Israël face à la menace des mandats d’arrêt internationaux : une crise judiciaire en gestation
Alors que les enquêtes sur les crimes de guerre présumés à Gaza stagnent, Israël se retrouve sous une pression internationale croissante. La lenteur des investigations menées par l’armée israélienne (Tsahal) pourrait entraîner l’émission de mandats d’arrêt internationaux contre ses soldats, une situation qui risque de limiter la liberté de déplacement de nombreux Israéliens à travers le monde. Ce scénario préoccupant reflète un manque de conformité aux engagements de transparence et de rapidité judiciaire formulés dans les recommandations de la Commission Ciechanover en 2015.
Malgré les engagements pris après le conflit de Gaza en 2014, Tsahal semble incapable de respecter les délais établis pour publier les résultats des enquêtes sur des incidents controversés. À ce jour, aucune publication majeure n’a été réalisée en réponse aux événements des 15 derniers mois. Cette absence alimente la critique, notamment après l’arrestation avortée d’un soldat israélien au Brésil, sur la base d’accusations floues mais symboliquement significatives.
En vertu du Statut de Rome, la Cour pénale internationale (CPI) n’intervient que si le pays concerné ne mène pas d’enquêtes sérieuses. Cette règle a jusqu’ici permis à Israël d’éviter des sanctions plus larges. Toutefois, les récents mandats d’arrêt émis contre le Premier ministre Benjamin Netanyahou et l’ancien ministre de la Défense Yoav Galant soulignent la montée en intensité des pressions internationales. Le procureur de la CPI, Karim Khan, a également averti qu’un manque de progrès pourrait étendre les mandats d’arrêt aux soldats israéliens.
Des précédents révélateurs
Ce n’est pas la première fois qu’Israël est confronté à des accusations internationales. Depuis les conflits de Gaza de 2008-2009 et 2014, des commandants de Tsahal tels que Benny Gantz ou Doron Almog ont fait face à des tentatives de poursuites à l’étranger. Néanmoins, les cas actuels présentent une dimension nouvelle, en raison de l’absence totale de rapports périodiques sur les enquêtes en cours.
En 2014, Tsahal avait publié cinq rapports en deux ans, démontrant une volonté de transparence qui avait contenu la critique. Aujourd’hui, cette dynamique semble rompue, laissant un vide exploité par les détracteurs d’Israël, tant sur le plan judiciaire que diplomatique.
Une crise judiciaire et politique
Israël dispose pourtant de solides arguments juridiques pour défendre ses actions, notamment concernant les destructions de bâtiments à Gaza, souvent utilisées comme positions stratégiques par le Hamas. Mais le silence prolongé de l’armée sur ses enquêtes alimente les suspicions. Pire encore, des pays traditionnellement neutres pourraient rejoindre ceux qui émettent des mandats d’arrêt, isolant encore davantage Israël.
Les critiques pointent également des résistances internes au sein de Tsahal, où les enquêtes sur des abus présumés rencontrent une forte opposition politique. Les retards dans l’affaire de Sdei Teiman, où des soldats ont été filmés en flagrant délit de mauvais traitements, illustrent ces blocages.
Une fenêtre pour éviter l’isolement
La publication rapide de rapports détaillés pourrait désamorcer une partie des tensions internationales. Si certains pays resteront toujours opposés à Israël, d’autres, notamment en Occident, pourraient se montrer plus compréhensifs face à des efforts concrets de transparence.
Cependant, si l’armée israélienne persiste dans son mutisme, elle risque de voir une vague de mandats d’arrêt internationaux s’abattre sur ses soldats. Cette crise pourrait non seulement limiter leur liberté de déplacement, mais aussi miner davantage les relations d’Israël avec ses alliés traditionnels.
Le dossier brésilien pourrait bien être un signal d’alarme pour Israël. Sans une réponse rapide et crédible, le pays pourrait se retrouver face à une crise judiciaire internationale d’une ampleur sans précédent.
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