L’éditeur présente ses excuses et retire le livre « Qui a trahi Anne Frank ? »
L’éditeur néerlandais a présenté ses excuses pour un livre qui a fait la une des journaux du monde entier en identifiant un notaire juif comme le principal suspect de la trahison d’Anne Frank aux nazis. Ambo Anthos a déclaré qu’il avait décidé de suspendre d’autres tirages de « La trahison d’Anne Frank » jusqu’à ce qu’il y ait plus de travail sur les points clés du livre. Dans un communiqué, la maison d’édition a déclaré qu’elle pensait maintenant avoir été emportée par « l’élan » autour de la publication du livre et qu’elle aurait dû adopter une position plus « critique ». La Trahison d’Anne Frank, de l’auteure canadienne Rosemary Sullivan, est basée sur six années de recherche réunies par une équipe dirigée par le détective à la retraite du FBI, Vince Pankoke. Le livre a été publié le 18 janvier accompagné d’une importante campagne de communication et des retentissements dans le monde entier. Le livre, résultat d’une enquête de six ans, suggère que Van den Bergh (notre photo), qui a agi en tant que notaire dans la vente forcée d’œuvres d’art à d’éminents nazis tels que Hermann Göring, avait été contraint par des risques pour sa propre vie d’utiliser des adresses de cachettes comme forme d’assurance-vie pour sa famille. Ni lui ni sa fille n’ont été déportés dans les camps nazis.
Le silence des médias
Une réponse aux vives critiques émises par plusieurs chercheurs à l’encontre de cette enquête qui met en cause un notaire juif. D’autres ont été plus virulents, comme Bart van der Boom, professeur à l’université de Leiden qui a évoqué « un non-sens diffamatoire » à la télévision publique NOS. Certains mettent aussi en cause la méthodologie de l’équipe, basée notamment sur l’intelligence artificielle. Des raisons qui ont poussé Ambo Anthos à se mettre en retrait, en attendant plus de précisions sur cette nouvelle enquête.
Menée sur une durée de cinq ans, dirigée par un ancien agent spécial du FBI, elle a été réalisée par une équipe d’historiens, d’enquêteurs, de criminologues ou encore de spécialistes du profilage. Dans le livre, ils résument les mois de recherches ayant abouti à cette nouvelle hypothèse mettant un cause un notaire juif, sur la base d’une lettre anonyme reçue par Otto Frank à son retour de déportation. Elle indique que sa cachette a été signalée par ce notaire, qui aurait fourni une liste entière d’adresses où des juifs se cachaient pour sauver sa famille.
Le livre est en revanche toujours imprimé par HarperCollins dans sa version française, qui ne souhaite d’ailleurs pas s’exprimer pour le moment sur décision de la maison d’édition néerlandaise. Par ailleurs, ce n’est pas la première fois qu’une enquête affirme avoir retrouvé celui ou ceux qui ont trahi la famille, arrêtée en plein centre d’Amsterdam en août 1944 après deux années d’enfermement.
Antisémitisme ?
Les dégâts causés par l’impact de l’annonce de la « trahison » du notaire juif, à l’origine de l’arrestation et la mort d’Anne Franck, avec un lancement relayé dans le monde entier, contraste avec le silence qui entoure cette marche arrière. Anne Franck, symbole de l’innocence détruite par les nazis, trahie par un Juif, la trouvaille est de taille, reprenant tous les poncifs d’un antisémitisme sans vergogne. Y voir une intention malfaisante, antisémite pourrait sembler exagéré, mais le silence et l’absence de rectificatif largement diffusé laissent planer ce doute. Salir la mémoire est tactiquement efficace: l’indignation est d’autant plus grande que les personnes sont innocentes. Les auteurs de cette enquête à charge seront-ils poursuivis pour antisémitisme ?
JForum – France Inter – Le Guardian