Dans un monde de plus en plus complexe, dans lequel la folie des hommes crée des tourbillons d’angoisse et de peur, arrive la fête de ‘Hanoucca, comme toutes les années, au cœur de l’hiver. Ces petites flammes qui s’allument dans la nuit noire, nous renvoient à la victoire du spirituel sur le matériel et à la nécessité de ne point perdre espoir dans un univers de plus en plus imprévisible.
La Tora nous demande, quand nous nous trouvons confrontés à des situations de ce type, de réfléchir à leurs potentiels enseignements, plutôt que de faire de multiples commentaires, la plupart du temps stériles. |
Une des caractéristiques essentielles de tous ceux qui sèment la terreur consiste à avoir une idéologie qui justifie leurs agissements, sans impliquer nulle remise en cause. Leur vision du monde reste fixe, et d’aucune manière ils ne sont prêts à écouter parole autre que la leur. Leur vision mortifère de l’existence va leur permettre de déclencher sans états d’âme toutes sortes d’actions abjectes et destructrices.
Il serait bon, tout en prenant la distance nécessaire, de réfléchir sur ce principe de rigidité de la pensée que l’on peut retrouver peut-être aussi chez nous au quotidien !
Il n’y a bien sûr aucune forme de comparaison à faire. Il suffit simplement de réfléchir au concept de cette vision que nous avons parfois de l’autre, ou de sa façon de penser, et que nous ne sommes pas enclins à remettre en cause.
Ce modèle de fonctionnement constitue un élément clé que nous devons transmettre à nos enfants. On ne peut envisager une véritable évolution sans se montrer prêt à supporter la question d’autrui, et à pouvoir se donner la liberté de changer d’avis ou de point de vue. Nous voyons cette notion quand nos Maîtres nous enseignent dans les Pirqé Avoth (2,14) : « Da ma chétachiv la’apiqoros », ce qui veut dire « Sache quoi répondre aux questions d’un renégat ».
On nous demande donc d’élaborer des réponses à des questions que l’on ne nous a pas encore posées, mais que nous devons imaginer ! Pour ce faire, il est nécessaire d’avoir une réelle souplesse d’esprit et de faire preuve de courage. Courage – car, en s’exposant à la question de l’autre, nous risquons de changer d’avis et de remettre en cause tout un système. En modifiant notre point de vue, nous révélons notre possibilité d’évoluer et d’avancer. Toutefois, en même temps, nous allons réussir aussi à valider notre système en le confrontant aux questions des autres et en essayant d’élaborer de vraies réponses. Bien sûr, cela exige de notre part d’avoir réfléchi et étudié, afin de posséder le minimum de connaissance nécessaire pour donner un sens à ce débat. Au passage, toute la richesse que nous pouvons trouver dans le monde de l’étude est liée à la capacité de faire face à la question de l’autre, en son état de maître ou d’élève. La recherche de la vérité se construit entre autres de cette manière. Cette capacité à se remette en cause touche aussi l’univers des relations humaines. Nous avons parfois des images négatives de l’autre sur lesquelles nous bâtissons un modèle relationnel. Nous n’envisageons pas d’autres hypothèses pour essayer de comprendre un mode de fonctionnement, et notre façon d’aborder la relation risque de ne jamais changer.
Ceci est fréquent dans le domaine de l’éducation d’un enfant. Nous avons tendance à le définir, et par la suite à garder cette définition de lui en permanence. Nous ne sommes pas prêts à analyser autrement le pourquoi de certaines de ses réactions ou attitudes. A moins d’envisager une autre lecture possible sur le pourquoi de sa manière d’être, nous allons garder le même type de réactions par rapport à lui, alors qu’elles ne sont peut-être pas du tout celles que l’on devrait avoir. Bien sûr, et c’est évident pour tout le monde, une autre explication de texte d’un comportement donné ne va pas le justifier. Cela nous permet par contre un autre jugement, et donc une réaction différente.
Pour transmettre cette notion à nos enfants et à ceux qui nous entourent, on peut jouer au jeu des hypothèses.
Cela consiste à prendre une situation et à voir comment on pourrait l’interpréter. Voici un exemple très simple. Sur un parking est garée une voiture, à cheval sur deux places. Première hypothèse : le conducteur – cet égoïste – n’a pas voulu se fatiguer ; en se garant, il a occupé deux places. Seconde possibilité : le parking était plein quand il est arrivé, et il a réussi à coincer sa voiture entre deux places déjà occupées. Les autres voitures sont parties et on ne voit plus que la sienne, garée à cheval sur deux places. On nous demande bien sûr de ne pas faire preuve de naïveté, et de savoir aussi, face à des faits terribles, analyser les choses avec réalisme et clarté.
Néanmoins, dans notre vie de tous les jours, il nous incombe d’essayer d’introduire, chez nous comme chez nos enfants, cette capacité à s’exposer à la question de l’autre et de faire preuve de souplesse dans notre manière d’analyser des situations d’existence