La Knesset refuse à nouveau la création d’une commission d’enquête

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Une nouvelle tentative parlementaire pour faire la lumière sur l’attaque du Hamas contre Israël, survenue le 7 octobre 2023, vient d’échouer. La Knesset a rejeté, pour la seconde fois en deux mois, une proposition de loi visant à créer une commission d’enquête d’État indépendante, chargée d’examiner les défaillances ayant permis cette tragédie.

La motion, portée par la députée Orit Farkash Hacohen du parti HaMa’hané HaMamlakhti, a été repoussée par 51 voix contre 39, illustrant une fois encore la volonté de la majorité gouvernementale de différer toute investigation tant que le conflit contre le Hamas est en cours.

La proposition législative visait à contourner l’aval du gouvernement en s’appuyant sur le critère « d’intérêt public exceptionnel », permettant ainsi une mise en place autonome de la commission.

Un enjeu politique et institutionnel
Le refus de cette initiative s’inscrit dans un contexte politique tendu. Le ministre de la Justice, Yariv Levin, figure de proue des réformes judiciaires controversées en Israël, s’est opposé fermement à ce projet. Il a souligné son manque de confiance dans une commission nommée par le président de la Cour suprême, Isaac Amit, qu’il accuse de partialité. Or, selon la loi israélienne, les membres d’une commission d’enquête d’État sont choisis par la Cour suprême, sans intervention gouvernementale. Ce mécanisme garantit une indépendance totale, y compris dans l’exercice du pouvoir d’assignation à comparaître.

Dans ce bras de fer institutionnel, la députée Farkash Hacohen a dénoncé une attitude hypocrite de la coalition, rappelant que celle-ci n’avait eu aucun mal, le matin-même, à voter un projet de loi modifiant la composition du comité de sélection des juges, sans recherche de consensus.

Un rejet récurrent des propositions d’enquête
Ce n’est pas la première tentative de Farkash Hacohen sur ce dossier. Fin janvier déjà, une première proposition avait été rejetée par 53 voix contre 45, montrant que la majorité reste soudée sur sa ligne de conduite : pas d’enquête avant la fin de la guerre.

Pourtant, le besoin de transparence est de plus en plus exprimé. Dans un communiqué, le parti HaMa’hané HaMamlakhti a rappelé : « Ceux qui n’ont rien à cacher ne devraient pas craindre une enquête indépendante ». Le chef du parti, Benny Gantz, a lui-même reconnu que les décisions politiques prises avant le 7 octobre, y compris les siennes, devaient être examinées sans tabou.

Le gouvernement reste ferme sur son calendrier
De son côté, le Premier ministre Benjamin Netanyahu a été clair à plusieurs reprises : toute enquête devra attendre la fin des hostilités. Il a d’ailleurs refusé une proposition de compromis formulée par le président de l’État Isaac Herzog et le président de la Cour suprême, qui envisageait une désignation conjointe des membres de la commission par des juges modérés. Netanyahu persiste à dire que seule une enquête impartiale, largement soutenue par l’opinion publique, aura du sens. Il craint une commission à charge, dont les conclusions seraient dictées d’avance.

Devant la Knesset, dans un discours passionné, le chef du gouvernement a réaffirmé la nécessité d’une enquête approfondie, mais a insisté pour qu’elle soit « équilibrée, indépendante et crédible aux yeux de tous les Israéliens ».

Vers une alternative moins indépendante ?
En parallèle, une voie alternative a été proposée. Le député du Likud Ariel Kallner a suggéré la mise en place d’un organe d’enquête distinct, dont les membres seraient directement désignés par la Knesset. Une manière d’éviter le contrôle judiciaire, mais aussi de réduire l’indépendance de l’instance, ce qui risque de rendre le processus moins crédible aux yeux de l’opposition et d’une partie de l’opinion.

Une exigence de clarté légitime, mais un timing assumé
Si certains critiquent le refus de lancer immédiatement une commission d’enquête, le gouvernement israélien défend un choix pragmatique : priorité à la sécurité nationale et à la victoire sur le Hamas avant toute rétrospection administrative. Dans un contexte de guerre encore actif, où l’ennemi islamiste reste une menace persistante, la stabilité de l’État et l’unité du pays priment sur les règlements de comptes politiques précipités.

Une enquête viendra — c’est inévitable. Mais elle devra se faire dans un climat apaisé, avec pour objectif non pas la polémique, mais le renforcement de la défense israélienne et la prévention de nouvelles tragédies.

Jforum.fr

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