Face à la décision du plénum de la Knesset d’approuver l’amendement à la Loi fondamentale qui contourne le système judiciaire, la Haute Cour de justice a rendu une ordonnance conditionnelle concernant le statut juridique d’Aryeh Derhy. Le gouvernement va-t-il en réponse bientôt promulguer la clause de remplacement ?
Hidabrouth – Yehouda Eisikowitz – Illustration : shutterstock
Tôt le matin d’hier mardi, l’adoption de la loi connue sous le nom de « loi Derhy » a été achevée. La loi, qui est un amendement à la Loi fondamentale du gouvernement, vise à assurer la nomination du président du Shas Aryeh Derhy au poste de ministre sans nécessiter l’approbation du président de la Commission électorale centrale. Cependant, la Cour suprême s’est empressée d’émettre une ordonnance conditionnelle dans la requête déposée contre la nomination de Derhy et contre l’amendement à la loi, et discutera de la question la semaine prochaine dans une composition élargie de 11 juges.
Ironiquement, la décision d’émettre l’ordonnance a été prise par le juge Yits’hak Amit, qui est actuellement à la fois président de la commission électorale et juge à la Cour suprême, et qui devrait être nommé l’année prochaine président de la Cour. Aussi étrange que cela puisse paraître qu’une personne serve dans deux chapeaux qui ont un conflit d’intérêts dans ladite question, cela n’a pas empêché Amit d’émettre l’ordre.
Le juge Amit n’innove rien dans cette conduite. Les juges ignorent souvent les conflits d’intérêts institutionnels, en ce qui les concerne, et même en cas de conflits d’intérêts personnels, ils agissent avec une certaine souplesse.
La signification de l’émission d’une ordonnance conditionnelle est une déclaration selon laquelle la pétition contre la nomination de Derhy n’est pas sans fondement et que le fardeau de la persuasion passe à l’autre partie. Avant que l’ordonnance ne soit émise, les requérants sont tenus de convaincre que leur requête est fondée, tandis qu’après son émission, les intimés sont tenus d’expliquer pourquoi ils s’opposent à ce qu’elle soit absolue. Ce renversement n’est pas seulement une question de procédure, mais une question essentielle.
La décision d’émettre une ordonnance conditionnelle contre un amendement à la Loi fondamentale, avant même que le gouvernement n’ait prêté serment, est un signal très significatif. Le tribunal exprime ainsi une position selon laquelle la requête mérite d’être acceptée en principe, si aucun contre-argument significatif n’est soulevé, ce qui a de lourdes conséquences.
Le juge Amit aurait pu passer entre les mailles du filet, tout d’abord tenir une audience préliminaire sur la requête et présenter au moins l’apparence d’une discussion approfondie sur la question. Sa décision de rendre une ordonnance contre la modification de la Loi fondamentale et la décision de la présidente de la Cour suprême, la juge Esther Hayut, d’élargir la composition à 11 juges, montrent que les juges sont confrontés à des décisions dramatiques, ou du moins ils sont intéressés à ouvrir la porte à de telles décisions. Autrement dit, il semble que la Cour suprême soit en guerre avec le pouvoir législatif.
Les juges de la Haute Cour ne vivent pas dans une bulle, ils connaissent très bien l’ambiance publique, et sur quelles promesses le nouveau gouvernement a été élu, alors que la clause de remplacement est l’une des principales questions qu’il entend voter.
Au cours des négociations prolongées de la coalition, il semblait que le traitement de la clause de remplacement serait reporté pour le moment, jusqu’à ce qu’une vaste réforme soit adoptée qui traiterait de toutes les questions juridiques pendant la session d’été. Cependant, la mesure extrême prise ce matin par la Cour suprême peut déclencher une réaction rapide et délibérée, qui fera immédiatement avancer l’adoption de la clause de remplacement et placera la Haute Cour à sa place légitime grâce à cela.