- « Dans certaines régions, le niveau et la nature des persécutions correspondent peu ou prou à la définition internationale du génocide, telle qu’elle a été adoptée par l’ONU » – Revue indépendante du FCO (Foreign and Commonwealth Office) en soutien aux chrétiens persécutés.
- « Les assaillants ont demandé aux chrétiens de se convertir à l’islam. Après que le pasteur et les fidèles aient refusé, les agresseurs leur ont ordonné de se rassembler sous un arbre, puis ont confisqué les Bibles et les téléphones portables. Ils les ont ensuite appelé, l’un après l’autre derrière l’église. Et là, ils les ont exécutés » – World Watch Monitor, le 2 mai 2019.
- Comme le montre le rapport britannique, la persécution des chrétiens et des non-musulmans n’a rien à voir avec l’appartenance ethnique, la race ou la couleur de la peau ; il s’agit essentiellement de religion.
- S’il n’est pas mis fin à ces crimes, le continent africain sera un second Moyen-Orient. Ce continent autrefois à majorité chrétienne n’abrite plus qu’une minuscule minorité chrétienne, agonisante et sans défense.
« Dans la province du Nord-Kivu, à l’est de la République démocratique du Congo, des prêtres ont été pris pour cibles et assassinés. Pas moins de 15 groupes extrémistes armés sèment la terreur dans cette région » affirme Lindy Lowry d’Open Doors. Photo : la ville de Beni, au Nord-Kivu, où des dizaines de chrétiens sont morts victimes d’un attentat le 22 septembre 2018. (Source image : Razdagger / Wikimedia Commons) |
Selon un rapport préliminaire récemment publié au Royaume Uni, « un tiers de la population mondiale souffrirait d’une forme ou une autre de persécution religieuse, les chrétiens représentant le groupe le plus persécuté ».
Le rapport commandé par le secrétaire britannique aux Affaires étrangères Jeremy Hunt à l’évêque de Truro, Philip Mounstephen, devait être initialement rendu public à Pâques 2019. « Un délai supplémentaire s’est avéré nécessaire en raison de l’ampleur et de la nature [des persécutions anti-chrétiennes] », indique le pré-rapport. En attendant le rapport final qui devrait être publié fin juin, des conclusions « préliminaires » ont été rendues publiques en avril a expliqué Mounstephen.
Dans le « résumé » qu’en a fait la « Revue indépendante du FCO (Foreign and Commonwealth Office) en soutien aux chrétiens persécutés », on peut lire :
« Dans certaines régions, le niveau et la nature des persécutions correspondent peu ou prou à la définition internationale du génocide, telle qu’elle a été adoptée par l’ONU. »
L’Afrique – la zone géographique qui rassemble le plus grand nombre de chrétiens au monde – est l’une de ces « régions ».
Le 16 juin, l’école élémentaire chrétienne d’un village musulman en Ouganda a été détruite, a rapporté l’International Christian Concern (ICC).
Le 15 juin, « une foule de manifestants musulmans a incendié une église à Maradi, troisième ville du Niger. L’émeute a eu lieu après qu’un imam très populaire ait été arrêté pour avoir affirmé que le projet de loi destiné à régir les cultes était ‘anti-islamique’ ».
Les 9 et 10 juin, deux attaques terroristes ont coûté la vie à 29 chrétiens du Burkina Faso. Ce massacre de chrétiens a eu lieu moins de deux mois après l’assassinat, le 28 avril, du pasteur Pierre Ouédraogo, 80 ans, et d’autres membres de sa congrégation par des islamistes armés. Un dirigeant local, qui a requis l’anonymat, a déclaré à World Watch Monitor:
« Les assaillants ont demandé aux chrétiens de se convertir à l’islam, mais le pasteur et les autres ont refusé. Ils les ont alors rassemblés sous un arbre et ont confisqué leurs Bibles et leurs téléphones portables. Ensuite, ils les ont appelés, l’un après l’autre, derrière l’église. Là, ils les ont abattus. »
Le 7 juin, au Niger, une chrétienne a été enlevée par des terroristes de Boko Haram. Elle a été relâchée trois jours plus tard avec une lettre appelant tous les chrétiens à « quitter la ville dans les trois jours ou à se faire tuer ».
Les événements ci-dessus n’ont rien isolés. Dans la World Watch List 2019 d’Open Doors, une ONG qui fait de la veille sur les persécutions de chrétiens, on peut lire :
« Les violences extrêmes de l’Etat islamique et des autres milices islamistes ont globalement disparu du Moyen-Orient. Au fur et à mesure que leur territoire s’est restreint, les miliciens islamistes se sont dispersés ailleurs au Moyen Orient, mais aussi dans un grand nombre de pays d’Afrique subsaharienne. Leur idéologie a radicalisé de nombreux groupes islamistes tels que l’Etat islamique des Province d’Afrique occidentale (ISWAP), une milice meurtrière dissidente du groupe nigérian Boko Haram, qui a érigé en stratégie l’enlèvement et la mise en esclavage des femmes et jeunes filles chrétiennes. »
En Afrique, les terroristes islamistes ne sont pas seuls à persécuter les chrétiens. Gouvernements et populations s’en donnent à cœur joie.
Selon le rapport Open Doors 2019, la situation dans de nombreux pays africains est la suivante :
En Somalie, les quelques centaines de chrétiens qui y résident sont en butte à la « violence et à l’isolement ».
« On sait que 99% des Somaliens sont musulmans et que toutes les religions minoritaires sont lourdement persécutées. La petite communauté chrétienne vit sous une menace constante. La charia et l’islam sont inscrits dans la constitution et la persécution des chrétiens prend toujours des formes violentes. Dans de nombreuses zones rurales, des groupes islamistes comme Al-Shabab représentent le seul pouvoir réel. Les chrétiens doivent généralement cacher leur foi pour rester en sécurité. »
La Libye abrite une population chrétienne d’environ 38 000 habitants.
« Les convertis au christianisme sont victimes d’abus et de violence. La Libye abrite également de nombreux travailleurs migrants qui ont été attaqués, agressés sexuellement et emprisonnés, traitements qui peuvent se durcir encore s’il s’avère que ces migrants sont chrétiens. »
Le Soudan compte 1,9 million de chrétiens.
« Le pays a été gouverné comme un État islamique avec des droits limités pour les minorités religieuses et un encadrement sévère de la liberté d’expression et de la presse. Les chrétiens -1,9 millions d’habitants environ – font l’objet de discriminations et de pressions. Plusieurs églises ont été démolies en 2017 et 2018 laissant les chrétiens sans lieu de culte. Les musulmans convertis au christianisme représentent une cible particulière ».
L’ Érythrée, parfois appelée « Corée du Nord de l’Afrique », abrite 2,5 millions de chrétiens dont bon nombre peuplent les prisons.
« Depuis 1993, le président Isaias Afwerki a mis en place un régime autoritaire et brutal ou les droits de l’homme sont inexistants. En 2018, les attaques d’églises se sont développées et des centaines de chrétiens ont été emprisonnés dans des conditions inhumaines. Personne ne connait leur nombre ni leur localisation au sein du vaste réseau pénitentiaire érythréen. Personne ne sait s’ils sont encore en vie. »
Le Nigéria, où vivent plus de 90 millions de chrétiens, se révèle être l’un des pires endroits d’Afrique pour les chrétiens.
« Au Nigéria, le niveau de violence a atteint des sommets en raison de la généralisation des attaques perpétrées par les bergers Peuls contre les communautés chrétiennes. Des centaines de croyants ont perdu la vie sur la période considérée, et nombre de villages et d’églises ont été détruits par le feu. Dans le nord du Nigeria, les chrétiens sont ouvertement traités en citoyens de seconde zone. Les chrétiens d’origine musulmane sont persécutés par leurs propres familles ».
En Egypte, 10 millions de chrétiens souffrent de persécutions multiples.
« Les musulmans convertis au christianisme subissent d’énormes pressions de la part de leurs familles immédiates et élargies. Les blocages drastiques mis à la construction et à la sécurisation des lieux de culte s’ajoutent aux violences pour empêcher tout rassemblement des chrétiens. Ces dernières années, des groupes islamistes ont multiplié les actes de violences contre les chrétiens et les églises et nombre de fidèles y ont laissé leur vie. »
En République centrafricaine (RCA), la religion dominante est le christianisme et la population chrétienne compte plus de 3 450 000 personnes.
« Au cours de l’année écoulée, la situation des chrétiens a empiré en raison de l’intense pression exercée par les musulmans. Djihadistes et groupes criminels se relaient dans la violence exercée contre les chrétiens. En outre, ces derniers se retrouvent régulièrement mêlés au violent conflit qui oppose les musulmans du Séléka aux groupes d’autodéfense anti-Balaka. »
En Algérie, les 125 000 chrétiens ont assisté impuissants à « la fermeture d’un nombre croissant d’églises » au cours de l’année écoulée.
« Plus les convertis au christianisme ont affiché leur foi, plus les familles musulmanes et la société sont devenus intolérantes. Les lois qui réglementent les cultes non musulmans interdisent la conversion et le blasphème. Le prosélytisme et l’expression publique de la foi chrétienne deviennent donc des pratiques dangereuses ».
Au Mali, la population chrétienne est de 425 000 personnes.
« Ce pays d’Afrique de l’Ouest s’est progressivement radicalisé. Dans le nord en particulier, l’intolérance a généré une violence croissante contre les chrétiens. Djihadistes et bandes mafieuses s’entendent pour maintenir le pays dans le chaos et l’instabilité. »
En Mauritanie, onzième plus grand pays d’Afrique, 10 000 chrétiens tentent de survivre au sein d’une population de 4,5 millions d’habitants.
« La République islamique de Mauritanie est dotée d’un gouvernement autocratique qui est le protecteur officiel de la religion musulmane. Tout naturellement, l’État est à l’origine des principales persécutions de chrétiens. Mais prédicateurs et islamistes radicaux s’emploient à la radicalisation de la société et nourrissent l’antagonisme et la haine envers les non-musulmans. A cela, s’ajoute un système de castes qui marginalise les Mauritaniens à la peau plus sombre et ceux qui n’adhèrent pas à l’islam. »
En Éthiopie, bien que la religion principale soit le christianisme et que les chrétiens dépassent en nombre les 64 millions d’habitants, « l’islam radical se développe aux niveaux local, régional et national. Dans les zones rurales, où les musulmans sont majoritaires, les chrétiens sont harcelés et privés d’accès aux ressources communales ».
Le Maroc a une population chrétienne d’environ 31 500 personnes.
« Les chrétiens sont persécutés à la fois par l’État et par la société. L’État confisque les textes chrétiens chaque fois qu’ils sont rédigés en arabe, restreint l’évangélisation et bloque la création de lieux de culte pour les croyants issus de familles musulmanes. Partout dans la population, les musulmans radicaux exercent des pressions sur les chrétiens. En zone rurale, la pression exercée par la famille et la communauté peut se révéler considérable. »
En Tunisie, la vie des 24 000 chrétiens « au sein de la société islamique est pétrie d’hostilité et de pressions quotidiennes ».
« Et la menace islamiste – notamment ceux qui reviennent des champs de bataille de l’Etat islamique – est toujours préoccupante. En 2018, un attentat majeur a été perpétré dans la région frontalière avec l’Algérie en juillet et en septembre, un attentat-suicide a eu lieu contre un commissariat de police de Tunis. »
Au Kenya, où le christianisme est la religion principale, les chrétiens sont la cible des autorités musulmanes et des groupes terroristes.
« S’inspirant des islamistes radicaux de Somalie, les politiciens musulmans se sont donné pour objectif d’éliminer le christianisme. Les responsables exigent des églises des choses qui sont étrangères à la religion chrétienne, et les militants se livrent à de traitreux attentats-suicides et à la bombe contre ceux qui sont considérés comme les ennemis de l’islam. La corruption qui règne au sein des agences gouvernementales assure aux agresseurs une tragique impunité. »
Lindy Lowry, dans un article publié le 21 mai dans Open Doors, indique que Boko Haram, fondée en 2002 au Nigéria, a étendu son rayon d’action aux pays voisins :
« Ils ont mené des attaques terroristes au Niger, au Tchad et au Cameroun provoquant des crises humanitaires et des flots de réfugiés. Ils ont également mené des « raids esclavagistes » qui ciblent les femmes « dans les environs du lac Tchad, qui borde Tchad, Niger, Cameroun et Nigeria …
« Au Rwanda, des milliers d’églises ont été fermées et au moins six pasteurs ont été arrêtés depuis février 2018 pour « pollution sonore » et non-respect des règles de construction. Dans le Nord-Kivu, à l’est de la République démocratique du Congo, des prêtres ont été ciblés et tués. Au moins 15 groupes extrémistes armés sévissent dans la région ».
Comme le montre le rapport britannique, la persécution des chrétiens et d’autres non-musulmans n’a rien à voir avec l’appartenance ethnique, la race ou la couleur de la peau ; il s’agit avant tout de religion. En Afrique, des groupes islamistes – mais aussi des individus – attaquent et tentent d’annihiler les chrétiens uniquement parce qu’ils sont chrétiens. Si ces crimes ne sont pas arrêtés, le continent africain aura une destinée semblable à celle du Moyen-Orient. Il fut un temps où l’Afrique était une région du monde à dominante chrétienne. Progressivement, les chrétiens deviennent une minuscule minorité qui agonise sans défense.
Uzay Bulut, journaliste turque, est Distinguished Senior Fellow de l’Institut Gatestone.