Dans les 12 jours qu’il reste après le cessez-le-feu, Lapid va tenter de ramener Bennett, de persuader Sa’ar, d’embrasser Abbas et de rapprocher le parti arabe commun… Combien de chance d’y parvenir ?
Ynet – Moran Azoulay
Pour paraphraser le fameux cliché, nous avons vu ce dernier jour que lorsque les armes se taisent, les politiciens tonnent. Mais la décision du gouvernement de cesser le feu contre le Hamas, après 11 jours de combats, n’a apporté aucune réalisation politique significative à Israël: pas de démilitarisation, pas de cessation de l’intensification et pas de retour des jeunes (morts ou vivants) chez eux. Au contraire, le Hamas a fixé pour Israël quand la guerre commence, quand elle prend fin, et selon certains rapports – qui sont démentis du côté israélien – il a reçu des garanties concernant Sheikh Jarrah et la mosquée Al-Aqsa. À tout le moins, ce n’est pas un succès au niveau national. Peut-être pas non plus au niveau politique.
Depuis jeudi dernier, le sentiment a prévalu parmi une grande partie du public qui s’oppose à Benjamin Netanyahu que le Premier ministre a eu surtout un succès dans l’arène politique en parvenant à faire quitter l’idée de changement de gouvernement de l’ordre du jour. La série de combats et d’émeutes dans les localités arabes et dans les rues des villes mixtes a conduit le président de droite Naftali Bennett à abandonner son grand rêve pour le moment et à annoncer qu’il renonce au poste de Premier ministre en raison de la composition enchevêtrée de la coalition émergente.
Mais au moins dans les dernières heures avant le cessez-le-feu, il semblait trop tôt pour faire l’éloge officiel du changement de gouvernement. Le président de Yesh Atid, Yair Lapid, a 12 jours – pas particulièrement faciles – pendant lesquels le mandat de former un gouvernement est toujours entre ses mains. Jusqu’à présent, pendant les combats, les pourparlers ont été tenus à feu doux, mais à partir d’aujourd’hui (vendredi), il secoue la poussière et augmente son activité pour examiner les différentes alternatives qu’il a entre ses mains, afin d’empêcher un nouvel échec pour remplacer le gouvernement.
Ces derniers jours, Lapid s’est concentré sur deux objectifs. Le premier : convaincre le président de Tikva ‘Hadacha, Gideon Sa’ar, de ne rejoindre en aucune façon Netanyahou, quelle que soit la proposition qui lui soit faite. Le défi est de convaincre Sa’ar et les membres de son parti qu’il s’agit d’un gouvernement à court terme dont le travail consiste uniquement à redémarrer le système.
Mais aussi convaincantes que soient ses explications, la chance que Sa’ar et tous les membres de sa faction soient d’accord avec les partis arabes est actuellement la même que la chance que Lapid soit le ministre de l’Économie du gouvernement Netanyahu. Non seulement Sa’ar a un problème avec un tel projet, mais Zeev Elkin et Sharan Haskel viennent également avec leurs propres principes. Ils n’ont pas accepté l’idée d’un changement de gouvernement en premier lieu, donc une telle composition pour eux est presque impossible.
Il y a un autre scénario sur lequel il vaut la peine de s’attarder: la création d’un bloc central de Gantz-Bennett-Sa’ar à 21 doigts qui forcera Netanyahu à «se séparer du gouvernement». Netanyahu en fera partie, sans diriger, et dans ce cadre, il terminera sa carrière de manière naturelle.
L’autre option de Lapid est d’essayer de ramener Naftali Bennett à son équipe. En l’absence d’autres alternatives, Lapid tentera de renouveler les contacts avec le président de Yemina : à la lumière de la fin de la guerre, est-il possible d’arriver à cela ? Lapid pourra désormais dire à Bennett que le président de Ra’am Mansour Abbas a en fait fait preuve de retenue lors des événements. Il a de nouveau appelé pour calmer les esprits, a visité une synagogue incendiée à Lod et est allé bien au-delà de ce à quoi on pouvait s’attendre de quelqu’un qui jusqu’à récemment faisait partie intégrante de la liste commune et a lui-même amassé pas mal de déclarations problématiques. Mais Abbas n’est pas le seul argument. L’échec national retentissant, dira Lapid, est la raison de la nécessité d’un changement de gouvernement dès maintenant, sans délai.
Pour toute personne pressée de pleurer sur Bennett – il est recommandé de se rappeler à quelle vitesse on a pleuré sur Gantz il y a un an et où il est maintenant, à quel point la carrière politique de Merav Michaeli semblait terminée et où elle en est maintenant, où Netanyahu était il y a deux semaines et où il est maintenant.
Et maintenant pour les difficultés: à partir d’hier, les responsables du bloc du changement dont Bennett ne fait plus partie se sentent trahis et ne sont pas intéressés à le convaincre de revenir à eux. Le demi-tour qu’il a fait – et en chemin a embarrassé beaucoup d’entre eux – leur a fait recalculer un itinéraire. Et la crise de confiance créée entre eux et Bennett n’est pas le seul obstacle: dans toute appréciation de la situation, se pose la question de savoir s’il a même une faction qui le suive ? La droite ne s’effondre-t-elle pas chaque fois que la possibilité de former un gouvernement avec Netanyahu est à l’ordre du jour ?
Si Lapid n’a pas d’autre moyen créatif de former un gouvernement, il devra au moins reprendre très au sérieux les intentions de Bennett et celles des membres de sa faction.
Et que se passe-t-il de l’autre côté de la carte? Un gouvernement potentiel de droite est-il maintenant sur la table d’une manière qui ne l’était pas avant les combats? Grand doute. Jusqu’à présent, le bloc de droite a affirmé que si Bennett retire le changement de gouvernement de l’ordre du jour, il y aura deux déserteurs qui rejoindront le gouvernement Netanyahu. Eh bien, huit jours se sont écoulés depuis la suppression du gouvernement du changement de l’ordre du jour et il n’y a toujours pas de déserteurs.
Mais dans l’enchevêtrement politique loin d’être une solution, il y a un autre scénario sur lequel il vaut encore la peine de s’attarder: la création d’un bloc Gantz-Bent-Sa’ar à 21 sièges qui contraindrait Netanyahou de s’associer à un «gouvernement d’adieu». Netanyahou en ferait partie, sans diriger, et dans ce gouvernement, il terminerait également sa carrière en temps opportun comme de manière naturelle.
Dans le bloc du changement, il y a maintenant ceux qui disent que c’est la minorité qui fait d’une pierre deux coups: à la fois retirer Netanyahu de la scène et laisser Bezalel Smutrich et Itamar Ben-Gvir hors du gouvernement.
Et malgré toutes ces possibilités, le scénario le plus probable pour le moment est, comme d’habitude, le tour d’élections numéro 5.