Après la Seconde Guerre mondiale, les États-Unis et l’URSS se sont engagés dans la guerre froide, au cours de laquelle ils ont tenté de gagner en influence sur d’autres pays, le Moyen-Orient devenant un champ de bataille clé.
30 avril 2018, le président palestinien Mahmoud Abbas s’exprime lors d’une réunion du Conseil national palestinien à son siège à Ramallah, en Cisjordanie | Archives : AP (AP/Majdi Mohammed
Une relation changeante entre l’URSS et Israël
Après la Seconde Guerre mondiale, les deux superpuissances mondiales, les États-Unis et l’URSS, se sont battues pour étendre leur influence sur d’autres pays, le Moyen-Orient devenant un champ de bataille clé. Au départ, l’URSS fondait de grands espoirs sur le nouvel État d’Israël et fut le premier pays à le reconnaître en 1948. Les Soviétiques ont même permis à l’un de leurs mandataires, la Tchécoslovaquie, de vendre des armes à Israël pour se défendre contre les nations arabes.
Cette période fut cependant de courte durée. Les Soviétiques se méfièrent de plus en plus des liens étroits d’Israël avec les États-Unis et de son soutien à la Corée du Sud pendant la guerre de Corée. Joseph Staline, en particulier, fut alarmé par l’enthousiasme des Juifs soviétiques à l’égard de l’État juif, le considérant comme une menace pour l’identité soviétique unifiée qu’il avait travaillé si dur à créer. Cela conduisit à une campagne de propagande stratégique visant à diaboliser les Juifs et le sionisme au sein de l’URSS.
Les relations entre les Soviétiques et Israël se dégradant, ils se tournèrent vers le monde arabe, déversant de la propagande, des armes et des ressources dans des pays comme l’Égypte et la Syrie pour les aider dans leur combat contre l’État juif. Cependant, les Soviétiques se rendirent vite compte qu’ils avaient négligé un acteur clé dans cette lutte : la population arabe locale.
Joseph Staline, dictateur de la Russie soviétique, montre du doigt un discours à Moscou en avril 1935 (Photo : AP)
L’émergence du nationalisme palestinien
Avant 1948, le terme « palestinien » était souvent utilisé pour désigner les Juifs, et non la population arabe locale. Ces Arabes avaient une culture et une identité distinctes, mais ils ne s’identifiaient pas nécessairement comme « Palestiniens », mais plutôt comme des Syriens du Sud ou des habitants de leur ville natale, comme Jaffa. Alors que le nationalisme arabe se répandait dans la région au début du XXe siècle, certains Arabes locaux commencèrent à adhérer à l’idée d’un État arabe indépendant et autodéterminé, en particulier en réponse à la déclaration britannique d’un « foyer national pour le peuple juif » en Palestine dans la déclaration Balfour. Dans les années 1960, le rêve d’un État panarabe avait cédé la place à l’objectif de remplacer l’État juif d’Israël par un État arabe de Palestine. Ce changement s’inscrivait parfaitement dans le programme soviétique visant à creuser un fossé entre Israël et l’Occident.
Le KGB cultive le leadership palestinien
Les Soviétiques ont envoyé des centaines d’agents du KGB dans le monde arabe, à la recherche de dirigeants charismatiques qu’ils pourraient former pour faire avancer leur programme au Moyen-Orient. Ils ont trouvé leur homme en la personne de Yasser Arafat, un ingénieur qui combattait Israël depuis son adolescence. Les Soviétiques ont aidé les militants arabes à créer l’Organisation de libération de la Palestine (OLP) et ont même fourni le plan de sa charte, qui prônait la destruction d’Israël par la lutte armée.
Après la guerre des Six Jours de 1967, lorsque Israël a conquis des territoires appartenant à ses voisins arabes, les Soviétiques étaient furieux. Ils ont intensifié leur soutien à l’OLP, le KGB nommant un agent roumain, Ion Mihai Pacepa, pour fournir à Arafat des chèques mensuels de 200 000 dollars et le présenter au dictateur roumain, Nicolae Ceausescu, qui lui a enseigné des stratégies de propagande efficaces.
L’exploitation de la cause palestinienne par les Soviétiques
Les Soviétiques ont compris que les Américains bien intentionnés étaient profondément préoccupés par des causes telles que l’anti-impérialisme et les droits de l’homme. Ils ont présenté la cause palestinienne comme une lutte légitime pour les droits de l’homme contre un oppresseur bien plus puissant, en utilisant la rhétorique de la justice sociale pour détourner l’attention du monde du fait qu’Arafat et ses complices poursuivaient leur passion pour la justice sociale en assassinant des civils.
Cette stratégie a conféré à Arafat une légitimité dans le monde entier, y compris en Israël, où le Premier ministre Yitzhak Rabin signait les accords de paix d’Oslo avec un homme qui avait été payé pour semer la terreur dans tout le pays pendant la majeure partie de sa vie. L’entraînement des Soviétiques avait porté ses fruits et Arafat avait réussi à redorer son image, passant du statut de terroriste à celui de combattant de la liberté.
Une photo prise le 28 septembre 1995 montre le Premier ministre israélien Yitzhak Rabin (à gauche) et le président de l’OLP Yasser Arafat (à droite) se serrant la main après avoir signé un accord donnant aux Palestiniens davantage de contrôle sur la Cisjordanie, sous les auspices du président américain Bill Clinton, à la Maison Blanche à Washington DC. (Archives : AFP/ David Ake)
L’héritage de l’influence soviétique
Les Soviétiques ont certes encouragé le nationalisme palestinien, mais ils n’ont pas fait grand-chose pour concrétiser le rêve d’un État palestinien. Ils ont exploité le peuple palestinien à leurs propres fins. Leur soutien à l’OLP n’a jamais eu pour objectif de construire un État palestinien, mais de consolider leur propre pouvoir et leur influence.