Indignation après le soutien de Rafi Peretz à la thérapie de conversion LGBT : il a été cloué au pilori par l’opposition avec des appels multiples à sa démission ; pour Netanyahou, ces propos « inacceptables » ne reflètent pas la position gouvernementale.
Un sujet où toute intervention qui ne colle pas à la « pensée généralement établie », surtout en une période terreur en provenance des groupes de la fierté, coûte très cher. Dommage, le rav Rafi Pérets a raté une occasion de se taire.
Dans des propos qui ont été diffusés Chabbath (!) à la télévision, le nouveau ministre de l’Education Rafi Peretz a fait savoir qu’il soutenait les thérapies de conversion pour les jeunes homosexuels, clamant que lui-même avait été amené à expérimenter cette pratique quand il était éducateur.
Ces paroles de Peretz, ancien grand rabbin de Tsahal et leader du parti national-religieux HaBayit HaYehudi, ont suscité l’indignation de ses opposants politiques et entraîné des réprimandes de la part du chef de gouvernement Benjamin Netanyahou et du ministre de la Justice Amir Ohana, qui est le premier ministre ouvertement gay de l’histoire du pays.
« Je respecte tous les individus quels qu’ils soient », avait-il dit. « En tant que rabbin en Israël, je reconnais que notre Bible dit des choses différentes [au sujet de l’homosexualité]. Mais cela ne signifie pas que je catégorise les homosexuels. »
Il avait ajouté qu’il avait « une très grande connaissance des thérapies de conversion » et qu’il en avait lui-même dirigées.
Ces déclarations ont été vivement condamnées par les députés et il a été rapidement réprimandé par Netanyahou.
« Les propos tenus par le ministre de l’Education sur la communauté gay sont, à mes yeux, inacceptables et ils ne reflètent pas le positionnement adopté par le gouvernement placé sous mon autorité », a commenté Netanyahou dans un communiqué.
« Je me suis entretenu dans la soirée avec le rabbin Rafi Peretz, qui a établi clairement que le système d’éducation israélien continuera à accepter tous les enfants… indépendamment de leur orientation sexuelle », a-t-il ajouté.
Au cours de l’interview, Peretz avait expliqué avoir répondu à un étudiant qui lui avait confié être homosexuel de cette façon : « Tout d’abord, je l’ai pris dans mes bras et je lui ai dit des choses très réconfortantes. Je lui ai dit : ‘Viens, réfléchissons, apprenons ensemble, réfléchissons ensemble’. Il devait, avant tout le reste, apprendre à se connaître lui-même puis prendre sa décision », a continué Peretz.
« Je lui ai donné les informations nécessaires et je lui ai dit : ‘Ecoute-moi, au point où nous en sommes, je vais te laisser. Tu vas te décider’, » a poursuivi Peretz.
Il n’a pas précisé à quelles informations il faisait référence.
Peretz a noté qu’il ne « touchera pas » au financement par son ministère du groupe de la Jeunesse gay israélienne.
Mais alors qu’il lui était demandé s’il permettrait encore à ses représentants de prendre la parole dans les écoles de tout le pays, Peretz a déclaré qu’il souhaitait étudier leur « message » avant de prendre une décision.
Le ministre qui, au début de la semaine, avait suscité l’indignation lorsqu’il avait déclaré que le taux de mariages mixtes chez les Juifs américains pouvait être considéré « comme une seconde Shoah », a diffusé un communiqué de clarification deux heures après la diffusion de l’entretien, soulignant qu’il n’avait pas dit que les parents devaient envoyer leur enfant suivre une thérapie de conversion.
« Au cours de toutes les années de ma carrière d’éducateur, j’ai rencontré des étudiants qui se trouvaient dans une détresse terrible en raison de leur orientation sexuelle et qui avaient fait le choix de se tourner vers un professionnel pour en changer », a-t-il noté dans son communiqué.
« Ce que j’ai dit au cours de l’interview ne relevait que de ma connaissance personnelle de cas similaires », a-t-il précisé, ajoutant que le ministère continuerait à accueillir tous les enfants israéliens, quels qu’ils soient.
Ohana, ministre de la Justice, a estimé que ces clarifications n’allaient pas assez loin, avertissant que des vies pouvaient être mises en péril par les déclarations qui avaient été faites par Peretz.
« Des chercheurs en psychiatrie sérieux ont tous adopté le positionnement que, non seulement il n’y a aucune nécessité de ‘convertir’ l’orientation sexuelle d’un individu, mais que ce processus est nuisible et peut entraîner chez les jeunes des souffrances susceptibles de mener au suicide », a-t-il noté dans un communiqué.
« Monsieur le ministre de l’Education, les jeunes de l’Etat d’Israël et notamment les jeunes, oui, issus de la communauté nationale-religieuse, vous observent », a-t-il ajouté.
« Les jeunes issus de la communauté LGBT se suicident à un niveau qui est trois fois supérieur à celui de la population dans son ensemble », a-t-il continué.
Les paroles de Peretz ont également été dénoncées avec fureur par les activistes et les politiciens LGBT. Certains ont appelé à sa démission.
« Vous n’êtes pas ministre de l’Education, vous êtes ministre de l’obscurantisme », a écrit sur Twitter le leader du Meretz Nitzan Horowitz, qui est lui-même homosexuel.
« La vie des ces individus leur appartient », a ajouté le politicien de gauche qui a souligné que la thérapie de conversion pouvait mener au suicide les jeunes LGBT.
Horowitz a réclamé la démission de Peretz.
Le leader travailliste Amir Peretz a pour sa part estimé, dans une déclaration, que les propos tenus par le ministre de l’Education n’étaient « ni humanistes, ni juifs ».
Itzik Shmuli, issu des rangs du Parti travailliste et homosexuel, a expliqué « qu’aucune thérapie de conversion ne pouvait guérir d’opinions ancrées dans un tel obscurantisme » et il a conseillé aux parents de « surveiller de près ce qui sera pratiqué dans les crèches et dans les écoles ».
Ehud Barak, fondateur et responsable du parti démocrate israélien, s’est demandé sur Twitter si le pays était revenu « au Moyen-Age ».
Benny Gantz, à la tête de Kakhol lavan, a déclaré pour sa part que les paroles de Peretz étaient « illégitimes » et a réaffirmé le droit de l’individu à vivre de la manière dont il le décide, rappelant que ce droit était la « fondation même de la démocratie israélienne ».
Le numéro 2 de Kakhol lavan, Yair Lapid, a pour sa part écrit sur Twitter qu’il était impossible que Rafi Peretz reste à la barre du ministère de l’Education « avant qu’il ne subisse lui-même une thérapie de conversion pour abandonner ses idées obscurantistes et folles ».
A la droite du spectre politique mais en dehors du gouvernement, le député Oded Forer du parti Yisrael Beytenu – qui avait été le premier membre de sa formation à assister à un défilé de la Gay pride cette année – a noté sur Twitter que « le gouvernement a déraillé il y a déjà longtemps ».
Ohad Hizki, directeur du groupe LGBTQ Aguda-Israel, a appelé Peretz à quitter ses fonctions.
« Il n’est pas possible que les enfants israéliens soient exposés à ce poison qui est disséminé par ceux qui prétendent s’engager dans l’éducation et dans les valeurs », a noté l’organisation dans un communiqué.
Au cours de l’entretien également, Peretz a déclaré que, sous son autorité, le ministère de l’Education se veillerait à s’assurer que les jeunes Israéliens aient une bonne connaissance de leur patrimoine.
« Quand ils apprendront la Bible et à identifier ce peuple, ses personnalités et ses vertus morales, ils voudront assurément afficher plus de loyauté envers la nation et mieux la servir », a-t-il dit.
Il a également fait part de son soutien à l’annexion de la Cisjordanie toute entière, sans accorder de droit de vote aux Palestiniens. Peretz a assuré que le gouvernement « répondra à tous les besoins » de ses non-citoyens, mais que ces derniers ne seraient pas autorisés à prendre des « décisions politiques ».
Alors qu’il lui était demandé si une sorte « d’apartheid » ne serait pas ainsi mis en place, il a cité une « réalité très complexe », ajoutant que « nous devrons trouver des solutions : où est la souveraineté, ce sur quoi elle sera décrétée – la population, les terres… »
Réagissant à ces commentaires, la députée de Hadash-Taal, Aida Touma-Sliman, a estimé que « le retrait des valeurs démocratiques a nécessairement pour résultat le retrait des droits civils ».