Le viol d’une jeune fille juive de douze ans à Courbevoie (notre photo, quai de la Seine), samedi dernier, parce qu’elle est juive, par trois adolescents, n’est pas qu’un fait divers de plus dans une actualité nauséeuse. Il illustre notre temps, il dit notre époque, il témoigne de l’abjection banalisée dans notre vie quotidienne. Les faits sont à la fois terrifiants et en même temps devenus banals. Peut-on continuer à se réveiller le matin, à boire notre café en apprenant ce type de nouvelles sans réagir, comme si cette barbarie faisait désormais partie de nos vies ? Cette nouvelle ajoute de l’horreur à l’horreur de ce qu’est devenu notre monde.
Faut-il s’inquiéter ? De quoi faut-il avoir le plus peur ? De quoi ? De qui ? D’une menace fasciste ? De la guerre civile ? De la guerre en Ukraine ? Du changement climatique ? De la menace islamiste ? Quelles sont les priorités ? Quel est l’ordre des urgences ? Qui est le pire ? Qui est porteur de la peste et qui porte le choléra ?
Brutalement voilà que le paysage français est devenu angoissant tant ce qu’on apprend tous les soirs au 20 heures annonce de menaces nouvelles. Qu’une jeune fille de douze ans soit agressée et violée par d’autres gamins de son âge parce qu’elle est juive est une nouvelle tout simplement terrifiante. En prend-on la mesure ? Qu’est-ce qui s’est détraqué dans notre société ?
En 2012, à Toulouse, trois enfants juifs avaient été assassinés par Mohamed Merah, qui devait déclarer “avoir voulu venger la mort d’enfants palestiniens”. Ce viol obéit-il à une logique similaire ? Qu’est-ce que ces violeurs de treize ans ont dans la tête ? Quel poison ont-ils consommé ? Qui le leur a fourni ?
Il y a quinze jours il était paraît-il question de l’Europe. Bel enjeu, beau défi, bel horizon. Est-ce au sujet de l’Europe, toutes perspectives confondues, que s’est manifesté dans les urnes un tel rejet du pouvoir actuel ? Ce vote correspondait-il à l’enjeu posé ?
Les incantations actuelles contre le “fascisme” qui ne doit pas passer correspondent-elles à une sorte de crise de nerf dont la France a le secret ? Pourtant il y en a eu des débats et pas seulement parlementaires… Des “grands débats” tous plus “citoyens” les uns que les autres, de Commissions en Groupe d’experts, de consultations civiques, il a été proposé au peuple une multitude de rencontres pour analyser, comprendre et proposer. De COVID en Gilets jaunes, d’émeutes urbaines en trafics de drogue, de nouvelles questions sont apparues dans notre société avec souvent des réponses venues d’en haut sans que en bas on eût à y redire. Est-ce cela qui ne va pas ? Est-ce cela qui exaspère la France périphérique ?
Aujourd’hui l’hétérogénéité culturelle double l’hétérogénéité sociale dans une cohabitation de plus en plus conflictuelle des mentalités par trop différentes. L’insécurité culturelle complète l’insécurité des voisinages. Le “séparatisme” se nourrit d’un substrat idéologique nouveau attisé par les réseaux fréristes islamistes. Quand un “jeune” de dix-sept ans est tué par la police après une course poursuite, les banlieues s’enflamment. Naël est-il pour autant un martyr de “la police qui tue” ? La gauche au grand cœur qui a fait de l’antiracisme sa dernière colonne vertébrale refuse de regarder cette réalité en face et refuse de constater qu’il y a des mauvaises herbes dans la “diversité”.
Il faut croire que ce qui idéologiquement déplait au progressisme n’existe pas. Ni Khaled Kelkal, ni Mohamed Merah, ni les frères Kouachi, ne sauraient être comptables de leur misère sociale. Leur enfance misérable serait la cause exclusive de leur dérive terroriste. Ilan Halimi, Sarah Halimi ont été victimes de cette haine banalisée dont seule la psychiatrie devrait rendre compte ? Ce sont bien des jeunes issus de l’émigration maghrébine, déséquilibrés et séduits pas l’islam radical, qui ont semé la terreur en France depuis 2012. De Charlie hebdo au Bataclan, c’est au nom de l’islam, au nom de la Palestine qu’une violence ethno-religieuse, souvent anti-juive, s’est imposée. Avec constance les média autant que le pouvoir politique n’ont pas, dans un premier temps, osé regarder cette réalité en face, pas plus qu’il n’ont osé la nommer.
Pour ne pas paraître “islamophobe”, c’est une culture du déni de cette réalité qui simultanément a alimenté le rejet du signe arabe ou musulman, pour le plus grand bénéfice des votes d’extrême droite. La guerre à Gaza n’a fait que cristalliser cette fracture. En considérant que le Hamas menait une “juste lutte”, défendant une “juste cause”, Mélenchon et ses insoumis ont fourni une légitimation aux atrocités commises contre Israël le 7 octobre 2023. La culture du déni de cette réalité a été la marque de tous les pouvoirs. Les euphémismes se sont empilés pour ne pas nommer le réel parce que ce réel était idéologiquement incorrect. Les territoires perdus de la République n’ont fait que s’élargir malgré les rapports qui en dressaient le constat.
Dès lors faut-il s’étonner de voir le succès de ceux qui ont osé le faire ? Faut-il considérer cette évidence comme fausse parce que ce serait l’extrême droite qui la dirait ? Il y a désormais dans notre société une banalisation des mentalités venues du Maghreb, où l’hostilité aux Juifs est l’héritage du statut de dhimmi pour les Juifs en terre d’islam. Le conflit israélo-palestinien a surdéterminé cette relation. C’est sur ce terreau qu’un projet islamiste a pris racine en conflit avec une société française sécularisée dont les usages autant que la manière de vivre, les coutumes, ont constitué autant d’objets à haïr. Que signifie cette multiplication des tenues islamistes sinon autant de signes de rupture ? Quelle sorte de drapeau brandissent ces femmes ? Il ne faut pas être grand clerc pour le comprendre car au bout du compte c’est bien la vision républicaine de la société française, laïque, universaliste, démocratique qui est attaquée. Pour ne pas avoir osé le dire clairement, la République n’a fait que perdre ses territoires laissés en jachère à la fois pour l’islam conquérant mais aussi pour le meilleur bénéfice d’un RN en embuscade.
D’une manière aussi irresponsable que cynique, Mélenchon et les siens ont trouvé stratégiquement malin d’utiliser la Palestine pour capter et affermir leurs scores dans les “quartiers”. Les discours, les positions développées par LFI durant la campagne des européennes ont toutes présenté une attitude obsessionnellement anti-israélienne et ont fait de la Palestine l’unique objet de leur soutien. Loin de soutenir ce qui aurait pu être un choix équilibré en faveur de la paix, LFI a soutenu sans complexe le Hamas en gommant les crimes commis le 7 octobre 2023. Considérant que ce mouvement menait des actions de “résistance”, LFI a persisté dans son soutien à un projet d’éradication d’Israël.
Comment des démocrates français peuvent-ils s’associer avec un tel parti ? Comment peuvent-ils serrer la main de tels individus ? Comment osent-ils baptiser “Front populaire” un tel pacte ?
Cette alliance est non seulement imbécile, défendant un programme aberrant, elle est surtout abjecte, faisant de ce qui reste du PS une formation de doriotistes en manque de strapontins à l’Assemblée nationale. Cette alliance avec ces extrêmes islamo-gauchistes, c’est-à-dire avec ceux qui ont ajouté l’argumentaire islamiste à la radicalité gauchiste, crée un précédent mortifère pour ce qu’on pouvait espérer d’un renouveau de l’idée progressiste. S’allier avec les amis du Hamas creuse encore plus profondément le tombeau de la Gauche. Prétendre que celle-ci “a fait son devoir” ajoute le ridicule à au mensonge. Qu’un ancien Premier Ministre et qu’un ancien Président de la République se joignent à cette mauvaise farce est consternant. Le PS, Place Publique de Glucksmann, prétendent avoir fait ce choix en fonction d’une hiérarchisation de la menace contre la République sans se rendre compte que cette alliance, supposée progressiste, devient elle-même une menace prioritaire au plan intellectuel, politique et moral. Il n’y a pas, il ne peut y avoir de compatibilité avec les amis du Hamas, il n’y a pas de cohabitation possible avec les amis de Hugo Chavez, il ne peut y avoir d’alliance avec des poutino-compatibles. Ce serait insulter le legs de Marc Bloch, de Léon Blum ou de Pierre Mendes-France à l’idée républicaine. Est-il déjà trop tard ? Le ver a-t-il déjà dévoré le fruit ? Cet ectoplasme progressiste n’annonce pas une prévisible “étrange défaite” mais une défaite certaine.
La nôtre, pour nous tous.