Me Rozenbaum : la crise de la démocratie

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La crise de la démocratie,
par Léon Rozenbaum, avocat à Jérusalem

Il s’avère de plus en plus clairement que la crise de société en Israël n’est pas un évènement isolé. Tous les pays traditionnellement démocratiques, en Europe et aux USA, semblent frappés du même mal. Quel que soit le résultat des élections, ce dernier est contesté, soit en invoquant l’irrégularité du scrutin soit l’illégitimité des vainqueurs, quel que soit le motif invoqué.
Aux USA, en Grande-Bretagne, en France, en Israël, des pays qui brillaient il y a seulement encore quelques années par leur stabilité et leur alternance, se développent des contestations durables et violentes. Cela est vrai surtout si la « gauche » telle qu’elle se définit aujourd’hui, c’est-à dire passablement détachée des classes laborieuses mais inféodée à l’idéologie « post-moderne », a perdu les élections.
Mais en vérité, il y a plus : nombreux sont ceux qui n’acceptent plus les règles de la démocratie représentative. Celle-ci depuis 250 ans, consiste en l’acceptation par tous de confier la direction des affaires publiques à la majorité parlementaire qui se dégage à l’issue d’élections libres et régulières, la séparation des pouvoirs législatif, exécutif et judiciaire étant clairement définie et appliquée comme constitutive de la définition de la démocratie elle-même.
Durant toutes les années de vie des démocraties parlementaires représentatives, lorsque la majorité qui s’était dégagée n’était pas conforme à vos vœux pour des raisons de sympathies ou d’inimitiés politiques ou philosophiques, vous preniez votre mal en patience et tentiez de faire advenir une majorité plus proche de vos convictions lors de l’élection suivante.
Or voici que l’on vient affirmer que la majorité en question, quelle qu’elle soit, mais surtout si elle est « de droite », serait par nature oppressive à l’encontre des minorités politiques, ethniques, sexuelles, linguistiques et autres et que seul, le pouvoir judiciaire serait en mesure d’équilibrer cette propension.
Et l’on assiste donc notamment en France et Israël, à la montée vertigineuse du pouvoir des Magistrats qui seraient les ultimes recours contre l’arbitraire.
En France, l’institution d’une Cour Constitutionnelle chargée de vérifier la constitutionnalité de lois votées par le parlement, semble bien avoir remis en cause le principe de la souveraineté du parlement lui-même, et le fait que l’Etat se soit dessaisi de larges compétences au profit d’une construction européenne très bureaucratisée, n’ont fait qu’aggraver le processus de la déperdition du sens démocratique de l’Etat-Nation.
En Israël, au terme d’une longue évolution jurisprudentielle, la Cour Suprême s’est reconnue à elle-même des compétences exorbitantes tant en matière de contrôle de la constitutionnalité des lois que de l’opportunité de lois, règlements, mesures administratives, voire décisions de Ministres qui faussent totalement le système démocratique traditionnel pour aboutir au principe du « Miv’han Bagatz » (le critère du Bagatz), en un mot : le « Gouvernement des Juges ».
Or, par définition, dans une démocratie est assurée l’indépendance de la Justice et par conséquent les juges sont inamovibles. Cela est parfaitement concevable si ces derniers limitent soigneusement leur compétence à leur domaine qui est de dire le droit, interpréter la lettre de la Loi pour l’appliquer aux cas concrets qu’ils ont à juger. Mais lorsqu’ils se mêlent, d’intervenir dans tous les domaines, militaires, politiques, de l’organisation de la société, l’administration etc.., en bref, de gouverner à la place des élus du peuple, rien ne va plus.
Les exemples fourmillent en Israël de décisions de la Cour Suprême qui empêchent l’application de politiques décidées à la Knesset conformément à la loi, comme celle concernant les 50.000 entrants illégaux venus d’Afrique qui s’entassent au sud de Tel-Aviv, rendant la vie impossible aux citoyens israéliens modestes qui y vivent. Au nom d’une certaine conception des « droits de l’Homme », la Cour a mis à mal une politique de gestion de cette immigration sauvage qui prévoyait le retour dans leurs pays d’un certain nombre d’entre eux avec un pécule offert par l’Etat d’Israël.
Or ces juges n’assument aucune responsabilité face aux conséquences de leurs décisions, dans ce cas de faire perdurer la misère et les délits. Ils n’ont nul besoin de se justifier face à leurs électeurs. C’est bien là le résultat de la violation du principe démocratique de séparation des pouvoirs par la Cour Suprême.
Il faudra une longue réflexion sérieuse pour tenter de comprendre cette évolution antidémocratique catastrophique. Mais l’on peut tenter de dégager déjà une série d’explications.
L’évolution des technologies et notamment le téléphone portable qui est en réalité un ordinateur connecté à des réseaux mondiaux dans la poche de chacun, a pu modifier de fond en comble le sentiment d’appartenance à une Nation, à un Etat et créer l’illusion d’un « gouvernement mondial » ou du moins de solidarités d’un autre type comme l’urgence écologique, le soutien aux migrants, etc…, reléguant la représentation parlementaire au magasin des accessoires…
La baisse du niveau scolaire, l’émiettement de la société, la montée de la violence, la circulation accrue des armes, l’isolement de l’individu, remettent en cause les caractéristiques des sociétés occidentales développées et l’idée démocratique semble y avoir perdu le caractère d’évidence qui les informait.
D’autre part, l’arrivée massive en Occident de populations islamiques, dont les constantes culturelles sont très éloignées des règles démocratiques qui, elles aussi, ont dû murir lentement avant de s’imposer dans les pays de l’ouest, est aussi un facteur de remise en cause de l’évidence démocratique.
Rappelons que pour l’Islam, la liberté de l’homme est un blasphème qui remettrait en cause la toute-puissance de D’. C’est pourquoi depuis 14 siècles, il n’y a pas d’Islam sans Etat totalitaire. Quand une part non négligeable de la population, en Occident même, est porteuse de ces principes, l’idée démocratique y est en recul.
Les caractéristiques du post-modernisme, ses tentations simplificatrices de la réalité, sa théorie des genres niant la différenciation sexuelle naturelle, ses manipulations du langage prétendument égalitaires masculin-féminin, sa promotion insensée de l’homosexualité, du transgenre, sans parler du mépris militant des interdits sexuels bibliques qui informaient depuis 2.000 ans une civilisation chrétienne qui les avait hérités du Judaïsme, entraînent eux aussi un abandon général de toutes les contraintes et de tous les principes traditionnels de vie sociale. Rien de surprenant que les principes démocratiques ne soient pas épargnés.
C’est en Israël que cette évolution est probablement la plus dangereuse. En effet, le retour souverain des Juifs dans leur patrie historique il y a 75 ans après un exil de 19 siècles et ses succès militaires, technologiques, agricoles, scientifiques et spirituels par l’essor sans précédent des études bibliques et talmudiques, sont de plus en plus pris en grippe par un Occident dont le déclin s’accentue. Malgré un adoucissement récent, les pays d’Islam toujours empêtrés dans le sous-développement, continuent très souvent de se positionner en adversaires d’Israël.
Or voici qu’à l’issue des dernières élections, il y a à peine six mois, a été déclenché un tir de barrage sans précédent contre le gouvernement démocratiquement formé selon toutes les règles en vigueur. Avec une incroyable audace manipulatrice, d’immenses manifestations subversives prétendent faussement vouloir « sauver le démocratie » ! En fait, elles n’ont pour seul objectif que de renverser à tout prix ce gouvernement légal et démocratique.
Tout se passe comme si, au vu de l’étendue des moyens logistiques mis en œuvre, des appels à la subversion de l’armée, du sabotage de l’économie nationale par la diffusion de fausses nouvelles, du chantage à la disparition de la haute technologie, de la complicité de nombreux médias, des forces qui ne disent pas leur nom, par un financement massif venu de l’étranger, relayé localement, tentaient une manipulation majeure sur un petit pays devenu trop indépendant et trop majoritairement ancré dans sa tradition biblique, à contrecourant du reste du monde développé.
La réforme judiciaire, très modeste, envisagée par le gouvernement pour limiter les pouvoirs que la Cour Suprême s’est progressivement accordée à elle-même, tout en enfermant son recrutement dans un sérail politique bien défini, sans rapport avec les courants essentiels au sein du peuple, n’est bien entendu qu’un prétexte démesurément enflé à dessein. La subversion avait cherché d’autres chevaux de bataille avant la réforme, elle en cherche déjà d’autres.
L’enjeu pour l’idée démocratique dans le monde est plus important qu’il n’y parait.

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