Le 5 août 2020, le frère d’un responsable du comité central du Fatah a été abattu à proximité de Ramallah, alors qu’il tentait de solutionner une querelle familiale. La commission d’enquête formée par l’Autorité palestinienne a révélé que le meurtre avait été perpétré par un officier des forces de sécurité préventive palestinienne. Signe de l’anarchie qui règne en Cisjordanie, une milice palestinienne armée a forcé les commerçants à fermer leur boutique le jour des funérailles. De même, des hommes masqués ont tiré en l’air avec des fusils automatiques, sans même que les forces de sécurité de l’Autorité palestinienne (qui bouclaient la zone du cimetière) n’interviennent.
Une semaine plus tôt, c’est le responsable du Fatah de Balata (camp de réfugiés à proximité de Naplouse), qui a été tué par les milices locales contestant l’autorité de la Police palestinienne, venue fermer des magasins dans le cadre du couvre-feu imposé en raison de l’épidémie de corona virus.
Des incidents armés du même ordre se sont multipliés en Cisjordanie, tout au long du mois de juillet 2020, annonciateurs d’une désintégration de l’Autorité Palestinienne : des personnalités palestiniennes sont régulièrement visées par des attaques à main armée, tels des députés du Conseil législatif, des médecins, des responsables d’institution… à l’occasion desquelles sont impliqués des membres de service de la sécurité palestinienne. Plus précisément, les rapports de la police palestinienne ont révélé une augmentation exponentielle des d’affrontements (en zone A et B de Cisjordanie) à l’origine de meurtres et de centaines de blessés palestiniens. Le chaos dans les zones sous contrôle palestinien se traduit par une généralisation des incidents violents entre dirigeants palestiniens et services locaux, augurant une désintégration de la société palestinienne.
Effectivement, depuis que le Président de l’Autorité palestinienne a mis un terme à la coordination sécuritaire avec Israël (lors de l’annonce de l’annexion par Israël de pans de Cisjordanie), les armes circulent librement dans les territoires sous contrôle palestiniens (zone A et B de Cisjordanie). Il s’agit des armes tolérées par l’Autorité palestinienne et qualifiées d’armes « de la résistance » (c’est-à-dire qui doivent être utilisées pour les attentats anti-israéliens). Or, ces d’armes sont désormais utilisées par les palestiniens pour « régler les conflits familiaux », permettre des actes de vengeance, et ainsi, provoquer un désordre généralisé. Ainsi, et au lieu de commettre des actes terroristes contre les israéliens, les palestiniens les utilisent désormais pour s’entre-tuer.
Résultat, l’instabilité sécuritaire qui s’aggrave quotidiennement (dans les zone A et B de Cisjordanie) plonge la communauté palestinienne dans un abyme destructeur. Or, et comme le Président Abbas n’a pas organisé sa succession, des groupes armés, multiples et variés, tentent de s’accaparer les rênes du pouvoir.
C’est en réalité tout le mode de pensée palestinien qui pose problème, comme l’illustrent les propos du responsable Fatah dont le frère a été abattu. Celui-ci a indiqué qu’il aurait préféré, du fond du cœur, que « la balle qui a tué son frère soit israélienne ». En raisonnant ainsi, il laisse entendre que la mort de son frère importe moins que l’auteur du meurtre : si son frère avait été tué par Israël, sa mort aurait pu faire l’objet d’une meilleure exploitation médiatique.
De même, et pour appeler au calme, à l’unité et à la préservation d’une stabilité sociale, il a déclaré : «Je promets de m’amputer le bras si sa mort doit saper notre tissu social et national». Autrement dit, pour régler le problème de la violence palestinienne, il promet plus de violence (avec une éventuelle auto-amputation). Cette référence systématique à la barbarie est caractéristique de l’état d’esprit palestinien, désordonné, indiscipliné, destructuré, aux antipodes des valeurs d’humanité.
L’AP s’avère, en fait, incapable de contrôler la situation sur le terrain. Et pour cause. Comme la société palestinienne n’a jamais mis en place un cadre légal, une police pour le faire respecter et des tribunaux pour sanctionner les infractions, le désordre s’y installe progressivement. Il est vrai que les conditions de vie palestiniennes sont misérables : mauvaises conditions économiques, pauvreté et chômage, dans un système exclusivement basé sur la corruption, sur les rapports de force (seule règle légitime), et bien évidemment, sur l’absence de droits reconnus aux individus. Ces caractéristique de la société palestinienne sont un parfait terreau pour le chaos.
Des responsables politiques et religieux essaient donc, tant bien que mal, d’endiguer le phénomène, en appelant les palestiniens à mettre un terme aux incidents, aux actes de vengeance, en essayant d’interdire les armes et en tentant de reprendre le contrôle sur elles. Mais le mal est fait. Bon nombre de zones échappe totalement au contrôle l’AP. Or, comme les palestiniens ne se sont jamais occupés de la base du fonctionnement sociétal (à savoir la loi, les tribunaux, la responsabilité individuelle), le semblant de système judiciaire palestinien apparaît comme étant parfaitement inefficace. Les palestiniens se retrouvent dès lors dans une jungle, se faisant justice eux-mêmes, au moyen d’armes qu’ils se procurent assez facilement, sans même avoir à les utiliser pour commettre des actes terroristes contre les israéliens.
Dans un contexte de départ prochain du président Abbas, les responsables palestiniens influents sont tenus responsables des violences (compte tenu de leur incapacité à régler les différends et à gérer les relations internes) et de l’effondrement des fondations mouvantes de la société palestinienne. Des dirigeants ont, certes, tenté d’approcher Mahmoud Abbas pour lui demander d’intervenir et d’empêcher le chaos inéluctable dans lequel la société est en train de s’enfoncer. En vain. Aussi, la population palestinienne assiste, impuissante, aux querelles des responsables palestiniens exclusivement responsables du désastre qui se produit.
L’Autorité palestinienne devrait de juguler les actes de violence et essayer de faire respecter la loi, mais en l’absence de fondement légal du fonctionnement social, elle applique les textes de façon sélective, en fonction des catégories de personnes, sans autorité, sans pouvoir, et sans aucune protection des citoyens palestiniens.
Une fois encore, les palestiniens sont incapables de prendre leur destin en main. Lorsque Mahmoud Abbas a rompu les accords sécuritaires avec Israël, il n’a pas anticipé en quoi cette décision pouvait affaiblir la police palestinienne et contribuer à l’anarchie totale avec le développement des milices palestiniennes.
Théoriquement, les palestiniens devraient bien comprendre une jour que la violence ne mène à rien, que les rapports de force sont stériles, et que le fonctionnement de la société palestinienne est parfaitement irresponsable.
Pour autant, et comble de l’ironie, l’autre problème des palestiniens, tient à l’impossibilité d’imputer ce désastre à Israël. Inversement, seule, la présence de Tsahal en zone A et B de Cisjordanie est de nature à empêcher la désintégration de leur communauté humaine. Une fois encore, et après la bande de Gaza, les palestiniens apparaissent comme étant dans l’impossibilité de disposer d’eux-mêmes, contraints, à jamais, de vivre sous tutelle de la communauté internationale.
Par Maître Bertrand Ramas-Muhlbach