Pour Gilles-William Goldnadel, le gouvernement peine à assumer le sujet de l’immigration, au mépris de la volonté des Français. La «cinquième question» du grand débat annoncé par Emmanuel Macron ne sera finalement pas posée.
Le président Macron vient de réaliser une prouesse indépassable: la trahison d’une promesse solennelle faite à son peuple avec une vélocité inégalable.
Le lundi, pour calmer l’incendie, lors de son allocution empreinte d’une humilité inaccoutumée que l’on n’espérait feinte, il déclarait: « Je veux aussi que nous mettions d’accord la nation avec elle-même sur ce qu’est son identité profonde, que nous abordions la question de l’immigration. Il nous faut l’affronter».
Le mercredi, un document présenté en Conseil des ministres énumérerait cinq sujets: l’écologie, la fiscalité, les services publics, la démocratie, le cinquième et dernier étant nommément «l’immigration».
Pour être encore plus clair dans son désir «d’affronter» la question migratoire, le gouvernement, écrivait sur son site: « Quelles sont les attentes et les inquiétudes des Français relatives à l’immigration, dans un contexte de mondialisation et de laïcité parfois bousculé?».
Autrement dit, le pouvoir liait sans fard la question de l’immigration à la celle de la religion, donc, en creux, de l’islam.
Mais c’était sans compter les interventions outragées du patron de la CFDT Laurent Berger et de la gauche d’En Marche, soudainement émancipées par la descente aux enfers de Jupiter, qui ruèrent dès mardi dans les brancards.
Tant et si bien que le mercredi, à 10h du matin, la Cinquième Question disparaissait purement et simplement de l’énumération. La promesse faite aux Français quarante-huit heures plus tôt de prendre de front la plus existentielle des questions était déjà foulée aux pieds.
L’explication, assez candide, donnée par Matignon livre la clé psychologique de cette débandade intellectuelle et politique exceptionnelle: « Ce sujet il ne faut pas l’éviter, parce que les «gilets jaunes» en ont fait un sujet. Mais ne pas le traiter à part. Si on en fait un sujet à part, on en fait un totem, or on sait que c’est un débat sensible» (C News).
La référence expresse au totem pour justifier la reculade confirme ainsi officiellement, de manière stupéfiante, que l’immigration doit demeurer un sujet tabou.
Comment ne pas mieux pouvoir établir l’irrationalité d’une thématique indicible que j’aurai passé une bonne partie de ma vie intellectuelle à décrire comme névrotique, puisant son caractère hystérique dans l’accusation obsessionnelle de racisme sous fond fantasmatique post-shoatique?
On remarquera que ce tabou totémique aura scrupuleusement été respecté par une grande partie de la presse mondialiste qui aura passé en pertes et profits cette cinquième question qui ne doit pas être posée, ainsi que le disait à Zola, le juge aux ordres des tabous nationalistes de l’époque.
La question ne sera pas posée, alors que selon le sondage le plus récent (4 décembre IFOP pour JDD, AJC, fondation Jean-Jaurès) près des trois quarts des Français considèrent que l’immigration coûte plus qu’elle ne rapporte. Que sept Français sur dix estiment que le pays n’a plus les moyens d’accueillir d’immigrés. Que 64 % des Français considèrent que l’immigration a un effet négatif sur les comptes publics. Qu’une majorité d’entre eux lie expressément immigration et insécurité.
La question ne sera pas posée, alors que le lien entre l’immigration et les exigences de l’islam politique a été reconnu par un chef de l’État aux abois, mais qui s’est repris depuis.
En toute hypothèse concernant sa parole.
Alors que la question du respect de la laïcité se pose cruellement en cette fin d’année, alors qu’un préfet de l’Hérault enjoint la mairie de Béziers de supprimer sa crèche, tandis qu’à Strasbourg endeuillée, nombre de mosquées salafistes radicales ne sont pas inquiétées. Qu’ainsi, et pour ne prendre qu’un seul exemple parmi dix, dans l’une d’entre elles, sont diffusés les livres du prédicateur admirateur d’Hitler, Youssef Al Qaradawi qui prescrit le meurtre des apostats et des homosexuels (cf: «Mosquées Radicales: ce qu’on y dit, ce qu’on y lit» Dominique Martin Morin éditeur, novembre 2016).
En trahissant sa promesse, le président Macron aura ainsi réussi une triple et triste démonstration.
La volonté populaire, fondement même de la démocratie, est une chimère.
Le désir des Français de vivre dans la dignité, la souveraineté et la sécurité passe après la satisfaction des exigences d’une fausse élite toujours aussi déconnectée de la réalité, même lorsque celle-ci campe dessous ses yeux.
L’idéologie névrotique qui commande encore au pouvoir politique et médiatique du moment est plus forte que tout, y compris sans doute, de l’intérêt électoral de celui qui, pour l’heure encore, est censé gouverner.
La cinquième question supprimée, dans de pires conditions, finira par être posée.
© Gilles-William Goldnadel. Publié avec l’aimable autorisation du Figaro Vox.