« L’Éternel appela Moché, et lui parla, depuis la Tente d’assignation… » (Vayikra/Lévitique 1,1).
Dans le Midrach (ad loc., 1,15) : « De là, nos Sages ont déduit que tout Talmid ‘hakham qui n’a pas d’esprit (da’ath : l’intelligence des choses, la raison), la charogne est mieux que lui… Cela peut être appris de Moché, le maître de la sagesse, le père des prophètes, qui a fait sortir Israël d’Egypte, qui a provoqué nombre de miracles au passage de la Mer Rouge, qui est monté au Ciel et en a ramené la Tora, et s’est occupé de construire le Tabernacle, mais n’est pas rentré pour autant en ces lieux avant d’en avoir eu l’autorisation, comme il est dit : « L’Éternel appela Moché… » »
Le message est remarquable : malgré toutes ces qualités, et quand, en plus, il est dit de lui (Bamidbar/Nombres 12,7) : « Il est digne de confiance, dans toute Ma maison », et il a mérité d’accéder au niveau de « Je lui parle Face à face, dans une claire apparition et sans énigmes ; c’est l’image de D’ Même qu’il contemple » (id. 8)… malgré tout, Moché rabbénou ne s’est pas permis de se rendre au Saint des saints, dans le Tabernacle, avant d’y avoir été invité. Et s’il s’était conduit autrement, rien de tout cela ne lui aurait servi, il aurait été d’un niveau plus bas que « la charogne » !
Le Midrach ajoute un machal : « Cela ressemble à deux voisines, l’une intelligente, et l’autre stupide. L’intelligente se rend chez sa voisine, et trouve la porte ouverte ; malgré cela, elle ne rentre qu’après avoir frappé et une fois qu’elle en a reçu l’autorisation ; alors, elle s’enquiert du bien-être de sa voisine, de son mari et de ses enfants, puis enfin demande ce qu’elle désire, emprunte un quelconque objet que l’autre lui prête avec joie. Par contre, la femme stupide trouvera la porte fermée, l’ouvrira sans plus attendre, demandera de but en blanc à sa voisine ce dont elle a besoin, et… se le verra refuser, puis repartira déçue ! »
Ainsi donc, si Moché était entré sans invitation préalable, il n’aurait pas eu droit à ce que l’Eternel S’adresse à lui, car une telle conduite témoigne d’un manque de savoir-vivre, combien même il ait été par ailleurs maître de la Sagesse et père des prophètes ! Plus que cela, le Midrach affirme qu’une charogne est préférable à une telle personne…
Le Beèr Moché complète cette idée en rapportant l’expression du Midrach (Bamidbar Rabba chap. 10), selon laquelle l’intelligence ne peut qu’amener à l’humilité, car toute personne qui est pourvue de discernement ne peut que reconnaître son insignifiance par rapport au Tout-Puissant. Or, quand une personne tire de l’orgueil de ses connaissances en Tora, elle est pire qu’une bête, qui, elle, reste au moins à son niveau réel, telle qu’elle a été créée.
Cette idée est déjà exprimée dans le verset (Tehilim/Psaumes 49,21) : « L’homme, quand il se sent fier et manque de raison, est pareil aux animaux »…
Extraits de Ohel Moche de Rav Moche Yossef Scheinerman
Kountrass numéro 173