David Vallat ex-djihadiste et militant anti-radicalisation était dimanche l’invité d’Elie Chouraqui sur i24NEWS.
Né de mère française et de père juif italien, originaire d’Isère, Vallat s’est converti à l’Islam à l’âge de 15 ans. A 22 ans, il intègre le Groupe islamique armé algérien (GIA), et se radicalise.
Il est arrêté en août 1995 pour son implication dans l’attentat du RER à la station St Michel à Paris en juillet de la même année.
Comment un musulman, fervent adepte de la laïcité a basculé dans la radicalisation avant de s’en extirper? De quelle manière la France a pu fermer les yeux sur ces jeunes français devenus aujourd’hui les ennemis de la République?
Retrouvez une partie de cet entretien, ainsi que le replay.
Elie Chouraqui : Pourquoi avoir choisi la voie de l’islam?
David Vallat : « Je n’entendais rien à la Trinité, le mystère ne me satisfaisait pas. Je suis tombé sur la profession de foi musulmane et ça m’a paru d’une telle clarté que j’y ai adhéré totalement. Pour le judaïsme, ça demandait un état d’esprit particulier que je n’avais pas. On devient musulman facilement, en attestant qu’il n’y a qu’un seul Dieu et que Mohammed est son prophète. Cela s’est fait sur un banc avec deux témoins.
A 19 ans, j’ai commencé à pratiquer et je me suis fait la promesse en voyant le film ‘Nuit et Brouillard’ que si l’Histoire se répétait je ferai partie du camp de ceux qui combattent. »
Elie Chouraqui : Comment les djihadistes vous ont-ils fait basculer dans la radicalisation?
David Vallat : « A la mosquée, on me montrait des cassettes et en 1992, des agents d’Al-Qaida ont recruté. Puis en 1993, je suis parti pour la Yougoslavie. J’ai dit à ma mère que je m’engageais dans l’humanitaire. J’y suis allé avec la volonté de combattre aux cotés de la communauté opprimée. Sauf que quand je suis arrivé là-bas, j’ai été terrorisé par ce que j’ai vu. J’en fais encore des cauchemars. Je revois un village brulé avec les chaussures sur les seuils des maisons en ruine, seule la mosquée a été épargnée.
Quand je suis rentré en France, on m’a dit qu’il fallait que je suive un entraînement en Afghanistan. J’ai passé 10 mois en zone tribale, c’était très facile de s’y rendre, simplement à l’aide d’une attestation. Puis l’endoctrinement a commencé.
Avant le départ, c’est avant tout humaniste. Puis arrivé sur place, c’est cent pourcent djihadiste. On a besoin de valider le fait que si l’on meurt, on sera martyr, pour apaiser la peur du terrain. Notre imam nous forme à cela: si je meurs en martyr, je ne craint plus d’aller au combat.
Les djihadistes donnent un sens à leur mort car leur vraie vie vient après. Sinon, sans croire à cela vous n’agissez pas. Ils nous promettent le paradis, la récompense dans l’au-delà. Cela se fait par étape. D’abord il faut valider qu’il y a une injustice, il faut faire valoir l’usage de la violence comme un objet politique. Petit à petit, on cautionne des options de plus en plus violentes. »
Elie Chouraqui : Pourquoi ne pas avoir empêché l’attentat de 1995?
David Vallat : « On ne m’aurait pas cru. Je n’avais pas d’éléments probants à donner donc je me serais exposé à la prison sans pour autant empêcher les terroristes de commettre l’attentat.
Vous ne pouvez pas combattre sans intégrer le fait qu’il y aura des victimes civiles, mais il y a deux manières de voir les choses : ceux qui disent qu’il faut des victimes collatérales et les autres qui pensent qu’elles seront un objectif. Certains veulent s’en prendre aux représentations de l’Etat et d’autres veulent s’attaquer aux civils directement. Moi, j’étais contre l’Etat. Le 25 juillet 1995, j’ai pris conscience que j’étais allé trop loin dans l’embrigadement. »
Elie Chouraqui : Que dire aux jeunes qui se radicalisent?
David Vallat : « Les mots ont une force, il faut d’abord nommer les choses pour ce qu’elles sont. En France, nous avons cette culpabilité de penser que les Musulmans sont des bébés phoques qu’il faut protéger. »
Source www.i24news.tv