Illustration : le moment de l’explosion à Beyrouth
Par Francis MORITZ (Bazak) – Temps et ContreTemps
Au Liban, depuis des mois, les quelques 250.000 travailleurs immigrés sont les victimes impuissantes des trois fléaux qui accablent le pays, la crise économique et sociale, la pandémie, l’explosion. Ils n’ont plus été payés et ont été littéralement jetés à la rue par leur employeur, en l’absence de contrat et de lois sociales. Pour ceux qui disposent encore d’un emploi pour survivre sans être rémunéré, il s’agit d’un travail forcé, une forme d’esclavage. Ils ne disposent d’aucun soin médical. Leurs autorités consulaires les ignorent. Ils sont devenus le Lumpenproletariat de la société libanaise. Tous souhaiteraient rentrer chez eux, plutôt que de subir cet enfer au quotidien. Ça l’était déjà avant l’explosion, c’est pire après.
Paradoxalement, ces migrants africains ou réfugiés de Syrie, seront la seule main d’œuvre de demain, si le Liban obtient des financements pour sa reconstruction. Leur départ est presque impossible, faute de moyens pour se procurer un billet et en l’absence du passeport confisqué par l’employeur qui dispose ainsi de tous les droits sur son employé. Ce n’est donc pas une pratique limitée à la péninsule arabique. Cette situation se double depuis quelques temps d’un nouveau problème de sécurité pour Israël.
Le Hezbollah qui contrôle la frontière pose un nouveau défi à l’état hébreu. En s’inspirant de sa stratégie bien connue d’utiliser la population comme boucliers humains, les stratèges de l’organisation terroriste ont imaginé une nouvelle méthode bon marché pour provoquer Israël : utiliser de malheureux travailleurs soudanais au chômage. Ces migrants qui sont plusieurs milliers, constituent un vivier idéal pour y recruter des candidats au passage clandestin de la frontière avec Israël, en leur laissant miroiter une bien meilleure situation qu’au Liban et la mansuétude des autorités.
On se souviendra des infiltrations de travailleurs clandestins via le Sinaï et l’Egypte dans un passé récent, qui provoquèrent un réel problème social en Israël. L’ampleur n’est certes pas la même, mais pose plusieurs problèmes sécuritaires, sinon sanitaires, en raison de la pandémie.
Jusqu’à maintenant, avant l’explosion de Beyrouth, les cas étaient peu nombreux. L’armée avait réussit soit à arrêter les candidats à l’infiltration soit à les renvoyer au Liban. On reconnait un seul cas d’un infiltré arrêté puis finalement libéré en Israël.
Les médias proches du Hezbollah ont rapporté ces incidents en les amplifiant et en soulignant la porosité de la frontière nord longue de 104 km, pour miner le moral de la population, notamment dans la région du Mont Dov. La presse israélienne à vocation populiste s’est également fait l’écho de ces tentatives, en exagérant leur importance. En fait, s’il n’y a rien de comparable avec ce qui s’est produit dans le passé le long de la frontière de 250 km avec l’Egypte, Israël, dans la conjoncture actuelle, sanitaire et sécuritaire, ne veut ni ne peut se permettre un nouveau problème de même nature.
Le succès de telles tentatives permet aussi au Hezbollah d’effectuer autant de tests que de tentatives réussies, qui révéleraient des failles dans la barrière de défense. Il opère aussi sous couvert de diverses associations ou ONG dont «Green without borders» qui a comme vocation(!) de planter des arbres dans les zones contestées. Ce qui leur permet de justifier leur présence, entre autre, face à la FINUL qui observe ces zones et lui permet d’effectuer des missions d’espionnage.
Le chaos actuel du Liban et la mainmise des terroristes sur tout le sud-Liban, accroissent significativement tous les risques sécuritaires. Que n’écriraient pas les médias bien intentionnés si demain Tsahal abattait des malheureux soudanais infiltrés ? La période est d’autant plus critique que le renouvellement du mandat de la FINUL est en cours.
Les forces politiques existantes et le président Michel Aoun, très proche du Hezbollah, sont favorables au maintient du statu quo, qui est insupportable pour Israël. Sa mission et la taille limitée de cette force, la rendent inefficace, de fait plutôt complaisante envers le Hezbollah et ses affiliés. On peut espérer que le refus de la situation actuelle par la majorité de la population libanaise le conduira peut-être à mettre la filiale terroriste de l’Iran hors jeu. Accessoirement Michelle Bachelet, haut Commissaire aux Droits de l’homme, sera peut être intéressée par ce sujet.
L’UE doit sortir de son immobilisme, d’abord en interdisant sa présence en Europe, ensuite les amis du Liban, qui semblaient très nombreux, auront à cœur de libérer ce pays du joug terroriste. Il faut espérer que le FMI n’acceptera pas de prêter massivement à ce pays en l’absence de véritables reformes et aussi longtemps qu’il acceptera la présence du groupe terroriste au sein des institutions dont il tire les ficelles.
Au delà, l’UE et la France seule, absentes des grands changements dans la région, ne pourront pas renverser la table.