La « nouvelle Déclaration Balfour » de Donald Trump

1
58

Par Dr Isaac Attia pour LPHInfo

Imaginez qu’en 1917, les sionistes qui se trouvaient en Angleterre pendant la Première Guerre mondiale, et principalement Chaïm Weizman, Nahum Sokolow et le rav Avraham Yits’hak Hacohen Kook, soient passés à coté de la Déclaration Balfour ? Quel  aurait été l’avenir d’Israël ? Heureusement, ils ont su exploiter pleinement cette opportunité. Non seulement ils ont su profiter de ce tournant historique que constitua la chute de l’Empire Ottoman, l’occupation anglaise de la terre d’Israël et le Mandat Britannique sur la Palestine, mais ils ont su préparer cette opportunité en entretenant d’étroites relations avec les cercles évangélistes proches du gouvernement anglais, avec les cercles chargés de la présence anglaise au Moyen-Orient, et lorsque le Gouvernement de Sa Majesté voulut remercier Chaïm Weizman pour l’aide scientifique qu’il apportait à l’Angleterre dans l’effort de guerre, ils surent saisir l’opportunité pour obtenir le soutien de l’Angleterre à la création d’un « Foyer National Juif ». La Grande-Bretagne de 1917 étant la seule puissance capable de soutenir le projet sioniste et lui donner des chances de réussir.

Imaginez maintenant que le Plan Trump qui consiste à obliger l’Egypte et la Jordanie d’accepter  les Arabes de Gaza et de Judée-Samarie et qui consiste à renforcer Israël dans une stratégie de paix au Moyen-Orient, ne soit pas compris par Israël comme une opportunité à saisir. Imaginez qu’Israël soit aveugle aux changements de la politique mondiale et aux nouvelles donnes d’une nouvelle alliance de l’Atlantique Nord comprenant l’Europe et la Russie et dirigée par les Etats-Unis contre la Chine. Imaginez qu’Israël ne mesure pas l’influence des évangélistes américains dans le projet, à long terme, d’un Etat des Juifs libéré de l’Islam. Imaginez qu’Israël soit aveugle à la capacité de l’Amérique de 2025, première puissance mondiale, d’imposer ses vues au Monde Arabe, pour faire de la région une route commerciale fiable et une zone de neutralisation des foyers Djihadistes qui menacent les Etats-Unis de l’extérieur comme de l’intérieur. En d’autres termes, imaginez qu’Israël soit dirigé par un autre leader que Benjamin Netanyahou, un leader accroché à des stratégies caduques, incapable de mesurer l’opportunité du Plan Trump parce que totalement étranger au travail souterrain qui y a conduit.

En effet, si l’opportunité de la « Déclaration Balfour » a pu être saisie au vol par les sionistes de 1917 c’est parce qu’elle était le résultat d’un travail préalable de leur part. De la même façon, la « nouvelle Déclaration Balfour » de Donald Trump ne peut être saisie au vol que par ceux qui ont œuvré, de longue date, pour préparer le terrain. La volonté, depuis plusieurs années, d’impliquer l’Amérique dans le combat contre l’axe iranien fait partie de cette préparation. Tout comme les premiers Accords d’Abraham ont constitué une première tentative de marginaliser les Palestiniens et d’envisager un Moyen-Orient libéré de leur chantage. Mais il suffirait d’ouvrir les yeux sur la stratégie de Benjamin Netanyahou depuis le 7 Octobre 2023 pour comprendre ce qui a permis cette fameuse déclaration du Président américain, le 6 Février 2025.

Or, ouvrir les yeux n’est pas donné à tout le monde. Les yeux en sang et la rage au cœur de tous ceux qui exultent une haine irrationnelle contre Netanyahou rend impossible une telle lucidité. Les théories mensongères et ridicules d’un Premier Ministre faible, prisonnier de sa peur de la prison (alors qu’il est présumé innocent), soumis servilement à une épouse quasiment mythifiée, pris en otages par une coalition diabolisée, tout cela voile la réalité d’un épais tissu de propagande qui empêche de sortir de l’aveuglement. Sans compter que pour cacher au peuple les vrais enjeux de la division de la société israélienne et les vrais enjeux sur l’avenir d’Israël, il n’y a rien de mieux qu’un bouc émissaire qui va canaliser toute l’attention loin des questions qui dérangent. Dernier point noir, et non des moindres, les détenteurs de la parole publique, les élites, les fondateurs, les héros nationaux, les journalistes, les professeurs, les généraux, les juges, tous ceux dont le statut social, la richesse et l’avenir reposent sur les « accords d’Oslo », le « nouveau Moyen-Orient », les « victimes de la paix », la « coexistence judéo-arabe », le « vivre ensemble », la « révolution institutionnelle », la prétendue « dignité et liberté de l’Humain » et la double imposture du slogan « Etat juif et démocratique » imposé comme nouvelle définition d’Israël depuis 1992, tous ceux qui, pour incarner le Bien absolu, ont besoin du Mal absolu en la personne de Netanyahou, ne peuvent accepter, quelles que soient les évidences, la thèse d’une vision à long terme et d’une politique cohérente de l’actuel Premier Ministre d’Israël.

Il faut donc s’en remettre aux muets qui s’abstiennent de toute critique envers Bibi, aux manchots qui ne veulent pas montrer Bibi du doigt, aux culs-de-jatte qui hésitent à descendre dans la rue pour faire chuter Bibi et aux aveugles qui sont incapables de voir le vrai visage de Bibi pour trouver quelques personnes encore capables d’entendre ce que dit Netanyahou et pour comprendre ce que lui répond Donald Trump. La première déclaration du Premier Ministre, en guise d’introduction, c’est que « la guerre sera longue » et que ce ne sera pas une simple opération militaire contre Gaza, comme « Plomb durci » en 2009, « Colonne de nuée » en 2012 ou « Bordure protectrice » en 2014, mais une guerre longue et difficile. L’Etat-major de Tsahal après le massacre du 7 Octobre 2023, a baptisé l’Opération « Epées de fer » mais le premier Ministre s’obstine à refuser d’y voir une simple opération de Tsahal pour sauver des otages et punir des terroristes, et parle de « la Deuxième Guerre d’Indépendance d’Israël ». Il ne s’agit pas là d’une affirmation superfétatoire puisque le massacre du 7 Octobre 2023 a fait vaciller les fondements même du projet sioniste. Pourtant, les journalistes continuent de considérer cette guerre comme une simple opération militaire sur Gaza, qui serait, selon eux, terminée depuis longtemps.

La deuxième affirmation de Benjamin Netanyahou : « Ni le Hamas, ni l’Autorité palestinienne ne gouverneront Gaza le jour d’après ». Une déclaration renouvelée à chaque conférence de presse, ce qui n’empêche pas les médias israéliens de répéter qu’il n’y a pas de stratégie pour le jour d’après. La stratégie n’est pas donnée en pâture à la « Déesse aux cents bouches » (la presse), est-ce pour autant une absence de stratégie ? Refuser catégoriquement l’Autorité palestinienne est déjà une rupture radicale avec la politique menée depuis trente ans. Comment y voir une absence de stratégie ? Netanyahou affirme : « la guerre ne s’arrêtera pas tant qu’Israël ne sera pas venue à bout du Hamas ». Et tous les stratèges militaires israéliens estiment que cet objectif est impossible. Netanyahou claironne : « nous allons gagner cette guerre ». Et tous les manifestants israéliens se complaisent dans la victimisation et poussent à la défaite. Il faut que ce soit le Président des Etats-Unis, contre toute attente, qui annonce : « Oui, vous allez  gagner la Deuxième Guerre d’indépendance » ! « Oui, vous allez venir à bout du Hamas » ! « Oui, vous allez chasser l’Autorité palestinienne » ! « Finissez le travail, nous vous soutenons ».

La Bible raconte que Yitro, maitre de Midian, prêtre de tous les dieux de l’Antiquité et beau-père de Moïse, vint rejoindre son gendre, au pied du Mont Sinaï et lui dit : « J’ai vu les grandes choses que ton peuple a accomplies, alors je suis venu auprès de toi ». Il y a eu la guerre de Gaza, la destruction des tunnels, l’anéantissement des infrastructures du Hamas, la destruction ciblée, immédiate et massive du Hezbollah, les bombardements des chefs terroristes, au Liban et en Iran, la destruction des missiles et l’anéantissement des défenses anti-aérienne de l’Iran, la chute du régime syrien, la destruction des armes russes et iraniennes entreposées en Syrie et au Liban, le bombardement des ports du Yémen, l’élimination des terroristes de Judée et Samarie, la frayeur des Jordaniens et des Egyptiens enfin confrontés à leurs responsabilités. Et si, la parole, la vision, la détermination et l’action de Benjamin Netanyahou avait touché le cœur de Trump et que son Plan, telle une « nouvelle Déclaration Balfour », allait libérer Israël du « cancer palestinien » dans une « Deuxième Guerre d’indépendance » aussi longue que victorieuse, et allait neutraliser définitivement, à la source, la menace islamique sur Israël et sur le monde ? Alors, sous le regard incrédule des élites, des fondateurs, des héros nationaux, des journalistes, des professeurs, des généraux et des juges, le joyeux défilé du peuple des gueux, du petit peuple élu, de l’humble majorité des muets, des manchots, des cul-de-jatte et des aveugles, fêteront dignement la victoire et le renouveau d’Israël,  et se réjouirons de n’être pas passé à côté de cette « nouvelle Déclaration Balfour », un certain jour de février 2025.

Dr Isaac Attia est historien et sémiologue

NDLR : Bien qu’au delà de tout cela, une participation céleste reste indispensable, ce que l’on appelle de la Syata diChemaya, sans laquelle rien n’est possible, et rien ne fonctionne…

1 Commentaire

Laisser un commentaire