Par Jeanne Durieux
Libéré après 44 ans d’incarcération dans les geôles d’Assad. Les images de Ragheed Al-Tatari, Syrien septuagénaire à la moustache blanche, bonnet bleu enfoncé sur des yeux cernés et mince sourire aux lèvres, inondent les réseaux sociaux depuis lundi. Ce Syrien a été libéré à la faveur de la chute du régime du dictateur syrien ce dimanche, tombé suite à l’offensive fulgurante d’une coalition de rebelles islamistes.
Le pilote était resté deux ans en isolement à la prison de Mezzeh, qui surplombe Damas, avant d’être transféré dans celle de Tadmor, dans le centre de la Syrie, jusqu’en 2000. De là, Ragheed Al-Tatari avait ensuite été transféré dans l’établissement pénitentiaire de Saidnaya, jusqu’en 2011, avant d’atterrir finalement à la prison centrale d’Adra, dans le nord-est de Damas, retrace le média syrien Zaman al Wasl. Ragheed Al-Tatari n’avait eu droit à un procès qu’au bout de quatre ans de détention, qui n’avait duré qu’une minute. Il avait été condamné à la réclusion à perpétuité.
«Mon père a été privé de tous ses droits les plus élémentaires. Quand je suis né en 1981, il était déjà en prison,», racontait son fils Wael à Daraj en 2021. «S’il avait fait une erreur, ou blessé quelqu’un, j’aurais pu comprendre pourquoi il avait été arrêté. Mais là, il est incarcéré depuis 41 ans et nous ne connaissons même pas les charges retenues contre lui», poursuivait encore son fils, qui n’avait pu voir son père qu’à peine une quinzaine de fois en plus de quatre décennies. Lors de sa première rencontre avec Ragheed, Waël, qui avait déjà 14 ans à l’époque, se rappelle avoir été «terrifié» lorsqu’il avait compris que les militaires qui gardaient la prison «savaient déjà tout sur [moi]. Mon nom, mon adresse, et même les noms de mes amis d’école». Réfugié au Canada, Waël militait depuis de nombreuses années pour la libération de son père.