A quoi sert une porte ?

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Autour de la table de Chabbath, n° 459 Beréchith

Cette semaine, on a la chance d’inaugurer un nouveau cycle de lecture de la Tora. La première paracha est Beréchith (au commencement). Elle traite de la création du monde et de tous les éléments qui la renferme : la mer, la terre, les montagnes et les fleuves. Cependant, le summum de la création sera l’homme : Adam et sa femme ‘Hava/Eve. L’enjeu de tout cela est qu’Adam serve son Créateur. Or le premier homme faillira dans sa tâche puisqu’il mangera du fruit défendu. En conséquence il sera expulsé du Gan Eden/paradis. De plus la mort s’installera (s’il n’avait pas fauté il aurait vécu pour l’éternité et le monde serait arrivé à sa perfection). Suite à cette événement, il s’unira à sa femme et naitront deux garçons : Caïn et Abel. C’est Caïn qui aura l’idée d’apporter une offrande à D’. Cependant son sacrifice végétal était de mauvaise qualité et ne sera pas agréé. Cependant, son plus jeune frère, Abel, approchera un sacrifice de meilleur qualité (du bétail) et sera agréé par Hachem. La tristesse et la jalousie irritera terriblement Caïn et le poussera à tuer son frère Abel ! Juste avant son acte, la parole de Hachem, lui sera adressé : «  Pourquoi es-tu en colère et que ta face est abattue ? Si tu t’améliores tu seras pardonné de tes fautes dans le cas contraire, la faute t’attend pour te faire trébucher. Toutefois, tu peux toujours te dominer… ».

Ce verset nous apprend beaucoup sur notre mauvais penchant (Yétser Hara’). Le Gaon de Vilna explique que le Yétser se trouve à l’endroit du Péta’h, l’entrée de l’homme. D’une manière générale l’entrée est le point de rencontre entre deux domaines : public et privé. Or le Yétser se tient à ce lieu de passage afin de faire trébucher l’homme. Il ne s’agit pas de « l’ouverture d’esprit » qui est souhaitable. Mais c’est l’endroit de confrontation avec son Yétser, là où l’homme doute. Cependant, lorsque l’homme n’a aucune faiblesse dans le bienfondé de son action, alors le Yétser n’a pas d’emprise. Continue le Gaon, c’est pourquoi les Tsadikim avaient l’habitude de jurer pour s’empêcher de fauter (par exemple s’abstenir d’une action afin de s’interdire la plus petite éventualité de fauter). C’est une manière de « colmater » les brèches qui peuvent se trouver en nous.

Dans le langage moderne, le rav Dessler zatsal explique que ce « Péta’h » c’est le point du libre choix de l’homme. Il le fait ressembler à un champ de bataille entre deux nations ennemies. La bataille fait rage dans plusieurs contrées et le terrain gagné la veille peut être repris le lendemain. Tandis que loin derrière la vie civile n’est pas encore affectée par la guerre qui fait rage à une centaine de kilomètres. Pareillement pour l’homme. Le champ de bataille c’est la lutte contre le Yétser, et le domaine conquis ou abandonné dépend des forces que l’homme met pour le contrer. Le champ de bataille s’appelle le libre arbitre : la faculté de faire ses propres choix. C’est la difficulté que l’homme a de faire ou non la Mitsva. Par exemple un homme qui commence à pratiquer la Tora aura une certaine difficulté à fermer sa boutique le Chabbath, le jour de son plus gros chiffre d’affaires. Son libre arbitre sera confronté à ouvrir ou non son business le jour saint (et c’est sûr que le mérite sera d’autant plus grand que sa recette était grande). Inversement, notre homme n’aura aucun mal à s’interdire de faire un vol à l’arraché quand il voit une grand-mère qui traverse le grand boulevard avec toutes sortes de parures étincelantes (de pacotille ou vrai…). Car c’est un point acquis pour lui : il ne truandera pas ou ne prendra pas la femme de son voisin. C’est à l’exemple du reste de la nation qui est loin des lignes de combat. Donc on aura compris que toute la vie c’est un grand champ de bataille et qu’il faut conquérir le plus de domaines car si on ne le repousse pas, c’est lui notre Yétser qui gagnera du terrain, car il veut toujours plus.

Autre exemple de ce fameux « Péta’h » : lorsque l’homme fait Techouva, avec le temps, beaucoup de domaines s’éclaircissent. La pratique du Choul’han Aroukh est la base de sa conduite donc son point de libre arbitre sera repoussé beaucoup plus loin encore. Il ne s’agira plus de savoir s’il va se permettre un comportement dépravé ou non, qui appartenait à un passé révolu mais aujourd’hui son challenge sera de savoir s’il va participer aux cours journaliers, du Daf Hayomi, ou de passer à une étude à mi-temps (Beth-Hamidrach/travail : bien-sûr avec la bénédiction de l’épouse). Seulement il reste un point important à éclaircir : c’est l’éducation des enfants. Beaucoup ont fait le saut de la Techouva, seulement au niveau de l’éducation des chères petites têtes blondes ou brunes les choses sont moins claires. En effet, la Tora insiste sur l’éducation de nos jeunes. Or, comme la société est très libérale en douce France ainsi qu’au pays où coulent le lait et le miel, nécessairement les parents auront tendance à réitérer le schéma qu’ils ont vécu dans leur famille 25 années auparavant. Ce sera un donc un grand laisser-aller qui se traduira par : « Mikaël, mon fils, tu sais à ton âge je me débrouillais tout seul, à toi de faire de même ‘Hazak !». Or, pour que notre Mikaël se développe harmonieusement dans la Tora il a besoin des repères de son père afin de lui montrer le chemin à suivre. Qui plus est, l’âge de l’adolescence c’est celui des changements chez nos jeunes. C’est aussi la période où l’enfant devient adulte et ne sais pas vraiment quoi faire : quelles orientations prendre (Yechiva ou la fac …). Tous ces choix sont très lourds de conséquences pour notre jeune et il aura besoin grandement de l’appui de son père. C’est justement le point de libre arbitre qui se présente devant le père. Est-ce qu’il va laisser son fils se débrouiller tout seul (et attention les dégâts…) ou bien  va-t-il l’accompagner dans son choix ? Le jeu en vaut la chandelle.

Comment améliorer son Chalom baïth ?

Cette semaine comme la paracha nous parle du premier couple sur terre, Adam et ‘Hava, on parlera aussi Chalom baïth.

Notre Sippour, réel, nous en dira long sur un mot relativement courant au pays où coulent le lait et le miel : « Lefarguen ». Cela ressemble à de l’allemand mais c’est un mot usité dans le lexique de la langue sainte. C’est : « complimenter son prochain ». Notre histoire véridique parle du rav Toïssig chlita, fils d’une grande famille de rabbanim. Le père du rav était Talmid ‘Hakham de grande renommée à Jérusalem. Il habitait les vieux quartiers de la ville, à Bathé Ungvar, un quartier ressemblant à Méa Ché’arim d’aujourd’hui. A l’époque (cela remonte à près de 60 ans) une forte population juive orthodoxe vivait dans de très vieilles maisons, des appartements donnant sur une cour intérieure. Le rav Toïssig zatsal enseignait la Tora et avait la particularité qu’à chaque fois qu’une des familles du quartier fiançait un des enfants, le rav prenait le téléphone et appelait la deuxième famille pour lui dire combien ils avaient pris un bon ‘Hatan assidu dans la Tora, rempli de crainte du Ciel, etc…

A l’époque, téléphoner était une véritable expédition car les maisons ne possédaient pas ce précieux instrument. Il fallait se rendre dans de rares téléphones publics et payer la communication avec des assimones/des jetons. Après avoir fait la queue, l’appareil engouffrait goulument les petites pièces percées. Mais à chaque fois que le rav décrochait le téléphone c’était l’allégresse de l’autre côté du fil, car comme vous le savez, les familles se connaissant à peine, elles se posaient réciproquement la question si elles avaient fait le bon choix ou non. Donc le coup de fil du rav effaçait les derniers soupçons qui pouvaient peser. Le fils de feu le rav continua le chemin de son père. Notre homme était rav dans une Yechiva Ketana (élèves entre 14 et 17 ans). A l’image de son père, le rav Toïssig chlita avait l’habitude de décrocher son téléphone à chaque fois qu’il entendait qu’un de ses anciens élèves se fiançait. Une fois, comme à son habitude, le rav entend qu’un élève se fiance. Il décroche le téléphone et appelle la famille de la Kala pour leur dire combien le futur gendre a de bonnes qualités et la crainte du Ciel. Le père de la Kala demanda au rav s’il peut mettre les hauts parleurs du téléphone afin que toute la maisonnée entende ses compliments. Le rav lui dit : « certainement » et répéta une deuxième fois les mêmes mots qui réchauffent le cœur, et à la fin de la conversation il bénit les jeunes tourtereaux afin qu’ils réussissent leur foyer dans la Tora et qu’ils méritent une grande descendance. Le rav entendit « Amen » de la part de toute la famille. La vie suivra son cours, les joies succédant à d’autres joies jusqu’au jour ou plus tôt dans une belle nuit le rav entende des coups répétés à sa porte. Il est 2 heures du matin. Le rav se lève regarde par le juda et reconnait la silhouette d’un Ba’hour Yechiva. Il ouvre la porte, le fait entrer. Ce dernier demande au rav s’il le reconnait et se présente : « je suis votre élève de la Yechiva Ketana d’il y a quelques années auparavant». Effectivement le rav se souvenait de lui. Rapidement le rav comprit que si on frappe à pareille heure c’est qu’il y a anguille sous roche. L’élève s’expliqua alors : « Ma femme m’a prévenu depuis longtemps qu’elle veut en finir avec notre mariage. La situation est catastrophique. Elle me dit qu’il y a une seule chose qui l’a retient d’aller à la Rabbanouth, c’est votre appel téléphonique entre les fiançailles et le mariage. Elle se dit qu’il n’est pas normal qu’un rav (vous) ait dit tant de compliments sur un énergumène pareil (en l’occurrence moi). Certainement il reste une possibilité de s’arranger. Donc je vous demande de sauver notre mariage ».

Le rav Toïssig compris rapidement la situation et dit : « Demain toi et ta femme vous venez me voir dans l’après-midi ». Chose dite, chose faite le lendemain les deux anciens jeunes tourtereaux viennent rencontrer le rav afin de sauver leur couple en péril. Le rav écouta attentivement les doléances de la femme puis celles du mari. Il comprit que sous les paroles amères se cachaient beaucoup de déceptions de part et d’autre mais que le fond des deux caractères restait prometteur. Il suffit de bonne volonté (de part et d’autre) et l’écoute d’une tierce personne. Après le 1er rendez-vous, il y en a eu beaucoup d’autres pendant quelques mois pour faire repartir le couple vers un horizon meilleur. Finalement les deux jeunes tourtereaux se réunirent à nouveau et la sérénité s’installa dans leur foyer. Un an et demi après, le jeune couple était de passage à Bené Brak et visita le rav Toissig. Cette fois leur visage était rayonnant avec un magnifique nouveau-né qui les accompagnait. LE COUPLE dit : « C’est le fruit de vos conseils ». Et aujourd’hui ils sont parents d’une belle progéniture dans une harmonie familiale : magnifique !

Donc on aura compris que complimenter les jeunes époux donnent du courage pour affronter les difficultés de la vie. C’est aussi certainement un magnifique outil pour encourager notre épouse dans son travail quotidien et en particulier le jour du Chabbat. Par exemple dire comme elle s’occupe bien des enfants, fait de bons plats et fait de belles prières… (Vous avez certainement beaucoup d’autres idées meilleures que les miennes !). Et si déjà les compliments sauvent de la catastrophe, à plus forte raison qu’ils réuniront les époux pour vivre dans la paix et l’amour (même après 20 ans et beaucoup plus, de mariage).

Coin Halakha : Chabbat on n’a pas le droit de trier deux éléments. Le principe est : dans le cas où il y a mélange on ne pourra pas enlever ce que l’on ne désire pas pour laisser ce qui nous intéresse : cela s’appelle Borer/trier. Au mieux on aura le droit d’extraire du mélange l’élément qui nous intéresse immédiatement. Par exemple si on nous sert un plat composé de haricots et de pommes de terre, et qu’on déteste les haricots, on ne pourra pas prendre les haricots et les placer en dehors de l’assiette ! Car c’est assimilé à un tri et c’est interdit ! Par contre on aura le droit de prendre les pommes de terre, et les mettre dans une autre assiette à condition qu’elles soient mangées dans la demi-heure (Choul’han ‘Aroukh 319.1)

Chabbat Chalom et à la semaine prochaine si D’ le veut.

David Gold

Tél / 00972 55 677 87 47

Email dbgo36@gmail.com

Une Berakha de santé et de protection à toutes les forces de sécurité en Erets depuis le nord jusqu’au sud et le retour de nos captifs de Gaza en bonne santé.

 

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