Depuis plusieurs décennies, la vie politique israélienne est marquée par la montée progressive de l’establishment judiciaire : Aharon Barak, alors président de la cour suprême, a fait avancer le pouvoir de cette instance, la faisant passer de ce qu’elle est de manière légitime, à savoir une cour devant résoudre des problèmes juridiques proprement dits, à un tribunal décidant des lois et des nominations dans le pays, prenant le dessus de la Knesset ! Cette dernière est élue, alors que la cour suprême ne l’est pas. La Knesset représente le peuple également dans ses diverses composantes, alors que les juges de cette instance émanent uniformément d’une école, celle du libéralisme et du post-sionisme le plus extrémiste.
A diverses reprises, des crises ont éclaté, quand cette instance suprême a dépassé par trop ses prérogatives, libérant des terroristes dangereux ou entravant toute action contre eux en particulier, mais aussi faisant tout pour diminuer l’importance de la pratique religieuse dans le pays. Voici 20 ans, un million (ou un peu moins) de personnes sont sorties dans la rue à Jérusalem pour manifester contre cette haute cour.
Récemment, Mendelblit, le conseiller juridique du gouvernement, pris dans la dynamique de cette instance (comme d’habitude, par quelques procès le menaçant), a joué le jeu de la haute cour et est intervenu de manière choquante dans le déroulement des événements politiques, et représente depuis lors le cheval de Troie dans l’enceinte de la vie politique.
Arrivons-en aux derniers événements : la cour suprême a exigé que, sur le champ, on nomme un ministre de la Justice. Ce poste est libre, alors ? Bien entendu, celui qui était particulièrement intéressé par ce poste était Benny Ganz, le grand défenseur de cette institution (lui-même menacé par un lourd procès du fait de mauvaises conduites dans l’entreprise qu’il dirigeait avant de passer à la vie politique, et cela n’est pas sans rapport). D’un autre côté, Netaniahou (lui-même menacé, etc.) ne pouvait en aucune manière accepter un tel responsable de ce ministère, car cela donnait à la cour suprême qui en dépend pleins pouvoirs sur le jeu politique du pays, une révolution de « palais » en quelque sorte. Après une réunion du gouvernement, qui s’est fort mal passé, c’est finalement Ofir Akounis (notre photo) qui a été nommé comme ministre de la Justice. Raisonnable: un membre du Likoud, située fort à Droite, mais sachant conserver une position équilibrée. Mais non : la cour surprême a… annulé la décision du gouvernement, purement et simplement ! En tout cas, jusqu’aux calendes grecques (ce qui, pour un Juif originaire de Salonique, s’impose pas mal). Quant à Netaniahou lui-même, qui a osé, Mendelblit l’a menacé de le forcer à prendre du large pour quelques temps (« nivtsarouth »)… Pourquoi ? Bof, parce qu’on a pas fait le bon choix, qui était la personne la plus proche des intérêts de la cour suprême, à savoir Benny Ganz.
On en est là, si ce n’est que cette scène, plus que désagréable, a semé la zyzanie entre les groupes, en particulier chez Bennet et Sa’ar, qui sont moins sensibles à la lutte de Netaniahou pour sauver l’Etat des mains des juges, et qui ont été choqués par ce qui s’est passé hier au sein du gouvernement. Ils sembleraient revenir plus vers Lapid et Liebermann, et donc abandonner ce qui semblait être la tendance de ces jours-ci, vers une formule de gouvernement avec Netaniahou juste en arrière-plan, quelques fois Premier ministre, quelques fois Premier ministre adjoint.
On en est là ce matin, mercredi matin. Il se peut du reste qu’il faille noter cette date : elle pourrait marquer la fin de la « démocratie israélienne », et le début d’une dictature redoutable, dont les Juifs orthodoxes feraient les premiers frais, mais bien d’autres éléments dans le pays peuvent devoir en souffrir à l’avenir. Que l’Eternel nous épargne d’une telle situation !