Tensions en Méditerranée orientale : Des Rafale français envoyés à Chypre, en manœuvre avec 4 hélicoptères de combat israéliens?
Ces dernières heures, Athènes a dénoncé l’envoi par la Turquie du navire Oruç Reis dans une zone située entre les îles de Crète [sud de la Grèce] et de Chypre, à la hauteur de de la ville [turque] d’Antalya, dans le cadre d’une nouvelle campagne de prospection d’hydrocarbures. En clair, ce bâtiment va naviguer dans le eaux grecques et chypriotes, Ankara s’appuyant sur un accord signé en novembre dernier avec le gouvernement d’union nationale libyen relatif à ses frontières maritimes.
Visiblement, les autorités turques n’ont pas lésiné sur les moyens pour assurer la protection de ce bateau de recherches. En effet, via Twitter, le ministère turc de la Défense a publié des photographies sur lesquelles on voit l’Oruç Reis être escorté par 4 avisos A69 [la France en livrés 6 à la marine turque entre 2000 et 2002, ndlr] et un frégate Meko. Il est possible qu’un sous-marin complète ce dispositif [on croit en deviner sur l’une des prises de vue aériennes].
Quoi qu’il en soit, le 10 août, la Grèce a accusé la Turquie de « menacer la paix » en Méditerranée oriental et assuré qu’elle défendra « sa souveraineté et ses droits souverains. » En outre, le Premier ministre grec, Kyriakos Mitsotakis, s’est entretenu avec Charles Michel, le président du Conseil européen, ainsi qu’avec Jens Stoltenberg, le secrétaire général de l’Otan.
S’agissant de la discussion avec ce dernier, le chef du gouvernement grec a dû être déçu. « Cette situation doit être réglée dans un esprit de solidarité entre alliés et en accord avec les lois internationales », a en effet déclaré, via Twitter, M. Stoltenberg.
En tout cas, ce 11 août, Athènes a demandé la tenue en urgence d’un sommet de l’Union européenne pour évoquer le cas de la Turquie, laquelle, par la voie du chef de sa diplomatie, Mevlut Cavusoglu, a mis un peu plus d’huile sur le feu en affirmant qu’elle étendrait ses opérations de prospection « près des frontière occidentales de son plateau continental. »
« Le ministère des Affaires étrangères va déposer une demande pour un sommet d’urgence du Conseil des Affaires étrangères de l’Union européenne », a en effet indiqué M. Mitsotakis.
À Chypre [membre de l’UE, ndlr], on exprime les mêmes préoccupations. Ainsi, le 10 août, Nicosie a déclaré les activités turques « illégales ». Le ministère chypriote de la Défense a diffusé un Navtex dans lequel il explique que les actions conduites par le navire Oruç Reis constituent une « violation du droit internationale et des procédures de sécurité maritime » ainsi qu’une « infraction criminelle en vertu des lois de la République de Chypre ».
Et d’exiger, en conséquence, le retrait immédiat du bateau turc. Et cela vaut aussi pour le Barbaros Hayredin, un autre navire de prospection envoyé par Ankara dans la zone économique exclusive chypriote.
Dans cette affaire, la Grèce et la République de Chypre peuvent compter sur le soutien de la France. Un accord de partenariat stratégique est, en effet, en cours de finalisation entre Paris et Athènes. Et un accord de défense avec Nicosie vient d’entrer en vigueur.
Outre une coopération accrue dans les domaines de l’armement et de technologies de défense, ce texte prévoit la formation de militaires chypriotes en France, des exercices conjoints, des échanges et des autorisations visant à permettre aux navires et aux avions français de faire escale à Chypre.
« La montée des tensions sur la Méditerranée orientale et à ses abords, et particulièrement les pressions turques, ne peuvent que conduire les Chypriotes à être davantage que par le passé demandeurs de signes de réassurance. C’est en ce sens que l’on peut analyser les possibilités d’approfondissement de la coopération militaire franco-chypriote qu’ouvre l’accord intergouvernemental », avait ainsi expliqué un rapport parlementaire français, à l’occasion de l’examen de cet accord.
Visiblement, et alors que la tension en Méditerranée orientale est montée d’un cran au cours de ces derniers jours, la presse chypriote a indiqué que deux Rafale français, provenant probablement de la base aérienne projetée [BAP] en Jordanie, ont été repérés à l’aéroport « Andreas Papandreou », près de la ville de Paphos, située dans le sud-ouest de l’île. Les deux appareils sont a priori accompagnés par un avion ravitailleur C-135FR. Un Transall C-160 a également été repéré par les systèmes de suivi du trafic aérien. Mais rien ne permet de dire avec certitude qu’il s’est posé à Chypre.
Le site « in-Cyprus », lié au quotidien Phileleftheros, avance que les deux Rafale ont pris part à un exercice ayant mobilisé, durant une journée, l’armée chypriote et quatre hélicoptères des forces aériennes israéliennes. « Les avions français doivent rester à la base militaire d’Andreas Papandreou à Paphos pendant un certain temps car ils effectueront des patrouilles dans la région de la Méditerranée orientale », précise-t-il, en se fiant à des « sources bien informées. »
Pour rappel, le groupe aérien embarqué [GAé] du porte-avions Charles de Gaulle a participé à des exercices ayant consisté à tester la défense aérienne chypriote en février dernier. Plus récemment, la frégate légère furtive [FLF] Aconit a pris part à des manœuvres navales organisées par le ministère chypriote de la Défense et impliquant les frégates Kanaris [Grèce] et Alpino [Italie].
Photo : Archive – EMA/ armée de l’Air et de l’Espace