Elections allemandes : qui sont les principaux rivaux de Merkel et quelles sont leurs chances ?

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Si Angela Merkel fait figure de grande favorite, on ignore encore le parti avec lequel elle s’alliera. Tandis que le SPD, les libéraux et les Verts se battent pour prétendre au poste, la gauche radicale et l’AfD espèrent incarner l’opposition.

Les Allemands éliront indirectement le 24 septembre prochain, quelques mois après les Français et les Américains, leur nouveau dirigeant. Les élections fédérales, qui se tiennent tous les quatre ans outre-Rhin, revêtent cette année un caractère particulier. En pleines négociations sur le Brexit, et alors que l’Allemagne se verrait bien, face aux Etats-Unis de Donald Trump, faire évoluer son leadership européen vers un rôle mondial de premier plan, l’élection à venir s’annonce d’ores et déjà cruciale.


Depuis le début de son troisième mandat en 2013, Angela Merkel est systématiquement donnée gagnante par les différents sondages et malgré des difficultés liées à la crise migratoire, sa popularité semble tenace. Son parti a d’ailleurs remporté toutes les élections régionales organisées cette année, parvenant même à ravir au Parti social-démocrate (SPD) son bastion de Rhénanie-du-Nord-Westphalie. Si les commentateurs y voient les meilleurs augures pour la chancelière, candidate à un quatrième mandat, les élections du 24 septembre recèlent un enjeu crucial : elles détermineront la couleur de l’alliance qui dirigera l’Allemagne dans les quatre années à venir.

En effet, même avec une victoire large, il est improbable que l’Union chrétienne-démocrate (CDU) d’Angela Merkel obtienne la majorité absolue : depuis 1949, le parti majoritaire a toujours dû gouverner en formant une coalition avec un autre parti. De cette configuration à deux ou trois partis dépend généralement l’inflexion donnée à la politique de l’exécutif : de quoi motiver les principaux opposants à Angela Merkel à faire campagne. D’autant que la CDU, si son avance devait se révéler plus faible que prévue sur ses rivaux, pourrait bien être délogée du pouvoir par une alliance dont elle serait exclue.

Martin Schulz : le social-démocrate qui rêve de créer la surprise

En 2013, le SPD a accepté de former une coalition de centre gauche / centre droit avec la CDU, renonçant à gouverner avec les Verts et le parti de gauche radicale, Die Linke, alors qu’une telle alliance de gauche aurait été arithmétiquement majoritaire. Ce choix, marquant un virage centriste assumé, semble ne pas avoir profité au SPD au cours de la mandature qui s’achève.

En effet, même s’il affichait ses désaccords avec la CDU,le SPD n’a jamais rompu son alliance avec le parti d’Angela Merkel, entretenant un flou quant à son positionnement et à sa détermination, déroutant une partie de l’électorat de gauche. Confronté aux difficultés d’un parti qui gouverne sans pouvoir profiter du bilan économique que la CDU met à son propre crédit, le SPD a pourtant quelques victoires à son actif, comme l’introduction d’un salaire minimum en 2014.

Ce sont ces quelques mesures arrachées à une coalition dirigée d’une main de fer par Angela Merkel qui laissent espérer à Martin Schulz, la tête de liste du SPD, un regain de popularité auprès de l’électorat de gauche. Le SPD entend prouver qu’il n’a pas joué le rôle de l’idiot utile pendant quatre ans. Pour cela, il a décidé d’afficher un programme marqué à gauche, s’inspirant de la ligne suivie non sans succès par Jeremy Corbyn au Royaume-Uni. Droit de vote à 16 ans, maintien de la retraite à 67 ans, financement de l’assurance maladie à égalité entre salarié et employeur, limitation de la flexibilité au travail… Martin Schulz assure vouloir mettre fin à la parenthèse libérale ouverte par son parti depuis l’époque de Gerhard Schröder, au début des années 2000.

Martin Schulz ne parvient cependant pas à se poser en favori. Il peine même à se forger une image de challenger crédible. Distancé de 17 points par Angela Merkel dans les derniers sondages, l’ex-président du Parlement européen lutte contre une image d’opportuniste que les médias, qui l’ont surnommé «le gentil populiste», ne manquent jamais de rappeler : issu de la droite du SPD, favorable au traité de libre-échange translatlantique TAFTA et ayant régulièrement défendu des mesures proposées par la droite européenne à Strasbourg, sa campagne ancrée à gauche ne convainc pas. Trop libéral pour la base des électeurs de gauche, trop interventionniste pour les électeurs libéraux et trop progressiste pour les conservateurs, celui qui a avoué rêver devenir le Macron allemand semble payer les ambiguïtés de son parti.

Les libéraux du FDP, en quête d’une résurrection politique

Relativement méconnu hors d’Allemagne, le Parti libéral-démocrate (FDP) a pourtant gouverné l’Allemagne pendant plus de quarante ans, tantôt allié à la CDU, tantôt au SPD, se posant comme le pivot central de la vie politique du pays, faiseur de coalition et donc de chancelier. Brutalement évincé de la politique nationale en 2013, après une très lourde défaite (il n’avait pas obtenu les 5% nécessaires pour être représenté au Parlement), le FDP espère revenir en force et récupérer son rôle déterminant.

Son candidat au poste de chancelier, Christian Lindner, a en tout cas décidé de jouer le trouble-fête dans une élection qu’il ne veut pas croire jouée d’avance. En effet, s’il reste fidèle aux grandes lignes de son parti que sont le libéralisme économique, le fédéralisme européen et le progressisme sociétal, Christian Lindner a jeté un pavé dans la mare début août dernier, en se disant favorable à la levée des sanctions européennes contre la Russie. « La sécurité et la prospérité de l’Europe dépendent notamment de nos relations avec Moscou », avait-il déclaré, déclenchant un concert de condamnations de la classe politique allemande, à l’exception du parti de gauche radicale Die Linke. Faut-il y voir une véritable divergence avec le programme de la CDU, sachant qu’on reproche souvent à celui du FDP d’en être une copie, ou une simple manœuvre de communication d’un parti qui continue de dénoncer «l’annexion illégale de la Crimée» ?

Quoi qu’il en soit, le FDP a le vent en poupe. Crédité de plus de 10% d’intentions de vote dans les derniers sondages, le Parti libéral profite de l’espace libre laissé après le virage à gauche du SPD. Tirant également parti d’un renouvellement important de ses figures médiatiques après la débâcle de 2013 et capitalisant sur la lassitude de l’alternance CDU-SPD, le FDP espère décrocher une place dans une coalition aux côtés de la CDU. Après des performances électorales plus que satisfaisantes aux élections régionales du printemps 2017, le parti libéral gouverne deux régions aux côtés du parti d’Angela Merkel et veut y voir un signe prometteur pour le 24 septembre prochain.

Les Verts et Die Linke : les deux outsiders qui entendent peser

Die Linke et le parti écologiste se ressemblent sur de nombreux points : dénonçant les politiques d’austérité conduites par la CDU et le SPD depuis plusieurs années, opposés au TAFTA et favorables à une réorientation de la politique sociale européenne, ils défendent des mesures sociétales très proches, notamment en matière d’immigration ou de droits des minorités. Pour le poste de chancelier, les deux partis ont d’ailleurs choisi de présenter chacun un tandem composé d’un homme et d’une femme (dont l’un des deux devra se désister en cas de victoire) plutôt qu’une tête de liste unique.

Les similitudes ne dissimulent cependant pas de profondes divergences. Issu pour partie de l’ancien parti unique de l’Allemagne de l’Est, Die Linke réalise ses meilleurs scores dans les régions orientales du pays et conserve des accents anticapitalistes qui rendent compliquée toute alliance avec le SPD, de l’aveu même de Martin Schulz. A l’inverse, les Verts, populaires auprès des classes moyennes des grandes villes, se verraient bien intégrer une coalition avec la CDU d’Angela Merkel, aux côtés de laquelle ils dirigent déjà la région du Bade-Wurtemberg.

Ces derniers mois, les sujets clivants se sont multipliés et semblent rendre plus délicate encore une éventuelle alliance entre ces deux partis pourtant naturellement portés à compléter une majorité de gauche avec le SPD, au sein d’une coalition «rouge-rouge-verte» comme il en existe à l’échelle régionale. Les critiques de la figure de proue de Die Linke, Sahra Wagenknecht, à l’égard de l’OTAN, ainsi que les fortes nuances apportées par son parti au sujet de l’accueil inconditionnel des migrants en Allemagne, ont suscité de vives critiques chez les écologistes. Au coude à coude dans les sondages, autour de 9%, les deux partis luttent chacun pour se rendre incontournable en vue d’une alliance post-électorale.

L’heure de vérité pour l’AfD

L’Alternative pour l’Allemagne (AfD) aborde ces élections avec moins de facilité qu’elle ne l’avait espéré. Les heures fastes, lorsque les instituts de sondage la créditaient de 15% d’intentions de vote, sont derrière elle et la défaite des mouvements eurosceptiques français, néerlandais et autrichien lors des dernières élections ont entamé une dynamique électorale qui semblait pourtant bien assise. Représentée par un tandem composé d’un homme et d’une femme peu connus du grand public, le parti compte toutefois faire son entrée au Bundestag (la chambre basse du Parlement) pour la première fois.

Pour y parvenir, l’AfD a entamé un virage à droite très marqué au début de l’année 2017, poussant vers la sortie la charismatique dirigeante du mouvement, Frauke Petry, qui militait pour un recentrage des thèmes de campagne. Accusant son ancienne figure de proue d’être trop consensuelle, notamment sur les questions «ethniques», l’aile droite du parti est ainsi parvenue à s’imposer, au prix de luttes internes largement relayées par la presse et dont l’image de l’AfD semble avoir souffert.

Néanmoins, les militants de la jeune formation politique créée en 2013 veulent y croire et voient des signes prometteurs dans les succès obtenus par leur parti lors des élections régionales de ces dernières années. Dans certains cas, l’AfD est parfois même parvenu à devancer la CDU.

Si son programme affiche clairement la couleur quant à l’arrêt de l’immigration, la sortie de l’Union européenne ou encore la lutte contre «la baisse de la natalité des populations de souche», les axes économiques y sont moins clairement développés. A l’image de son électorat disparate, où se côtoient classes moyennes supérieures comme foyers défavorisés, le programme économique de l’AfD allie baisse des impôts et hausse des investissements mais préfère, selon la ligne fixée par la nouvelle direction, donner la priorité aux thèmes culturels et sociétaux sur les questions économiques.

Alors que les sondages donnent le parti à 8%, le vote du 24 septembre prochain fera figure de verdict pour l’AfD.

 

Source francais.rt.com

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