“Israël mobilise un vieux juge de gauche en soutien de l’armée” : le titre (et le contenu) de l’article du quotidien Le Monde publié hier en dit long sur le mépris affiché du quotidien de référence français pour Israël, mépris qui s’étend au juge Aharon Barak, qualifié par le correspondant du Monde en Israël Louis Imbert de “vieux juge” “auréolé d’une réputation de progressiste”. Aux yeux du quotidien de l’intelligentsia progressiste en France, il ne saurait en effet y avoir de “progressiste” authentique en Israël, pays « colonialiste » qui mène actuellement une guerre sans merci au Hamas, pour lequel la gauche française progressiste a les yeux de Chimène. Pour le journaliste du Monde, comme pour le Hamas, il n’y a apparemment pas de bon Israélien.
Le quotidien français pousse le cynisme jusqu’à citer un avocat israélien d’extrême-gauche, Michael Sfard, accusant le juge Barak d’avoir “usé de sa réputation pour approuver et blanchir chaque mesure draconienne introduite par l’occupant israélien…” Mais tout cela n’est que “patûre de vent”. La vraie question que se pose chaque Israélien aujourd’hui, à la veille de l’audience devant la Cour de La Haye, est de savoir si notre Premier ministre a eu raison de dépêcher Aharon Barak en tant que juge israélien. Nous serons fixés très bientôt à cet égard.
L’ancien président de la Cour suprême, qui a toute sa vie œuvré au renforcement sans limite de la Cour suprême, au point de la transformer en premier pouvoir israélien et de lui donner des pouvoirs exorbitants qu’aucune Cour équivalente ne détient dans le monde démocratique, saura-t-il, au crépuscule de sa vie, user de ses talents rhétoriques pour défendre Israël accusé à tort de “génocide”, alors qu’il mène la guerre la plus juste qu’il soit ? Si le calcul de Netanyahou s’avère judicieux, alors le juge Barak démontrera au monde entier que les accusations de génocide sont non seulement infondées juridiquement, mais qu’elles sont en réalité une calomnie moralement ignoble.
Au passage, Aharon Barak pourra aussi, ironie de l’histoire, démontrer en direct au peuple d’Israël la validité, ou au contraire, l’inanité d’un des principaux arguments des opposants à la réforme judiciaire dont il fait partie : celui selon lequel le système judiciaire actuel offre à l’état d’Israël, à ses dirigeants et à ses officiers une protection contre les poursuites judiciaires devant des tribunaux étrangers. Si la cour de justice rejette les demandes de l’Afrique du Sud, alors le juge Aharon Barak pourrait bien devenir, après avoir contribué à la division de la société israélienne et à l’affaiblissement d’Israël face à ses ennemis, le bouclier d’Israël.