Invitée par la société historique, Monique Heddebaut a présenté au centre social des Cinq-Bonniers son travail sur la rafle du 11 septembre 1942 à Lille. L’action des cheminots a contrecarré les plans de l’occupant nazi.
Pendant la Seconde Guerre mondiale, les départements du Nord et du Pas-de-Calais sont détachés du reste de la France. Ils sont administrés à partir de Lille par l’OFK 670 (Oberfeldkommandantur 670) sous l’autorité du gouverneur militaire de Bruxelles.
Le 11 septembre 1942, à l’occasion du nouvel an juif (Roch Hachana), l’occupant espère mettre la main, dans les deux départements, sur les familles réunies pour l’occasion. La police et la gendarmerie françaises ne sont prévenues que la veille des effectifs à fournir pour le bouclage des quartiers dans lesquels les troupes allemandes vont procéder à des arrestations. Toutefois, certaines familles sont prévenues et quittent leur domicile pour des lieux plus sûrs.
Les arrestations sont effectuées le 11 septembre entre 4 h et 6 h du matin de manière à attirer le moins possible l’attention de la population. Les familles du Valenciennois, du Douaisis et de la région de Lens sont regroupées avec les Lillois. À cette époque, Lille dispose de deux gares de fret (Saint-Sauveur et Fives). La déportation s’effectue à partir de la gare de Lille-Fives. Elle a été détruite par les bombardements. C’était une structure importante dont l’imbrication dans le tissu urbain permettra de nombreuses évasions lorsque les trains ralentissaient à l’entrée en gare.
Entre 40 et 60 personnes bénéficient des stratagèmes mis en œuvre par les cheminots. Une veste, un balai, un seau transforment un prisonnier en agent d’entretien. Des enfants quittent les lieux dans des wagonnets à charbon. Le chef de gare, Jean Mabille, couvre ses hommes. L’après-midi, la surveillance se renforce, des groupes sont alors cachés dans des pièces dont on a dissimulé la porte avec des armoires. Ils sortiront à la faveur de la nuit après le départ du convoi. Il emportait 513 déportés, il n’en reviendra que 15. Certains enfants seront conduits par des cheminots dans des familles amies désignées par les parents, d’autres bénéficieront de réseaux d’aide bien structurés sur la métropole.
Une semaine après les faits, le numéro 40 de la Voix du Nord, clandestine à l’époque, condamne l’action de la police lors de la rafle. Elle demande une aide matérielle pour les familles qui ont recueilli des enfants.
Au lendemain de la guerre, l’action des cheminots de Fives, unique en France, a été occultée par l’importance de la résistance armée. La liste des 24 cheminots en service ce 11 septembre 1942 a été reconstituée. Ils avaient l’habitude du militantisme dans ce quartier où la solidarité ouvrière était forte.
V. L. (CLP)
Source www.lavoixdunord.fr