Documents concernant des réfugiés juifs fuyant le nazisme retrouvés dans les archives de Comibol, à El Alto en Bolivie, en janvier 2017. / AIzar Raldes/AF
Comment ne pas se souvenir d’Oskar Schindler, entrepreneur allemand qui sauva des milliers de Juifs durant la guerre et dont l’histoire fut popularisée par Steven Spielberg avec son film « La liste de Schindler », sorti en 1993 ?
Ce récit n’est pas unique. Selon une récente découverte, le patron de l’étain en Bolivie, Mauricio Hochschild, aurait sauvé des milliers de Juifs du nazisme qu’il a aidés à fuir vers le pays d’Amérique du Sud, où il se trouvait déjà.
Une découverte intervenant 52 ans après la mort de Hochschild
Moritz (son prénom à la naissance) Hochschild, un Juif né à Biblis (Allemagne) en 1881, était un grand patron en Bolivie, connu notamment pour ses manières tatillonnes. La récente découverte de la Corporation minière de Bolivie (Comibol) met en lumière une personnalité un peu différente de sa légende.
La Comibol a en effet mis la main sur des documents concernant l’entreprise Hochschild. Parmi eux, les contrats de travail appartenant à des employés juifs comme celui d’Erico Nagel Thale, né à Leipzig en 1904, arrivé en Bolivie à 32 ans accompagné de sa mère âgée de 74 ans.
Autres trouvailles, une lettre envoyée par la crèche Miraflores, basée à la Paz, demandant au chef d’entreprise son aide financière pour s’agrandir en raison de l’arrivée de nombreux enfants juifs. Ou une lettre du gouvernement français le sollicitant pour qu’il fasse venir en Bolivie près d’un millier d’orphelins juifs.
Un sauvetage organisé
Mauricio Hochschild a usé de ruse pour obtenir l’arrivée de milliers de Juifs sur le territoire bolivien. L’entrepreneur a notamment profité de son amitié avec le président bolivien de 1937 à 1939, German Busch, pour obtenir la signature d’un décret d’ouverture à la migration juive en 1938, réservée jusqu’alors essentiellement aux agriculteurs. Par ce biais, il a fait venir d’Europe des poètes, des historiens et écrivains dont la venue fut justifiée officiellement pour améliorer la productivité agricole du pays.
Le baron de l’étain prenait aussi en charge le transport, les démarches migratoires ainsi que le logement à leur arrivée.
Hochschild estimait en 1938 avoir fait venir entre 2 000 et 3 000 Juifs et il les évaluait à 9 000 en 1939, indiquait le journaliste et historien Robert Brockmann.
Des documents prochainement mis en ligne
Si le nombre de Juifs arrivés en territoire bolivien a été considérable durant la seconde guerre mondiale, ils sont à présent estimés à 500, les générations ayant beaucoup émigré vers d’autres pays et notamment en Israël.
Pour sa part, Carola Campos, chef du service d’information de la Comibol, commente cette découverte : Mauricio Hochschild « a sauvé beaucoup d’âmes de l’Holocauste en les amenant en Bolivie et en créant du travail pour eux ».
Tous les documents retrouvés par la Corporation ont été authentifiés en octobre 2016 par l’Unesco, qui les a inclus dans son programme « Mémoire du monde ». Ils seront mis en ligne et accessibles à tous courant mars 2017 par le Musée de la mine bolivienne.