Selon Libération, un capitaine de la police aux frontières de l’aéroport d’Orly est soupçonné d’avoir fourni illégalement des informations à un agent du renseignement marocain.
Pendant plusieurs années, la coopération entre un capitaine de la police aux frontières (PAF) et un agent marocain a permis au Maroc d’espionner la France en toute illégalité. Après un an de travail, la justice française a établi un premier scénario: le fonctionnaire de la police aux frontières transmettait des informations sensibles en échange de voyages offerts, rapporte Libération.
Le 31 mai dernier, un fonctionnaire de la police aux frontières (PAF) de l’aéroport d’Orly a été mis en examen et placé en détention provisoire pour corruption et violation du secret professionnel. Le directeur d’une société de sûreté de l’aéroport, soupçonné d’avoir servi d’intermédiaire, est également détenu provisoirement et poursuivi par la justice. Dans son édition de ce mardi, Libération a pu reconstituer l’affaire à partir d’éléments de l’instruction en cours.
Entre « 100 et 200 » rapports de passages de fichés S
Selon le quotidien, Charles D. a pris en 2014 la direction de « l’unité d’information » de la PAF de l’aéroport d’Orly. Cette unité est, entre autres, chargée de rédiger des notes lorsque des personnes fichées S passent la frontière. Pour mener à bien sa mission, le capitaine commence à collaborer avec le directeur d’une société de sûreté de l’aéroport, Driss A. Le policier pensait que Driss A. pourrait l’aider à récolter des informations. Et de fait, comme l’assure Libération, Driss A. informait le policier chaque fois que des personnes suspectes atterrissaient à Orly depuis le Maroc.
Mais rapidement, le rapport de force s’inverse et Driss A., décrit comme étant malin et « beau parleur », se met à soutirer des informations au policier de 59 ans, à la réputation mitigée et à l’histoire personnelle chaotique. Entre « 100 et 200 » rapports de passages de fichés S à la frontière ont ainsi été confiés à Driss A. en toute illégalité.
Selon les premiers éléments de l’enquête, ces informations confidentielles étaient ensuite délivrées à un troisième homme, Mohammed B., un agent du renseignement marocain en contact régulier avec Driss A. D’après les révélations du capitaine de la PAF, cet agent marocain n’est pas passé directement par les services de renseignement français parce qu’ils ne leur faisaient pas « confiance » en raison, notamment, des tensions entre les deux pays.
Le policier reconnaît son implication dans ce réseau
Toujours selon Libération, il se pourrait que la lutte contre le terrorisme n’ait pas été l’unique curiosité des services marocains. Au domicile de Driss A. ont ainsi été découvert des documents de la PAF sur le passage à la frontière d’un ancien haut responsable algérien et deux notes de l’ambassade de ce pays voisin. Une « négligence » selon Charles D., mais étonnante pour les enquêteurs, au regard des rivalités entre les deux pays voisins. En échange, Charles D. et sa famille ont été invités aux frais de la princesse au Maroc, et auraient dû partir début juin en Angola, encore une fois tous frais payés.
Quand l’enquête a commencé, au milieu de l’été 2016, à la suite d’un renseignement anonyme qui alerte l’inspection générale de la police nationale (IGPN), Charles D. reconnaît directement avoir participé à ce réseau dans « l’intérêt de la nation ». De son côté, Driss A. se fait discret et semble minimiser son rôle dans l’affaire.