Drôle de tradition que celle de se déguiser à Pourim. Quelle en est la source ?
Divers avis ont été émis.
Pour la Knesseth haguedola (rapporté par le Eliahou Rabba), on le fait en souvenir des habits royaux accordés à Esther et à Mordekhaï à leur sortie glorieuse de chez A’hachvéroch, lors du dénouement de l’affaire Haman. Selon cette raison, il faudrait emprunter de préférence des habits de nobles.
Le Otsar kol Minhagué Yechouroun invoque une tout autre idée : nous voulons montrer que, malgré tout ce que nous pouvons faire de ml au courant de l’année, en vérité, sous les habits qui nous font ressembler à des non-Juifs, nous restons fidèles à nous-mêmes et à notre tradition.
Le Ma’htsitath hachéqel veut dire que cette habitude se prend du fait qu’alors, la crainte des Juifs est tombée sur les autres nations, au point d’amener nombre de non-Juifs à se convertir. Peut-être cela expliquera-t-il pourquoi certains empruntent des déguisements de non-Juifs ?
Dans les responsa Knesseth Ye’hezqel, on suit l’exemple des personnages de la Meguila qui se conduisent de manière « déguisée » : A’hachvéroch fait venir la reine Vachti, mais, selon nos Sages, l’ange Gabriel la couvre d’un voile pour masquer sa beauté – et elle est tuée ; Esther cache ses origines – et un voile se développe aux yeux de tous quant à son peuple réel, chacun pensant qu’elle appartient à sa propre nation (Meguila 7a) ; quand le roi se retire dans ses jardins, il y voit des personnes en train de déraciner ses propres arbres, et elles lui disent oeuvrer sur ordre de Haman (c’était des anges – déguisés) ; Eliahou le prophète se déguise lui aussi, et prend l’apparence de ‘Harbona. Mordekhaï lui-même change ses habits à plusieurs reprises : haillons et poussière, habits normaux, puis habits royaux…
Le Bené Yissa’har, au nom du Maharam ‘Haguiz, fait appel à l’allusion trouvée dans la Tora à Esther, « Et Je cacherai ma face » (‘Houlin 139b). Nous nous recouvrons donc nous aussi.
Une explication intéressante est livrée par le Séfer haToda’a : tout le drame de Pourim provient de l’attaque de Haman, descendant d’Amaleq, contre notre peuple. Or, ce dernier est un petit-fils de ‘Essaw, combattu par son frère Ya’aqov : ‘Essaw se fait passer pour un juste, trompant son père sur sa nature réelle, et Ya’aqov lui rend la monnaie de sa pièce, se déguisant en ‘Essaw le jour de la bénédiction. Le jeu des déguisements – quand ‘Essaw reste un mécréant sous sa robe de juste, et Ya’aqov un juste malgré son accoutrement, le faisant passer pour son frère…
Le rav Feldman mentionne, quant à lui, les nombreux miracles des douze années de ce drame – le tout, dissimulé dans un quotidien a priori normal.
Pourtant, après toutes ces explications, ne cachons pas la plus simple : c’est un jour de joie, et alors, se déguiser peut ajouter à l’ambiance générale qui doit régner…