Comment l’Iran a planifié le contrôle de Gaza

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par Khaled Abu Toameh – Gatestone

  • Aucune amélioration n’apparait possible dans la bande de Gaza. Même si le Hamas devait perdre le pouvoir, les Palestiniens continueraient à souffrir sous la férule de groupes radicaux comme le Jihad islamique palestinien (JIP).
  • Même si le Hamas se levait un matin, faisait volte-face et établissait une véritable trêve avec Israël, d’autres groupes terroristes se mobiliseraient pour violer l’accord à tout moment.
  • Ces facteurs cruciaux doivent être pris en considération par tous les acteurs internationaux qui cherchent une solution à la catastrophe appelée Gaza. Bien entendu, il est toujours possible de continuer à vivre dans une réalité seconde et d’affirmer que tout irait beaucoup mieux si Israël levait son blocus sur la bande de Gaza.

Le deuxième groupe terroriste de Gaza après le Hamas est le Jihad islamique palestinien (JIP). Financé par l’Iran, il compte des milliers de partisans et de miliciens. Sur la photo : des membres masqués du JIP s’entrainent dans la bande de Gaza. (Photo par Abid Katib / Getty Images)

Quiconque imagine encore aujourd’hui qu’éjecter le Hamas de la bande de Gaza améliorerait la situation et accroîtrait les chances de paix entre les Palestiniens et Israël, risque fort d’être déçu. Le Hamas, qui a pris le contrôle de la bande de Gaza par la violence au cours de l’été 2007, n’est pas le seul groupe terroriste de cette enclave côtière ou résident deux millions de Palestiniens au moins.

Plusieurs groupes terroristes palestiniens coexistent aux côtés du Hamas, dans la bande de Gaza.

Le Jihad Islamique Palestinien (JIP) regroupe plusieurs milliers de partisans et de miliciens. Il est le plus important groupe terroriste après le Hamas. Si le Hamas venait à perdre le pouvoir un jour, le JIP serait en bonne position pour lui succéder. Le Jihad islamique palestinien n’a rien à envier au Hamas sur le plan de la modération. Si, à un certain niveau de réalité, le Hamas peut être considéré comme « bon », son remplacement ne donnerait pas un meilleur résultat. Le fondamentalisme islamiste marque le cœur et les esprits de dizaines de milliers de Palestiniens de la bande de Gaza.

Les deux groupes islamistes – Hamas et PIJ – sont comme deux pois d’une même cosse. Ils ne reconnaissent pas le droit d’Israël à l’existence et en appellent tous deux à la lutte armée pour « libérer toute la Palestine » de la mer Méditerranée au Jourdain.

Comme le Hamas, le JIP financé par l’Iran dispose également d’une branche armée appelée Saraya Al-Quds (Brigades de Jérusalem). Fondées à Gaza en 1981 par les dirigeants du JIP, Fathi Shaqaqi et Abed Al-Aziz Awda, les Brigades de Jérusalem sont à l’origine de centaines d’ attaques terroristes contre Israël, y compris des attentats-suicides. Ces dernières années, le groupe s’est distingué par ses lancers de roquettes et diverses attaques au mortier contre Israël.

Bien qu’indépendant, le JIP se coordonne avec le Hamas et les opérations terroristes communes ne sont pas rares. Les deux groupes disposent même d’un « commandement conjoint » pour leurs opérations contre Israël.

Les Brigades de Jérusalem aiment les démonstrations de force dans les rues de Gaza. Ces parades militaires visent à impressionner les autres groupes terroristes palestiniens et à prendre l’ascendant sur le public palestinien de Gaza. En général, le Hamas ne tolère pas la concurrence, mais face aux déploiements militaires du JIP et de sa branche militaire dans les rues de Gaza, il se tient coi.

Le Hamas sait qu’il n’a pas intérêt à chercher noise au JIP, un groupe puissant et influent. Nuire au JIP reviendrait à se créer des problèmes avec l’Iran, son bailleur de fonds. D’autant que le Hamas dépend également du soutien politique, financier et militaire de l’Iran. L’Iran considère le JIP comme son principal allié et sa marionnette dans la bande de Gaza. Par le biais du JIP, l’Iran plonge ses tentacules dans les affaires intérieures des Palestiniens, à la grande consternation du président Mahmoud Abbas et de son Autorité palestinienne soutenue par l’Occident.

Les relations entre l’Iran et le Hamas ont été chaotiques ces dernières années. Le Hamas a en effet refusé de soutenir le régime du dictateur syrien Bachar Assad que l’Iran a porté à bouts de bras. Certains médias arabes ont toutefois rapporté que l’Iran et le Hamas avaient accepté de laisser leurs différends de côté.

Ainsi, un certain nombre de délégations du Hamas se sont rendues à Téhéran dans le but de resserrer les liens. La dernière députation, en date d’octobre 2007, était composée d’Ezzat Al-Risheq, Sami Abu Zuhri, Khaled Kaddoumi, Mohammed Nasr et Zaher Jabarin. Elle avait pour but d’informer les dirigeants iraniens des derniers développements sur une éventuelle réconciliation du Hamas et de la faction Abbas du Fatah.

Malgré cet apparent rapprochement, l’Iran n’a qu’une confiance relative dans le Hamas. L’Iran redoute une éventuelle réconciliation du Hamas et du Fatah ainsi qu’une trêve avec Israël. Un rapprochement Hamas-Fatah équivaudrait pour l’Iran à une trahison. Tout rapprochement entre les frères ennemis palestiniens impliquerait une possible union des forces et, pire encore, de possibles pourparlers de paix avec Israël. Toute trêve avec Israël signifierait que le Hamas est prêt à déposer les armes et à abandonner la lutte armée contre « l’ennemi sioniste ». Cette « reddition » serait un anathème pour les mollahs de Téhéran, qui ont pour objectif déclaré d’éliminer Israël.

Le JIP est donc le seul et véritable allié de Téhéran dans l’arène palestinienne. Il se substituerait naturellement au Hamas si ce dernier concluait un accord avec le Fatah ou Israël.

Parallèlement, le JIP multiplie les gages envers ses maîtres de Téhéran. La semaine dernière, l’aile militaire du JIP a de nouveau déversé ses combattants lourdement armés dans les rues de la bande de Gaza aux fins d’édification du Hamas, de l’Iran et du reste du monde.

Abou Hamzeh, porte-parole des brigades de Jérusalem, a déclaré fièrement lors de la parade des paramilitaires que son groupe « ne fera jamais de compromis et n’acceptera jamais de négocier le moindre pouce de terrain de la terre de Palestine – de toute la Palestine ». Il a ajouté : « Nos armes sont le symbole de notre fierté et du pouvoir de notre peuple. Nous résisterons à toutes les conspirations et déjouerons tous les plans visant à liquider notre cause. »

Tout cela signifie plusieurs choses pour Gaza :

  • Premièrement, à court ou moyen terme, aucun changement positif n’est à espérer. Même si le Hamas devait céder les rênes du pouvoir, les Palestiniens continueraient à souffrir sous la férule d’autres groupes radicaux tels que le JIP.
  • Deuxièmement, même si le Hamas se réveillait un matin pour opérer une volte-face, et établir une véritable trêve avec Israël, d’autres groupes terroristes s’emploieraient illico à violer l’accord.
  • Troisièmement, la bande de Gaza continuera d’être envahie par plusieurs groupes lourdement armés qui continueront de lancer des attaques terroristes contre Israël et feront régner terreur et intimidation sur la population palestinienne.
  • Quatrièmement, ni Abbas ni aucune autre tierce partie ne pourra jamais mettre les pieds dans la bande de Gaza, faire régner l’ordre et confisquer les armes des groupes terroristes.

Ces quelques points cruciaux doivent être pris en compte par tous les acteurs internationaux qui cherchent une solution à la catastrophe appelée Gaza. Mais bien sûr, il est toujours possible de rêver la réalité et de considérer que tout irait pour le mieux si Israël levait le blocus qu’il instaure sur la bande de Gaza.

Khaled Abu Toameh, journaliste primé, est basé à Jérusalem.

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