Durant les années Netanyahou, la croissance économique israélienne a été phénoménale, le PIB gagnant entre 2 et 4% par an durant la décennie 2010. Mais ces chiffres impressionnants masquent une réalité beaucoup plus complexe, juge la consultante Yaëlle Ifrah, ancienne conseillère économique à la Knesset qui rappelle d’abord l’œuvre du Netanyahou ministre des Finances entre 2002 et 2005 : « Il a démarré sa carrière politique en Israël, auréolé de son prestige d’avoir vécu et étudié aux États-Unis d’où il a importé toute la doxa libérale inspirée de Milton Friedman. C’était quelque chose de tout à fait exotique d’apporter des thèses libérales dans un pays qui avait été dominé et dirigé par les travaillistes.
Dans un premier temps comme ministre des Finances, Benyamin Netanyahou a procédé à une purge sévère avec des coupes claires dans les allocations sociales aux familles nombreuses, afin d’encourager les populations juives orthodoxes et arabes à aller travailler.
« Il a aussi affronté des syndicats tout puissants mais quand il est devenu Premier ministre, certaines réformes ont été complètement abandonnées et d’autres ont été poussés à l’excès de telle façon qu’aujourd’hui, l’économie israélienne est assez déséquilibrée. Israël a un régime social extrêmement mince, les allocations chômage et familiales sont parmi les plus basses du monde mais d’un autre côté, on a un secteur public pléthorique avec une productivité du travail extrêmement basse car les niveaux de formation et d’éducation sont extrêmement bas en moyenne. »
Dans ce contexte, Netanyahou a beaucoup communiqué sur la « start-up nation » et fait prospérer la « marque Israël ». Tel-Aviv, ville multiculturelle branchée et tolérante au bord de la mer Méditerranée, a tout d’une Californie encore plus exubérante et festive.
Mais ce n’est qu’une petite partie de la réalité israélienne poursuit Yaëlle Ifrah : « Bien sûr, on a un secteur de la high-tech largement encouragé par des avantages fiscaux très importants consentis aux entreprises. Elles ne payent quasiment pas d’impôt à partir du moment où elles sont exportatrices. Mais je rappelle que la high-tech en Israël ne représente que 8% de l’économie réelle. 8% des personnes qui sont employées en Israël travaillent dans la high-tech. Il y a véritablement en Israël une concentration de matière grise, d’innovation, de compétences, de capacité à improviser issus directement des unités d’élite de l’Armée, c’est le grand laboratoire de la « start-up nation ».
Mais il y a une incapacité totale à faire profiter le reste de l’économie israélienne de cette prospérité. » Selon le rapport annuel de l’organisation caritative Latet, la part des ménages israéliens vivant dans la pauvreté est désormais de 29,3%, la crise sanitaire ayant accéléré cette situation. (www.franceinter.fr)