Exigence de groupes d’extrême-droite d’exhumer les morts de Jedwabne

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Illustration : le monument souvenir des victimes du pogrom de Jedwabne

 

Des groupes d’extrême-droite exigent que l’on se livre à une exhumation de corps de Juifs tués à Jedwabne, en Pologne, afin de déterminer finalement qui en est responsable. Cette demande trouble évidemment la communauté juive jusqu’au plus profond de son âme : comment imaginer une telle conduite, juste pour éventuellement déculpabiliser les descendants d’éventuels criminels ?

 

Quelques détails (extraits de Wikipedia) : le pogrom de Jedwabne entraina le massacre des habitants juifs de cette localité et de ses environs en juillet 1941 au cours de la Seconde Guerre mondiale. Après avoir été longtemps attribué aux Einsatzgruppen allemands, il a été établi par l’Institut de la mémoire nationale que ce crime a été commis par des civils polonais, peut-être à l’instigation des troupes allemandes. L’implication de celles-ci dans ce massacre fait toujours l’objet de controverses entre historiens.

 

Lors de l’invasion de l’Union Soviétique en juin 1941, les troupes allemandes envahissent l’Est de la Pologne. Dans ces territoires, les nazis diffusent de la propagande antijuive accusant les Juifs polonais d’avoir participé aux crimes commis par les Soviétiques en Pologne.

Après l’invasion de juin 1941, les nazis déploient en Pologne orientale des Einsatzgruppen créés par Heinrich Himmler et Reinhard Heydrich pour traquer et éliminer les opposants et les Juifs. Celui-ci assassine notamment plusieurs dizaines de Juifs dans la petite ville de Wizna, près de Jedwabne, au Nord-Est de la Pologne.

Un certain nombre de personnes ayant soutenu l’Union des républiques socialistes soviétiques avant le début de l’Opération Barbarossa sont assassinées par des habitants de la région de Jedwabne dans les premiers jours de l’invasion allemande.

Un mois plus tard, dans la matinée du 10 juillet 1941, des habitants de Jedwabne et des alentours raflent les Juifs de la ville ainsi que ceux qui y ont trouvé refuge en provenance de localités voisines comme Wizna et Kolno, soit entre 800 et 900 personnes.

Les Juifs sont rassemblés sur une place au centre de la ville où ils sont agressés et battus. Un groupe de quarante à cinquante Juifs sont forcés de détruire une statue de Lénine avant d’en porter les morceaux à travers la ville en chantant des chants soviétiques. Le rabbin est obligé de conduire ce défilé jusqu’à une grange dans laquelle le groupe est brûlé vif. Les victimes sont ensuite enterrées dans une fosse commune, avec les fragments de la statue. Les habitants s’accaparent les biens juifs.

Cette terrifiante bouffée de haine semble avoir été partiellement motivée, sans compter l’opportunité de récupérer leurs maisons, par la collaboration, avec les autorités soviétiques, et parfois le NKVD, de certains Juifs qui avaient accueilli plus tôt (17 septembre 1939) avec enthousiasme l’invasion de la Pologne par l’Armée rouge.

 

Les procès après guerre

En 1949 et 1950, un certain nombre de citoyens de Jedwabne sont accusés de collaboration avec les nazis et traduits en justice. L’un des accusés est condamné à mort puis voit sa peine commuée en peine de prison ; 9 autres accusés sont condamnés à des peines de prison et 12 acquittés.

Ces procès et condamnations ne sont pas remis en cause après la chute du régime communiste polonais en 1989.

 

Enquête et controverse

Jusque dans les années 1997-2000, le massacre de Jedwabne est attribué aux « Einsatzgruppen ». Les documentaires d’Agnieszka Arnold, Ou est mon frère aîné, Caïn? et Les voisins, essai historique du sociologue juif Jan T. Gross, établissent qu’il s’agit d’un pogrom.

Contrairement à nombre d’experts, Gross conclut que les Juifs de Jedwabne ont été encerclés, malmenés ou brûlés par leurs voisins polonais, sans intervention des Einsatzgruppen ou des autres troupes allemandes. Il estime à 1 600 le nombre des victimes, nombre rabaissé depuis à près de 340 victimes – même si le monument commémoratif de Jedwabne continue de reproduire l’ancien nombre de victimes.

Le livre de Gross a, sans surprise, suscité une énorme controverse en Pologne, de nombreuses personnes, dont des historiens mettant en cause ses conclusions. Tomasz Strzembosz, professeur d’histoire à l’université catholique de Lublin et à l’institut de sciences politiques de l’académie polonaise des sciences, soutient que si des Polonais ont bel et bien participé au massacre, celui-ci a été dirigé par des troupes allemandes.

L’Institut polonais de la mémoire nationale, dans un rapport paru en 2001, soutient une partie des éléments repris par Gross mais estime que le nombre des victimes est nettement inférieur à 1 600, s’élevant au minimum à 340 personnes. La confirmation du nombre exact de victimes a été rendue impossible par l’opposition des autorités religieuses juives à l’exhumation des corps. L’Institut a également découvert que 8 membres de l’Ordnungspolizei étaient présents lors du massacre, ce qui laisse la question de l’implication allemande ouverte. De nombreux témoins affirment qu’ils ont vu des soldats de la Wehrmacht à Jedwabne le jour du massacre, alors que d’autres affirment le contraire.

L’implication active des Polonais dans ce massacre reste incertaine, de même que celle d’unités allemandes. L’institut estime que le crime doit être imputé aux Allemands, avec la participation d’au moins 15 Polonais.

En 2001, le président de la République de Pologne, Aleksander Kwaśniewski, a officiellement présenté les excuses de la Pologne aux Juifs pour ce crime. Ces excuses ont provoqué des critiques, certains considérant qu’il s’agissait d’un massacre uniquement perpétré par les troupes allemandes, d’autres que la Pologne n’avait pas à présenter des excuses pour l’acte d’une minorité. Au moment de la prise de position du président, l’enquête de l’Institut de la mémoire nationale était toujours en cours.

 

La question de l’exhumation est donc à nouveau posée. Espérons qu’elle sera enterrée le plus rapidement possible.

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