La politique étrangère bancale de Biden

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Par le professeur Eytan Gilboa
BESA – 
Centre Begin-Sadat d’Etudes Stratégiques

Trois mois après l’entrée du président Biden à la Maison-Blanche, sa politique étrangère, pêche déjà par la naïveté, la non compréhension du réel, et un complet déni des échecs passés. Ces handicaps sont surtout présents dans les questions liées à Israël.

Le président Biden s’efforce d’apaiser l’Iran, afin de revenir à l’accord nucléaire de 2015, qui imposait des restrictions à son programme de développement d’armes nucléaires. L’administration Obama a commis des erreurs, aussi bien sur la forme des négociations, que sur le contenu de l’accord signé. Le désir impérieux d’Obama de parvenir, coûte que coûte, à un accord, a éclipsé tout réalisme et quand bien même il ait dit, à plusieurs reprises, que « toutes les options étaient sur la table », jamais Obama n’avait l’intention d’utiliser l’option militaire. L’abandon de cet atout a durci les positions de l’Iran et a abouti à un accord, qui comprenait des failles dans la surveillance des installations nucléaires, et l’absence dans cet accord, de la surveillance de la production de missiles balistiques, d’une part, et l’ingérence de l’Iran dans des pays sunnites voisins, d’autre part, a entraîné les interventions militaires iraniennes en Syrie, au Liban, en Irak et au Yémen.

Biden a retiré de la liste d’organisations terroristes les Houthis (chiites pro iraniens, combattant le gouvernement yéménite, soutenu par l’Arabie saoudite). Le président américain comptait, par cette mesure « clémente », parvenir à un cessez-le-feu, pour juguler la terrible crise humanitaire consécutive à la guerre civile yéménite. Les Houtis et leur sponsor Iran ont considéré cette mesure comme une faiblesse et un feu vert pour intensifier leurs attaques à la fois au Yémen et en Arabie saoudite.

En février dernier, en représailles à une attaque contre une base américaine en Irak, l’Amérique a, « en traînant les pieds », effectué un bombardement sur une base de milice pro-iranienne. En même temps, Biden a réduit les forces américaines dans le Golfe. Dans la foulée, le porte-parole américain a divulgué, dans les médias américains, des informations classées, concernant Israël. En effet, Israëlצ en représailles aux attaques iraniennes contre deux navires marchands israéliens, a attaqué des navires appartenant aux gardiens de la révolution iraniens, faisant de la contrebande de pétrole et d’armes vers la Syrie. Fidèle à sa politique munichoise, Biden a fait savoir, « en douce », que même en cas d’échec des négociations, il ne comptait pas recourir à l’option militaire, contre les installations nucléaires iraniennes. Il a indiqué aussi qu’il s’opposait également à une option militaire israélienne. Malheureusement, une telle position, comme du temps d’Obama, renforce l’intransigeance iranienne.

Les démocrates considèrent le respect des droits de l’homme comme une valeur cardinale de leur politique étrangère. Mais l’application sélective de ce principe soulève des questions et des inquiétudes. Lorsque le secrétaire d’État Blinken a présenté le rapport 2020 sur les droits de l’homme dans le monde, il a mentionné les noms de pays où il y a de graves violations de ces droits, tel que la Birmanie, le Yémen, l’Arabie saoudite et la Syrie. Curieusement, il a omis l’Iran.

Le même rapport mentionne le nombre de morts, de blessés et de détenus, suite à des manifestations de masse contre le régime en 2019, considérablement réduit. La même désinformation s’était produite en 2009, lorsque l’administration Obama s’était abstenue de condamner le régime iranien pour avoir brutalement réprimé les protestations contre la fraude massive, lors de l’élection présidentielle. Il ne fallait surtout pas braquer le régime iranien, afin de ne pas torpiller les négociations d’Obama alors, et de Biden aujourd’hui.

Le résultat de ces politiques est l’intransigeance accrue des positions de l’Iran. Les ayatollahs n’ont pas accepté des négociations directes avec les États-Unis. Aujourd’hui, alors que les nouvelles négociations n’ont pas commencé, l’Iran a commencé à enrichir de l’uranium au taux de 60 %, ce qui rapproche la république islamique de la bombe atomique. Très clairement, il ne s’agit pas d’un pas dans le sens du compromis, mais bien au contraire. De plus, depuis plus de deux décennies, les dirigeants iraniens affirment qu’ils n’ont pas l’intention de développer des armes nucléaires, car, selon eux, cela est interdit par l’islam. Ils soutiennent qu’ils ne souhaitent développer que l’infrastructure nucléaire civile pour l’électricité, la médecine et la science. Or, d’après les archives nucléaires iraniennes, que le Mossad a réussi à apporter en Israël, les Iraniens ont toujours menti sur leurs intentions réelles et continuent de tromper le monde, quant aux objectifs réels de leur programme nucléaire.

L’Iran suggère que les États-Unis fasse des concessions, afin d’arriver aux négociations directes, et manœuvre en vue d’empêcher un front uni USA – Europe. Téhéran pose toujours deux conditions préalables aux négociations : l’annulation de toutes les sanctions imposées par Donald Trump et un retour, pur et simple, à l’accord de 2015, sans aucun changement. À ce stade, Biden est prêt pour la suppression progressive des sanctions, à condition que l’Iran accepte un nouvel accord « plus sévère » qui inclura de nouveaux points, omis par l’accord de 2015. A ce jour, l’Iran a rejeté avec mépris toutes ces conditions.

Biden mène, envers les organisations internationales, une politique complètement contraire à celle de Trump. Il a annoncé le retour des États-Unis au Conseil des droits de l’homme de l’ONU et a annulé des sanctions, imposées par Trump, à Fatou Bensouda (la procureur sortant) en raison d’enquêtes sur les États-Unis et Israël pour des crimes de guerre présumés. En annonçant l’annulation des sanctions imposées à Bensouda, le secrétaire d’État Blinken a réitéré les critiques américaines au tribunal, mais a affirmé vouloir arriver aux changements par la négociation et la persuasion et non par des sanctions. De nouveau Blinken ignore l’hostilité unilatérale de Bensouda envers Israël. Le secrétaire d’État aurait dû laisser les sanctions en place et exiger de Bensouda de laisser son successeur Karim Khan décider d’ouvrir, ou pas, une enquête au sujet d’Israël

Quant au Conseil des droits de l’homme de l’ONU, Trump avait pris la décision juste, car il s’agit d’un organe politique contrôlé par des pays qui s’avèrent les moins respectueux des droits de l’homme, tels que Chine, Russie, Cuba, Pakistan, Libye, Venezuela et la Somalie. C’est un organisme éminemment antisémite. Il condamne régulièrement Israël pour des crimes imaginaires. Cette organisation publie des rapports biaisés sur la politique d’Israël dans les « territoires palestiniens », sur lesquels elle s’appuie, pour émettre ses condamnations.

Le secrétaire d’État Blinken explique le retour des USA au Conseil des Droits de l’Homme, par une volonté de modifier cette organisation de l’intérieur. C’est une perte de temps. Blinken n’a rien appris de l’échec d’une politique similaire dans le passé. L’actuel Conseil des droits de l’homme des Nations Unies a été créé en 2006, après la dissolution de son prédécesseur, la Commission des droits de l’homme, parce qu’elle était politisée et ne traitait pas les problèmes pour lesquelles elle avait été créée.

L’administration Bush Jr. a exigé des réformes de la gouvernance du Conseil des droits de l’homme. Le conseil a refusé et Bush a décidé que les États-Unis restent en dehors de cet organisme. L’administration Obama y est retournée, toujours sous le prétexte de changer cet organisme de l’intérieur, aucune demande des Américains n’ayant été mise en œuvre. Donald Trump a formulé les mêmes exigences que ses prédécesseurs, sans résultat. Finalement en 2018 les États-Unis ont quitté le Conseil des droits de l’Homme. Le retour inconditionnel des Etats-Unis dans le Conseil révèle la naïveté coupable de l’administration Biden et son aveuglement sur la nature réelle de cet organisme de l’ONU.

Biden a même annulé la décision de Trump de stopper l’aide américaine annuelle à l’Autorité palestinienne et à UNRWA (agence spéciale de l’ONU d’aide aux réfugiés palestiniens) de plusieurs centaines de millions de dollars. De nouveau, au lieu de conditionner cette aide à l’obligation de l’Autorité palestinienne à reformer toute sa gouvernance, par l’introduction de la transparence dans l’utilisation de l’argent, Biden restaure sans discernement cette politique laxiste, où la plus grande partie de l’aide américaine atterrit soit dans des poches privées, soit sert à subventionner le terrorisme. L’UNRWA est une organisation corrompue qui perpétue le problème des réfugiés et mène une incitation antisémite contre Israël. Biden aurait pu conditionner l’aide aux réfugiés sur le démantèlement de l’UNRWA et le transfert de ses prérogatives à l’agence officielle des Nations Unies, qui s’occupe des tous les réfugiés du monde.

La politique de Biden est en effet conforme aux valeurs et principes du Parti démocrate. Mais, pour l’essentiel, la complaisance dans les relations internationales aboutit aux résultats exactement opposés. Cela ne renforce pas l’influence et la dissuasion, face aux régimes autoritaires extrémistes tels que l’Iran et aux organisations internationales corrompues, contrôlées par de tels régimes. Trump a laissé à Biden de puissants leviers de pression, mais au lieu de les utiliser pour atteindre les objectifs de politique étrangère des États-Unis, il les démantèle dans une irresponsabilité confondante. La politique « bisounourse » de Biden concernant l’Iran, CPI ou les Palestiniens, nécessite une réévaluation de la réponse israélienne et une prudente application de la politique israélienne adéquate.

Edouard GrisMABATIM.INFO
Traduction et adaptation

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