« Fais donc entendre au peuple, « na » que chacun demande à son voisin et chacune à sa voisine, des vases d’argent et des vases d’or » (ibid. 11,2).
L’expression du verset, « na », est expliquée par Rachi (d’après Berakhoth 9a) comme exprimant une supplication de la part de l’Eternel, afin que l’on ne dise pas qu’Il n’a tenu parole qu’en ce qui concerne l’esclavage (Beréchith/Genèse 15,13), mais non dans le domaine de la richesse promise à la sortie d’Egypte.
Le ‘Hatham Sofer s’étonne : dans le verset de la présente paracha, il a fallu conjurer les enfants d’Israël de demander aux Egyptiens de leur prêter des objets, alors que, plus tard, Moché leur ordonne de cesser de collecter le butin abandonné par les Egyptiens à la suite de leur mort dans la mer (Chemoth/Exode 15,22) ! De plus, dans le premier cas, cette demande semblait positive pour le peuple juif, puisque Moché leur demandait d’agir ainsi, alors que dans le second cas, cela semble avoir été différent : en effet, il les a fait partir contre leur gré..
Le ‘Hatham Sofer apporte une réponse à ces questions en se basant sur l’explication du Ran (Derachoth), qui se demande pourquoi il fallait justement que le butin d’Egypte leur arrive par le biais de prêts d’objets sollicités avant leur départ, alors que l’Eternel pouvait leur faire parvenir ce qu’Il voulait par d’autres voies également. Et, ajoute le Ran, de plus, le fait d’avoir prêté des objets aux enfants d’Israël a amené les Egyptiens à les poursuivre avec encore plus d’ardeur, tant ils voulaient récupérer leurs biens ! Du reste, écrit le Sforno, c’est exactement la raison pour laquelle les enfants d’Israël se sont fait prier avant d’accepter d’emprunter des biens de leurs voisins : justement, ils craignaient une telle réaction.
Mais en fait, tout ceci était voulu : ces emprunts ont encore accru la sanctification du Nom divin, puisque grâce à eux, la poursuite des Egyptiens fut plus farouche, et le miracle de la délivrance des enfants d’Israël en devint d’autant plus remarquable.
Le ‘Hatham Sofer ajoute un point : si la poursuite de l’argent repose toujours sur des forces négatives, il en allait autrement avec celui que les enfants d’Israël durent emprunter en ce jour précis. Comme cela allait provoquer une véritable sanctification du Nom divin, les forces du mal ne furent en aucune manière intéressées par un tel scénario, et il a fallu, en conséquence, convaincre les enfants d’Israël de s’exécuter, et d’aller chez leurs voisins dans ce but. Ils n’éprouvaient justement de ce fait aucune attirance pour un argent de cette nature. En revanche, face au butin laissé par les Egyptiens sur les rives de la Mer Rouge, la réaction du peuple juif est revenue à la normale. Et comme ils récoltaient ce butin avec un très vif intérêt personnel, Moché a dû les faire partir, voyant en cela un danger spirituel.