Les liaisons fatales de Fuad Shukr : quand la vie privée d’un haut dirigeant du Hezbollah scelle son destin
Dans une histoire mêlant espionnage, double vie et opérations militaires de haute précision, Fuad Shukr, figure éminente du Hezbollah, a été éliminé en juillet dernier à Beyrouth. Ce commandant militaire, connu pour ses décennies de loyauté envers l’organisation islamiste, a vu sa vie privée jouer un rôle crucial dans son assassinat, selon des informations dévoilées par le New York Times.
Shukr, impliqué dans des activités clandestines depuis près de 30 ans, était au cœur d’un réseau de surveillance israélienne sophistiquée. Cette surveillance aurait permis à Israël de découvrir les quatre relations extraconjugales du dirigeant terroriste. Pris de remords, Shukr aurait consulté Hashem Safieddine, dignitaire religieux influent du Hezbollah, afin de légitimer ces liaisons par des mariages religieux. Ces cérémonies, organisées par téléphone, auraient été supervisées par Safieddine lui-même, peu avant que ce dernier ne soit lui aussi éliminé lors d’une frappe aérienne en octobre.
Cependant, l’histoire a pris une tournure fatale lorsque Shukr, piégé par un appel téléphonique provenant probablement d’un infiltré, a été attiré dans un appartement au 7ᵉ étage d’un immeuble de Dahiyeh, au sud de Beyrouth. Ce déplacement inattendu a permis à Israël d’exécuter une frappe ciblée, entraînant sa mort ainsi que celle de trois femmes, dont au moins une était sa compagne, et de deux de ses enfants.
Une infiltration israélienne sans précédent
Selon le rapport, cet assassinat marque l’aboutissement de décennies d’efforts israéliens pour infiltrer le Hezbollah. Les services de renseignement israéliens auraient non seulement suivi les déplacements de Shukr, mais aussi installé des dispositifs d’écoute dans les bunkers de l’organisation et surveillé de près les interactions entre ses dirigeants. Cette collecte minutieuse d’informations visait à préparer une éventuelle confrontation militaire de grande envergure.
Même Hassan Nasrallah, chef du Hezbollah, aurait sous-estimé la capacité d’Israël à mener de telles opérations. Bien qu’averti par ses conseillers de la nécessité de quitter sa cachette souterraine, Nasrallah aurait refusé, croyant qu’Israël éviterait toute action susceptible de déclencher une guerre totale. Cette surestimation de sa sécurité personnelle s’est avérée fatale, soulignant l’efficacité du renseignement israélien.
Un parcours marqué par le terrorisme
Avant son élimination, Fuad Shukr était déjà une figure notoire du terrorisme international. Architecte de plusieurs attaques majeures, il s’était distingué dès 1983 lors de l’attentat contre la caserne des Marines à Beyrouth, qui avait coûté la vie à 241 militaires américains. En 1985, il avait orchestré le détournement du vol TWA 847, un acte destiné à exiger la libération de prisonniers détenus en Israël.
Les États-Unis avaient depuis longtemps classé Shukr comme une menace mondiale, offrant une récompense de 5 millions de dollars pour toute information permettant sa capture. En 2019, il avait été désigné comme « terroriste mondial » par le Département d’État américain, une mesure visant à entraver ses activités et son financement.
Un tournant dans le conflit avec Israël
Depuis le 7 octobre, lorsque le Hezbollah a intensifié ses attaques contre Israël, les frappes israéliennes ont éliminé environ 400 membres du groupe, dont plusieurs commandants de haut rang. Ces pertes ont forcé Nasrallah à ordonner des mesures drastiques pour protéger les communications de l’organisation, exhortant ses combattants à abandonner leurs téléphones et à adopter des protocoles de sécurité plus rigoureux.
Entre secret et vulnérabilité
Le cas de Fuad Shukr illustre les défis auxquels le Hezbollah est confronté face à une surveillance israélienne de plus en plus sophistiquée. Loin d’être un simple leader militaire, Shukr était également un homme pris dans des dilemmes personnels, dont les conséquences ont dépassé la sphère privée pour façonner le cours du conflit.
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