Par Yves Mamou
L’actualité moyen-orientale me parait pour l’instant bien orientée.
Après le Hezbollah (a moitié détruit) et le Hamas (aux trois quarts détruit), l’Iran voit son contrôle sur la Syrie fragilisé. Sur le moyen terme, je ne suis pas sûr qu’une résurgence d’al Qaeda en Syrie soit une bonne chose, mais dans le contexte actuel,
L’insécurité militaire en Syrie apparaît comme l’effondrement d’un nouveau pan de la stratégie iranienne d’encerclement d’Israël.
Il est fascinant de penser qu’après avoir passé quarante ans à construire un réseau de satellites militaires censés attaquer Israël tous ensemble (Hezb, Houthis, Hamas, plus toutes les milices en Syrie et Irak), après avoir dépensé des dizaines de milliards de dollars pour armer et salarier ces milices, tout ce bel effort part en lambeaux après un an de guerre à Gaza et au Liban.
Incapables de coordination (le Hamas est parti seul en guerre le 7 octobre), ce réseau iranien ne doit finalement sa longévité qu’aux entraves imposées par les États-Unis à l’action militaire israélienne (je rappelle qu’Israël a dû attendre le feu vert de s’en prendre au Hezbollah pendant quasiment un an, au prétexte que ce crétin d’Hochstein allait réussir à négocier un cessez-le-feu).
Ce que la Syrie montre peut être aussi, c’est la fin de la focalisation du monde musulman sur la « cause palestinienne ».
Entendons-nous bien, la « Palestine » et la haine d’Israël demeurent fichées au cœur de ce qu’on appelle la rue arabe. C’est le moteur du djihad populaire. Mais il me semble que l’action des États en Syrie montre surtout la permanence du vieux conflit sunnite-chiite. Plus vif que jamais.
L’impérialisme iranien – sa volonté de dominer le Moyen-Orient via l’instrumentalisation de la cause palestinienne – peut peut-être être analysé comme la tentative des chiites d’imposer leur domination aux sunnites.
L’action de la Turquie en Syrie – le sunnite qui résiste au chiite et le démantèle dès qu’il le peut – n’est elle pas un signe que ce vieux conflit sunnite-chiite est ce qui structure l’invraisemblable a-modernité du monde musulman ?
À moins que ces vieilles croûtes religieuses ne soient le signe du futur.
On ne peut mobiliser des peuples et déclencher des guerres qu’en faisant appel à leurs fondements religieux traditionnels. YM
Yves Mamou, MABATIM.INFO – Illustration : Première page du livre Chiites- Sunnites, la grande discorde, de Pierre Lean Luisard