PAR GILLES WILLIAM GOLDNADEL
Dans sa chronique, Gilles-William Goldnadel pointe les risques que prend le nouveau gouvernement à ne pas nommer « l’islam radical » à travers les attentats terroristes. Il appelle nos responsables politiques à ne pas céder aux facilités langagières qui nourrissent l’inaction et tendent à l’extravagance.
À quoi bon? Il est des jours où l’on se demande pourquoi rabâcher, remâcher, ressasser les mêmes choses.
Prenez le dernier attentat sur le London Bridge. Dans quelques jours, beaucoup d’eau aura passé sous les ponts endeuillés.
…Par la grâce de l’idéologie de l’occultation-diversion, les questions qui la fâchent n’ont pas été posées durant la campagne électorale, nonobstant le nombre des martyrs de France d’un terrorisme qui continuait de la frapper implacablement.
Jeune, moderne, séduisant, optimiste, notre Obama blanc à la poigne ferme et au sourire éclatant a suspendu tout sens critique d’un monde médiatique qui lui tend un miroir complaisant
Également à quoi bon prendre encore à témoin l’opinion des doutes que m’inspire chaque jour un peu plus le regard vide que porte notre nouveau président de la république sur les questions de l’islam radical et de l’immigration massive forcée?
Pour l’heure, Emmanuel Macron semble avoir trouvé la martingale idéale.
Jeune, moderne, séduisant, optimiste, notre Obama blanc à la poigne ferme et au sourire éclatant a suspendu tout sens critique d’un monde médiatique qui lui tend un miroir complaisant.
Il peut tout se permettre, même défier le politiquement correct. Il navigue par beau temps sous pavillon de complaisance journalistique. Lui peut ramener de la pêche au gros du Comorien, la lourde plaisanterie n’est strictement interdite qu’à la Marine nationale .
Dans l’univers médiatique éthéré, l’essence ethnique et l’orientation personnelle apparaissent désormais plus essentielles que l’orientation politique
Son seul rival en la matière pourrait ressembler au prochain premier ministre irlandais. Certaines gazettes hexagonales ont annoncé la désignation de Leo Varadkar uniquement en précisant ses qualités de métis et autres. J’aurais pourtant préféré savoir à quel parti il appartenait. Mais dans l’univers médiatique éthéré, l’essence ethnique et l’orientation personnelle apparaissent désormais plus essentielles que l’orientation politique.
À quoi bon donc tenter de résister à l’irrésistible légèreté de l’être médiatique qui gouverne aujourd’hui en majesté?
Parce que la réalité de plomb des balles, la réalité cloutée des bombes, la réalité d’acier des couteaux dans la plaie des malheureux nous impose malgré tout ce devoir impérieux.
Quand bien même faudrait-il désespérer à pouvoir enfoncer dans la tête façonnée des esprits décérébrés quelques dures vérités.
Oui, je doute fortement et de plus en plus de la capacité et même de la volonté d’Emmanuel Macron d’affronter de face l’hydre terroriste.
Oui, je pense que ce dimanche l’esprit de Winston Churchill planait davantage au-dessus de la Tamise tandis que le fantôme de Charlie le gentil s’amusait à flotter au-dessus de la Seine parisienne.
Pendant que la première ministre britannique n’hésitait pas à mettre en cause: «l’idéologie malfaisante de l’islamisme radical» et «l’excès de tolérance» à son endroit, notre président Macron se contentait des phrases gentiment creuses dont il a la magie, en évoquant classiquement «une tragédie» donc il se gardait bien de révéler l’identité de l’auteur prolifique.
Theresa May n’hésite pas à mettre en cause «l’idéologie malfaisante de l’islamisme radical » et « l’excès de tolérance » à son endroit.
Comment pouvoir espérer, dans ce cas, voir la partie la plus modérée de l’Islam se démarquer franchement de sa frange radicale, si au sommet de l’État nul ne lui indique ni le nom ni l’adresse?
Mais quand le nouveau chef de l’État s’essaye à expliquer les causes du phénomène -toujours sans le nommer – c’est pire encore. Ainsi le 29 mai : « Les terroristes prospèrent sur la misère. Lutter contre le terrorisme… C’est promouvoir l’éducation, s’engager pour le développement».
Nous sommes ainsi au cœur du syndrome de la victimisation de ce terrorisme sans nom. Au cœur de la maladie psychologique occidentale moderne. D’abord pour ce qu’elle dit d’inexact : Ben Laden était un milliardaire. Les auteurs du 11 septembre étaient des fils de famille saoudiens. Coulibaly revenait avec sa fiancée de villégiature à St Domingue. L’égorgeur du prêtre Hamel était issu d’une famille cultivée et n’était pas un cas social. Ensuite et surtout pour ce qu’elle ne dit pas de la haine islamique radicale pour les juifs et les chrétiens et de la haine pathologique pour les blancs, les Occidentaux, les Français, tous évidemment racistes et post-pétainistes, évidemment coupables de crimes coloniaux contre l’humanité ; bacille de la haine cultivé dans les éprouvettes des laboratoires masochistes islamo-gauchistes européens .
Tant qu’on n’appréhende pas le phénomène, faute d’être peut-être immunisé soi-même, tant qu’on n’ose pas le décrire ni même le nommer, il n’y a aucune chance d’espérer le vaincre.
Churchill pendant des années fut la risée des médias, des intellectuels et des politiciens londoniens. Son discours antinazi était considéré comme haineux, belliqueux et insultant pour le peuple allemand. On lui préférait, et de loin, l’esthétisme et l’optimisme d’un Bertrand Russell qui prônait le désarmement et la confiance.
De doux effluves russelliens flottent au-dessus de Paris. Pas seulement à l’Élysée. Une secrétaire d’État à l’égalité entre les hommes et les femmes nie l’existence de l’antisémitisme dans les quartiers. Une radio d’État ne se donne même pas la peine de signaler une pétition d’intellectuels prestigieux en faveur d’une dame juive assassinée par un islamiste antisémite. Des intellectuels déploient des trésors d’imagination conceptuelle pour excuser l’organisation d’une manifestation féministe «racisée» interdite aux hommes blancs.
Tout, absolument tout est permis, sauf dire du mal de l’islam radical. L’esprit critique est aboli.
Ainsi, la mixité et le métissage sont imposés partout au nom du vivre ensemble, sauf lorsqu’ils sont interdits pour cause d’émancipation. Des journaux dignes du Bondy blog relativisent le sort des agressions de femmes dans le quartier de la Chapelle. La maire de Paris comme des féministes de gauche ne sont pas en reste de propositions concrètes comme organiser des promenades exploratoires ou élargir les trottoirs. Tout, absolument tout est permis, sauf dire du mal de l’islam radical. L’esprit critique est aboli. Descartes est interdit.
À quoi bon alors? Parce qu’il n’y a d’autre choix que de regarder le mal en face. Même si un diable idéologique madré poursuit sa mauvaise farce.
© Gilles-William Goldnadel. Publié avec l’aimable autorisation du Figaro Vox.