déplore que son limogeage soit utilisé pour freiner cette procédure.

Mais les tensions ne se limitent pas à ce seul dossier. Le chef du Shin Bet a aussi critiqué la manière dont le Premier ministre a géré les pourparlers sur la libération des otages toujours retenus dans la bande de Gaza. Il révèle que Netanyahou a volontairement écarté Bar ainsi que le chef du Mossad, David Barnea, de la direction des négociations, ce qui, selon lui, a nui à leur efficacité.

Selon Bar, les termes de l’accord de libération envisagé répondaient aux exigences fixées par Netanyahou lui-même, et rien ne justifiait leur retrait de la table des discussions – sauf à penser, écrit-il, que « l’objectif réel était de négocier sans aboutir à un accord ».

Netanyahou contre-attaque : « Bar a failli le 7 octobre »
Face à ces accusations, la réaction du Premier ministre ne s’est pas fait attendre. Par l’intermédiaire de son porte-parole Omer Dostri, Netanyahou a directement mis en cause Ronen Bar dans les événements tragiques du 7 octobre, lorsque le Hamas a lancé une attaque surprise contre Israël.

« Si Ronen Bar avait exercé son rôle comme il le fait aujourd’hui, l’attaque du 7 octobre aurait pu être évitée », a déclaré Dostri, accusant Bar d’avoir ignoré des signaux d’alerte plusieurs heures avant l’assaut, sans même en informer le Premier ministre.

Selon lui, Bar aurait dû, comme d’autres responsables sécuritaires, démissionner à la suite de cet échec. Il ajoute que le chef du Shin Bet s’accroche à son poste pour instrumentaliser sa fonction à des fins politiques, notamment en exploitant la souffrance des familles des otages.

Netanyahou affirme également que le gouvernement a perdu toute confiance en Ronen Bar, justifiant ainsi le vote de révocation soumis au cabinet.

Vives réactions de l’opposition
L’éviction du chef du Shin Bet a provoqué une onde de choc au sein de la classe politique israélienne. L’opposition parlementaire, dirigée par le député Yaïr Lapid, a annoncé son intention de saisir la Haute Cour de justice, dénonçant une décision injustifiée et politiquement motivée.

Lapid a fustigé le fait que ceux qui sont actuellement impliqués dans une affaire aussi grave que le Qatargate soient précisément ceux qui écartent les personnes chargées de les enquêter. Une critique également relayée par Benny Gantz, dirigeant du parti Unité nationale, qui a qualifié le vote de limogeage de « marque de Caïn » pour chaque ministre y ayant participé.

« Le chef du Shin Bet, pilier de notre sécurité intérieure, nous alerte avec gravité : la conduite du Premier ministre met en péril la sécurité d’Israël », a déclaré Gantz, exhortant l’ensemble des responsables politiques à prendre la mesure du danger que cela représente.

Un climat de crise, mais un enjeu central : la sécurité d’Israël
Au-delà des querelles politiques, cette affaire soulève une question essentielle : comment assurer la stabilité et la sécurité d’Israël dans un contexte régional de plus en plus volatile ? La priorité devrait rester la protection des citoyens et la libération des otages toujours retenus par des groupes terroristes dans Gaza.

En renforçant la transparence des institutions et en permettant aux agences de sécurité d’agir librement, Israël préservera son intégrité et sa résilience face aux menaces extérieures. Il est crucial que les considérations politiques ne prennent jamais le pas sur les impératifs de sécurité nationale. Dans cette optique, la coopération loyale entre les autorités politiques et les services de renseignement reste plus que jamais indispensable.

Jforum.fr

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