« A chaque génération, ils ont essayé de nous exterminer » 

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Il y a maintenant plus de 15 ans, j’ai entendu du rav Schlesinger (Genève) une interprétation qui en transforme complètement le sens. Je la livre ci-dessous.

Le roi David, au chapitre 3 du livre de Tehillim, remercie D’ de l’avoir sauvé de la révolte de son fils Avchalom (cf. 2 Samuel 15).

Mais le Talmud (Berakhoth 7b) bloque sur le début du texte, qu’il trouve profondément étonnant : pourquoi David a-t-il choisi d’introduire son chant par un terme qui dénote un élément de joie (מזמור) ? Le terme de « lamentation » (קינה) aurait été bien plus approprié pour décrire une situation qui était, somme toute, franchement dramatique.

Et le Talmud de répondre que David exprimait du soulagement : le coup d’état aurait pu être fomenté par un esclave ou un mamzer. Au contraire, avec Avchalom, son fils, à la tête de la révolte, David pouvait espérer trouver un peu de clémence parmi les insurgés. Selon cette première lecture, David a voulu remercier D’, car sa situation aurait pu être encore plus grave.

Toutefois, R. Yonathan Eibeshitz (1690-1764) rejette catégoriquement l’interprétation selon laquelle « cela aurait pu être pire ». Car tout peut toujours être pire ! Si un individu perd 1 million de dollars dans un mauvais investissement, doit-il remercier la Providence divine de ne pas avoir perdu 2 millions ? Evidemment, non.

La réponse préférée de r. Eibeshitz suggère de distinguer entre deux catégories d’événements : naturels (בדרך הטבע) et au-delà de la nature (שלא בדרך הטבע). Qu’un esclave se révolte contre son maître, c’est parfaitement compréhensible. Mais qu’un fils prenne les armes pour menacer son père, il y a un élément qui échappe aux règles de fonctionnement habituelles de la société humaine.

La différence, dans cette approche, n’est pas que la souffrance est moindre dans la deuxième alternative par rapport à la première ; mais que le dessein divin y est bien plus facilement perceptible.

L’Histoire, et son cortège de causalités plus ou moins évidentes, cache souvent la présence divine. Mais le voile, parfois, se déchire.

D’où la lecture suivante :

וְהִיא שֶׁעָמְדָה : cette réalisation nous soutient, tout comme elle a soutenu nos ancêtres dans le passé.

שֶלֹא אֶחָד בִּלבָד: ce n’est pas arrivé qu’une seule fois dans l’Histoire qu’un ennemi a cherché à nous anéantir. Une fois, c’est normal (בדרך הטבע) ! La France fait parfois la guerre avec l’Angleterre ou l’Allemagne, la Chine avec le Japon, la Russie avec l’Ukraine, etc. Quelle nation n’a pas d’ennemis ? Quel peuple n’a jamais été conquis ?

אלא שבכל דור ודור: mais non, le phénomène se répète à chaque génération. La constance de l’antisémitisme échappe à tous les paradigmes explicatifs des historiens et autres experts. C’est un aspect de notre existence qui est au-delà de la nature.

Et, au milieu du danger, faisant face à chaque génération à un autre danger existentiel, le peuple juif trouve une forme de réconfort à savoir que son destin reste à jamais entre les mains du Tout-Puissant.

Ve-hi Che-’Amda. A toutes et tous – ‘Hag Pessa’h casher ve-Saméa’h !

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