En décembre dernier, Bayard Presse avait été contraint de retirer de la vente un magazine pour enfants qui écrivait qu’Israël n’était « pas un vrai pays » et allait jusqu’à comparer cette démocratie à la Corée du Nord. Devant le tollé, l’éditeur avait reconnu une maladresse et expliqué qu’il ne s’agissait « absolument pas de remettre en cause l’Etat d’Israël ».
On aimerait bien le croire, mais alors comment expliquer le reportage diffusé le 9 avril sur la radio publique à destination de la jeunesse, franceinfo junior, en partenariat avec 1jour1actu ? Ce « média d’actualité destiné aux 8-12 ans » (et qui se veut aussi une source de matériel à usage pédagogique pour les enseignants) est édité par Milan Presse… filiale depuis 2004 du groupe Bayard Presse.
La radio avait invité quatre collégiens d’une classe de 5e du collège André Malraux de Ramonville-Saint-Agne, près de Toulouse, à poser leurs questions à un expert sur le thème : « Que se passe-t-il à Gaza ? ».
En 5 minutes, Jean-Paul Chagnollaud, professeur de science politique et président de l’iReMMO (Institut de Recherche et d’Études Méditerranée Moyen-Orient) et habitué des plateaux de radio et télévision, a semé autant de contre-vérités dans les jeunes esprits.
Contre-vérité n°1 : la Palestine, 26,000 km2
C’est Mariam qui pose la première question : « Mais c’est où l’Israël, c’est où la Palestine, parce que je comprends pas ? »
Jean-Paul Chagnollaud lui répond que « La Palestine ça se trouve au bord de la Méditerrannée, du côté du Liban, de la Syrie, et c’est un pays qui est tout petit, qui doit pas faire plus de 26,000 km2 ».
Faites le calcul : 26,000 km2, c’est la superficie totale de la région. Y compris les 20,770 km2 (selon Wikipédia) de l’Etat d’Israël dans ses frontières internationalement reconnues, d’Eilat au sud à Haïfa au nord. A cela s’ajoutent la Judée-Samarie / Cisjordanie et Gaza, qui occupent 6,220 km2.
Alors que Mariam a demandé où était Israël, Jean-Paul Chagnollaud lui a donc répondu sans prononcer le nom de l’Etat juif et en suggérant que tout le territoire israélien faisait partie « d’un pays » qui s’appelle la Palestine !
Logiquement vu le début de sa réponse, l’expert assure que les lieux saints de Jérusalem font partie de la Palestine : « la Palestine, ça a une très forte résonnance symbolique pour plein de raisons et aussi parce qu’il y a les lieux saints, Jérusalem, Bethléem, tout le monde connaît. » Ce qui revient à dire que le plus haut lieu saint du judaïsme, le mont du Temple, doit faire partie d’un état arabe.
Contre-vérité n°2 : la violence résulte du blocus
« Mais en fait, j’ai pas compris, c’est quoi Gaza ? », enchaîne Mariam.
Jean-Paul Chagnollaud dit juste qu’il s’agit d’un « petit bout de cette Palestine » d’environ 400 km2 et profite de la question pour aborder les conditions de vie « catastrophiques » à Gaza. « Et les difficultés qu’on voit, les violences que l’on voit aujourd’hui sont liées à cela, au fait que les Gazaouis ont envie de sortir de ce territoire dont ils sont prisonniers à cause du blocus israélien et aussi du blocus égyptien. »
Monsieur Chagnollaud, puisque vous concédez que le blocus (mis en place, il faut le préciser, par Israël uniquement sur les produits pouvant avoir un usage militaire – par exemple du métal pouvant permettre la fabrication de roquettes ou du béton utilisable dans la conception de tunnels pour attaquer des civils israéliens – mais absolument pas sur les autres biens, alimentaires, médicaux, etc.) est aussi égyptien : expliquez-nous pourquoi les violences n’ont lieu qu’à la frontière israélienne. Pas un manifestant à la frontière de Gaza avec l’Egypte.
Nous avons une explication très visuelle à vous soumettre : ce drapeau planté il y a quelques jours près de la frontière avec Israël, au coeur des rassemblements organisées par le Hamas.
L’Egypte n’est pas un pays juif, alors forcément, les aficionados de la croix gammée ne se pressent pas à ses frontières pour aller manifester leur intention d’en faire disparaître les habitants.
Car il s’agit bien de cela. La charte du Hamas, qui gouverne Gaza, est sans équivoque : l’objectif ultime du « Mouvement de la résistance islamique » (sens de l’acronyme « Hamas ») est d’éradiquer l’Etat juif. Le chef du Hamas à Gaza a déclaré à ce sujet la semaine dernière que « S’ils ont faim, les Gazaouis « mangeront le foie de ceux qui assiègent » la bande de Gaza ». C’est une haine proprement monstrueuse, qui n’a rien à voir avec des préoccupations matérielles…
Contre-vérité n°3 : les Israéliens tuent des manifestants pacifiques parce qu’ils ont peur, face aux demandes fondées des Palestiniens
Bilal continue avec une question déjà pleine de préjugés : « Pourquoi ils tuent des manifestants les Israéliens, ils leur ont pas fait de mal ? »
Là, Jean-Paul Chagnollaud avait deux choix : récuser les préjugés sur ces « massacres d’innocents », ou souffler sur les braises. Il choisit la deuxième option. On rappelle que c’est à Toulouse que Mohammed Merah a assassiné des enfants juifs français « pour venger les Palestiniens ».
Alors Jean-Paul Chagnollaud prétend que les Israéliens « tuent des Palestiniens, ils tuent des manifestants palestiniens parce que je crois qu’ils ont peur ».
Il suffit de voir que tous les morts jusqu’à présent ont été des hommes, et que le Hamas lui-même a avoué que plusieurs d’entre eux étaient des membres de ses unités militaires, pour comprendre qu’Israël ne tue pas des civils de manière indiscriminée.
Israël a d’ailleurs donné des informations très précises sur les engagements militaires avec le Hamas de la majorité des personnes tuées.
Mais pour Jean-Paul Chagnollaud, le Hamas qui est l’organisateur de ces événements est un nom à ne pas prononcer. Pas une seule fois dans la chronique il n’a mentionné cette organisation islamiste. A lui seul, cet oubli devrait être disqualifiant sur une chaine d’information !
« Nous sommes dans une guerre asymétrique et le gouvernement aujourd’hui ne voit que cette réponse aux demandes qui sont extrêmement fondées des Palestiniens de Gaza comme d’ailleurs », ajoute-t-il.
A Gaza, c’est le Hamas qui fait les demandes. Et elles n’ont rien de fondées sauf à admettre la volonté du parti islamiste de s’en prendre à l’existence d’Israël. Les violences ont lieu sous prétexte d’une « Grande marche du retour ». Le « droit au retour »est une revendication des Palestiniens qui veulent que les plusieurs millions de descendants des 700,000 Arabes qui quittèrent le futur territoire israélien en 1948 lorsque les armées arabes refusèrent l’indépendance d’Israël et l’attaquèrent immédiatement puissent « retourner » en Israël (un nombre équivalent de Juifs chassés des pays arabes n’ont jamais rien réclamé). Pour, bien sûr, en chasser les Juifs.
Jean-Paul Chagnollaud, ayant observé le silence sur les motivations du Hamas comme sur son nom, procède alors à la diabolisation des Israéliens : « Quand on entend dans la presse, « des affrontements », ce ne sont pas véritablement des affrontements, ils ne sont pas face à face ; donc en fait ce sont des tireurs très expérimentés, israéliens, qui tirent sur une foule qui est pacifique. »
Le Hamas a investi 10 millions de dollars pour cette « marche ». Les « manifestants » posent des explosifs pour tenter de créer des brèches dans la frontière (et, qui sait, de parvenir à enlever ou tuer des civils juifs de l’autre côté) ; envoient des projectiles et des cocktails Molotov ; tirent parfois à l’arme à feu ; incendient des milliers de pneus pour masquer leurs activités.
Face à ce drôle de « pacifisme », Israël défend sa frontière. La foule du premier vendredi comprenait environ 30,000 personnes. 30,000 islamistes qui, si Israël ne se défendait pas, souhaiteraient l’envahir. 17 de ces « manifestants » ont été tués, en majorité des terroristes actifs (le Hamas est considéré comme un mouvement terroriste par Israël, mais aussi par l’Union européenne !). Il va de soi que si les Israéliens tiraient dans la foule pour le plaisir ils auraient pu faire des milliers de victimes.
Y aurait-il eu moyen de faire moins de victimes ? On peut bien sûr discuter de la réaction israélienne. Mais faire passer la foule envoyée par le Hamas pour des pacifistes est un énorme mensonge. Demandez-vous comment la France réagirait si une armée de dizaines de milliers d’islamistes prêts à en découdre se présentait à sa frontière.
Ces jeunes élèves, à qui tout le contexte du conflit a été caché, risquent de grandir en croyant que les Juifs tuent des arabes pacifiques pour le plaisir. Et qui sait si un jour l’un d’entre eux n’ira pas s’en prendre à un Juif, en France, tant des gens comme Monsieur Chagnollaud lui auront fait croire que les Juifs sont des monstres qui assassinent pour le plaisir, et qui méritent donc bien qu’on les châtie…
Contre-vérité n°4 : les violences durent parce qu’Israël empêche les Palestiniens d’avoir leur Etat
C’est Gaëlle qui demande : « S’il y a une guerre, j’aimerais savoir comment elle s’est formée ? »
Pour répondre, il aurait fallu remonter à la genèse du conflit. Trop complexe pour une émission minutée, c’est vrai. Mais Jean-Paul Chagnollaud n’aidera pas Gaëlle à comprendre la situation en expliquant que les Palestiniens sont sous occupation.Déjà parce qu’à Gaza, où se déroulent les événements de ces jours-ci, Israël s’est retiré en 2005 et ce sont depuis des habitants arabes du territoire qui gouvernent (le Hamas ayant pris le pouvoir en 2007). Il n’y a pas d’occupation à Gaza !
Le spécialiste enchaîne : « la racine du conflit on peut la résumer en une phrase : c’est deux peuples qui veulent leur Etat comme tous les autres peuples. L’un l’a obtenu, l’autre pas encore et c’est pourquoi il y a ces violences aujourd’hui encore. »
Prenons quelques instants pour rappeler les grandes lignes du contexte historique, puisque Jean-Paul Chagnollaud ne l’a pas fait : ce sont les Arabes qui ont refusé le plan de partage de la Palestine voté par l’ONU en 1947 et ont immédiatement déclaré la guerre à Israël qui l’avait accepté. De 1949 à 1967, la Jordanie a occupé ce qui est devenu la « Cisjordanie », qui n’avait jamais porté ce non, ni abrité d’Etat palestinien, auparavant (alors que cette région de Judée et de Samarie fut le berceau du peuple juif – et du christianisme qui en descend – comme l’atteste le nom de la Judée). En 1967, les pays arabes coalisés avaient massé leurs armées aux frontières d’Israël pour essayer de l’envahir et l’éliminer. Israël les a attaqués préventivement et les pays arabes ont perdu la guerre. Par la même occasion, la Jordanie a perdu la Cisjordanie. N’ayant jamais accepté cette défaite, ceux qui sont devenus les Palestiniens en disputent la souveraineté à Israël. Tous les accords de paix ont depuis été rejetés par les Arabes qui ont toujours demandé le fameux « droit au retour » inacceptable pour la survie d’Israël, et Jérusalem comme capitale.
Nous ne partageons pas le constat de Monsieur Chagnollaud. Les Palestiniens de Gaza ont leur « Etat » depuis 2005. Et ils continuent à mener la guerre à Israël parce que, davantage que d’avoir une autonomie politique, leurs dirigeants veulent éliminer l’Etat juif. A notre avis, si les violences durent, c’est parce que les Palestiniens n’acceptent pas l’existence d’Israël. Ils le prouvent dans des événements comme la « marche du retour ». S’ils acceptaient une coexistence réellement pacifique, beaucoup en Israël seraient d’accord de leur donner un Etat véritable.
Contre-vérité n°5 : « il faudra, un jour, pour que les choses s’apaisent, que Jérusalem soit à la fois la capitale de l’Etat d’Israël et la capital de l’Etat de Palestine »
C’est une opinion. Pas un fait indiscutable !
Bilal demande : « Pourquoi le président américain il a dit à l’Israël que je reconnais Jérusalem comme la capitale israélienne, et les Palestiniens ils étaient pas contents ? »
Tout pays est libre de choisir où il établit sa capitale. Les institutions politiques israéliennes (parlement, etc.) sont dans la partie « Ouest » de Jérusalem, qui fait partie du territoire d’Israël depuis 1948 et que la Jordanie n’a jamais occupée. Il ne devrait pas y avoir le moindre problème pour les pays du monde entier à placer leurs ambassades dans cette partie de la ville dont la souveraineté israélienne est reconnue par la majorité des pays. C’est d’ailleurs là que devrait se situer l’ambassade américaine.
Faire de la partie « Est » la capitale de la Palestine ? Cela ne devrait se faire que si les deux parties se mettaient d’accord. Il faut bien garder à l’esprit que c’est là que se trouvent tous les lieux saints ; et pour les Juifs, le premier d’entre eux, le mont du Temple sur lequel s’élevait leur Temple il y a trois millénaires. Le dôme du Rocher et la mosquée al-Aqsa y ont été bâtis par les musulmans bien plus tard. Les chrétiens ne réclament pas de souveraineté politique sur leurs lieux saints dans la ville tandis que le premier lieu saint musulman, à La Mecque, et le deuxième à Médine ne sont eux contestés par personne… Les Juifs doivent-ils concéder à un Etat de Palestine musulman leur principal lieu saint ? Cela mérite débat.
Jean-Paul Chagnollaud ne prend de toute façon pas de risques sur cette question. Il invoque l’ONU (mais un examen sérieux de la question montre que les décisions de l’ONU ne sont pas contraignantes et ne constituent pas à elles seules le « droit international ») et reprend les arguments omniprésents en France, de la presse au Quai d’Orsay : Israël va à l’encontre du « droit international » « soutenu par le monde entier » (comme si les Etats-Unis, mais aussi des pays comme le Honduras, le Paraguay et le Guatemala qui entendent aussi déplacer leurs ambassades à Jérusalem, ne faisaient pas partie du monde entier) et la seule solution est de partager le territoire d’Israël et la ville qu’il a choisie comme capitale en deux Etats. Croit-il vraiment en cette solution ou cache-t-elle d’autres intentions ? Après sa réponse à la première question où il attribuait tout le territoire israélien à la Palestine, il est permis d’en douter !
Conclusion
La photo qui illustre l’interview provient de Saïd Khatib, photographe de l’AFP à Gaza.
Un militant dont InfoEquitable a démontré il y a seulement une semaine qu’il avait photographié une mise en scène grossière pour accuser les Israéliens de tirer sur les habitants de Gaza.
Saïd Khatib comme Jean-Paul Chagnollaud oeuvrent sans le dire pour le Hamas. L’un en diffusant sans vergogne des photos de propagande (on habitue l’œil des occidentaux à la vue de drapeaux israéliens brûlés – en attendant de pouvoir brûler le peuple à l’étoile de David ?), l’autre en occultant complètement les motivations et même le nom du Hamas qui s’est juré de détruire Israël.
C’est indigne de la mission d’une radio de service public.
C’est indigne d’une maison d’édition qui prétend « ne pas remettre en cause l’existence de l’Etat d’Israël ».
C’est de nature à favoriser la haine des Juifs, en France et en Europe. Et on sait aujourd’hui qu’elle peut être mortelle.
C’est encore plus grave lorsque cela s’adresse aux enfants ou aux adolescents.
Et qu’un établissement de l’Education nationale se prête (même si cela pouvait partir d’une envie pédagogique sincère) à cet exercice.
Pour faire connaître votre désaccord face à ce véritable endoctrinement de la jeunesse sur les ondes du service public, Radio France peut être contactée ici. 1jour1actu (Milan Presse) peut être contacté ici et Bayard Presse ici. Et le collège André Malraux de Ramonville-Saint-Agne ici.
Source infoequitable.org