Vous avez été accablée d’insultes racistes et antisémites. On a appelé à vous défigurer. Il y a eu peu de réactions. Comme si notre pays s’était accoutumé à la haine.
Vous avez été accablée d’insultes racistes et antisémites –“sale pute juive à négro”. On a appelé à vous défigurer, à vous tuer –“tu prendras l’acide en pleine gueule”– sur les murs de Vannes, dans la quasi-indifférence générale.
Peu de condamnations ou de soutiens exprimés. Un traitement journalistique rapide, en passant, comme pour un fait divers de plus. Une information parmi d’autres, apparemment pas assez importante pour se hisser à la Une des médias, ou mériter plus que quelques lignes factuelles, vite remplacées par des histoires plus attrayantes.
Presque rien.
Ce rien est vertigineux. Il donne la nausée. On imagine la rengaine des explications faciles, convenues ou révoltantes. Qu’il y a déjà tellement de faits graves, que les médias ne peuvent pas tout traiter. Que ces inscriptions ne sont qu’une provocation stupide à laquelle il ne faut pas donner d’écho. Que vous êtes une personnalité célèbre et que vous vous exposez à ce genre de réactions. Qu’elles ne sont que l’expression d’une infime minorité, qui cherche justement à faire parler d’elle.
Peu de condamnations ou de soutiens exprimés. Presque rien. Ce rien est vertigineux. Il donne la nausée.
“Tous ensemble pour lyncher Christine Angot”. Sans doute les auteurs de cet appel au meurtre ont-ils une majorité silencieuse contre eux –mais le silence est le meilleur complice de ces actes odieux. Ni les Français, ni les médias n’ont su les rejeter avec clarté et avec force. Pourquoi?
C’est comme si notre pays s’était accoutumé à la haine. Comme si un sentiment d’impuissance s’était progressivement imposé, chacun regardant monter cette violence verbale, prélude à l’agression physique, sans rien faire. Ce n’est pourtant pas une fatalité. Agir, c’est déjà réagir, à chaque fois que de tels actes sont perpétrés. Briser le silence, pour vaincre l’impunité de ceux qui propagent cette haine, et le sentiment d’isolement de ceux qui la subissent.
Christine Angot, vous n’êtes pas seule. C’est le sens de ces quelques lignes qui vous sont adressées. Nous sommes plus forts et plus nombreux que ceux qui veulent en finir avec vous. Nous devons le faire savoir. Détourner le regard et se taire, ce n’est pas juste de la négligence, ou de la lâcheté. C’est donner raison à ces inscriptions qui n’ont pas sali votre nom, mais notre honneur à tous.