L’AFP situe aux portes de Gaza une découverte archéologique faite en plein cœur d’Israël

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La ville de Gaza, d’où était exporté le vin produit à Yavné, se trouve à environ 45 kilomètres.

Les ruines d’un important site de production de vin vieux de 1500 ans ont été découvertes et fouillées en Israël. A l’époque byzantine, 2 millions de litres y étaient produits chaque année.

L’intéressante dépêche de l’Agence France-Presse (AFP) comporte toutefois quelques approximations géographiques.

Yavné, ville où a été faite cette découverte, est en effet décrite comme une « ville du sud israélien ». Pourtant, la ville est située dans le District Centre du pays qui englobe toute la zone urbanisée entourant Tel Aviv, ville distante d’une vingtaine de kilomètres. Même sur le plan de la latitude, Yavné est plus au nord que Jérusalem.

L’AFP n’ignore pourtant pas l’emplacement de Yavné, ni d’ailleurs son histoire, puisqu’elle les décrit bien mieux dans la version anglaise de la dépêche (avec toutefois la mention de « Jewish settlement » qui fait penser à une « colonie juive » faisant allusion à la terminologie connotée actuelle alors que Yavné était une ville établie de longue date) : « The facility in Yavne, south of Tel Aviv that was a Jewish settlement during biblical times and a key city after the destruction of Jerusalem in 70 AD » (Le complexe de Yavné, au sud de Tel Aviv, qui était une colonie juive à l’époque biblique et une ville importante après la destruction de Jérusalem en 70 de notre ère).

Yavné est en effet un site qui a une place importante dans l’histoire juive. C’est à Yavné que se sont réfugiés les dirigeants juifs après la destruction de Jérusalem par les Romains en l’an 70. Ils y établirent les règles qui allaient permettre au judaïsme de s’adapter et se perpétuer après la perte de son centre spirituel.

La région tomba ensuite sous domination byzantine, ce qui fait que vers les IVet Ve siècles, époque dont datent les vestiges, Yavné était devenue une ville chrétienne avec des minorités de Juifs et de Samaritains, comme le relève un excellent article de Terre Sainte Magazine citant Jon Seligman.

L’erreur de positionnement géographique est amplifiée dans une seconde phrase dans laquelle l’AFP indique que le site de production de vins se trouve « dans le sud d’Israël aux portes de la bande de Gaza ».

Comme le montrent les cartes, à l’échelle du petit pays qu’est Israël, Yavné est loin de la bande de Gaza. L’actuelle Tel Aviv (comme Ashdod) en est bien plus proche.

Que viennent faire les Palestiniens et le Hamas là-dedans ?

Cette description de Yavné comme d’un site jouxtant Gaza amène également l’auteur de l’article à préciser qu’« A l’époque, la bande de Gaza, territoire palestinien sous contrôle aujourd’hui des islamistes du Hamaset la ville adjacente d’Ashkelon, dans le sud d’Israël, près de Yavné, étaient reconnues pour la qualité de leurs vins commercialisés dans le bassin méditerranéen ».

Il s’agit là encore d’un raccourci par rapport à la version anglaise plus precise : « The produce was known as « Gaza and Ashkelon wine » due to the nearby ports from which it was exported » (Ce produit était connu sous le nom de « vin de Gaza et d’Ashkelon » en référence aux ports voisins d’où il était exporté).

La ville (et non la bande qui n’existait pas) de Gaza était avec sa voisine Ashkelon un port d’exportation de ces vins de Terre sainte vers l’ensemble du bassin méditerranéen et leur avait donné son nom. On parlait de vinum gazetum, ou vin de Gaza pour ce breuvage qui était utilisé pour boire, pour se soigner ou pour le culte (très intéressant texte sur ce commerce ici dès la page 10).

Les vins étaient cependant produits non spécialement dans les villes côtières mais dans tout l’arrière-pays (y compris plus au sud dans le désert du Néguev), un peu comme les oranges de Jaffa qui poussent hors de la ville de Jaffa mais étaient historiquement exportées via son port dont elles ont pris le nom.

A l’époque, bien sûr, Gaza, Ashkelon et Yavné faisaient partie du même ensemble géographique sans aucune frontière. Il n’y avait pas de Palestiniens au sens moderne à Gaza (les envahisseurs arabes ne succédant aux Byzantins qu’au VIIe siècle).

Dès lors, l’ajout en français de cette description de Gaza comme territoire palestinien, en plus d’être anachronique, n’a pas grand rapport avec la trouvaille faite à Yavné.

Mais comme souvent, tout est bon pour évoquer le conflit actuel et associer, même de loin, un passé prestigieux aux Palestiniens…

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